Si vous avez vu ma critique de The DioField Chronicle, j’avais dit que je trouvais intéressant et plutôt cool de voir Square Enix prendre autant de risques en finançant des petits et moyens projets, certainement galvanisé par le succès retentissant de Final Fantasy XIV et confiant dans le fait que tous les portages et remasters de leurs plus vieux titres qui permettent une rentrée d’argent régulière et plutôt tranquille. Parce que bon, ils pourraient tout aussi bien juste se contenter de ça et récupérer l’argent pour ne l’investir que dans les plus gros projets comme FFXVI, Kingdom Hearts IV ou bien Dragon Quest XII, mais non ! Une partie de ces bénéfices part dans des projets comme The DioField Chronicle, Harvestella ou bien des revivals un peu plus spécifiques, comme la licence Valkyrie Profile !
Et encore une fois, et comme vous vous apprêtez à vite le découvrir, non là je ne juge pas la qualité des jeux qui ont découlé de ces décisions, mais des décisions en elles-mêmes, surtout en voyant qu’en plus lesdits jeux sont des jeux solo complets qui n’ont aucun DLC en vue, ni aucune micro-transaction pour empoisonner l’expérience de jeu ! Et non, je n’oublie pas le coup des NFT et de la blockchain ou du jeu-service qu’est Babylon’s Fall qui va littéralement arrêter de fonctionner en Mars prochain, mais justement, la sortie de ces autres jeux à budget moyen donne aussi l’impression d’être une lettre d’excuses pour racheter leurs fautes.
Et dans le cas de Valkyrie Elysium, ce qui est fou, c’est que tel un Einherjar, la série revient d’entre les morts après plus d’une dizaine d’années d’absence et un épisode ultra difficile sur Nintendo DS qui a notamment inspiré le Canon des Âmes de Fuga ! Et, plus fou encore, comme le dernier Sakura Wars de Sega, Valkyrie Elysium a décidé d’entreprendre la voie du soft reboot et changer totalement son gameplay pour devenir un beat-them-all à la NieR Automata… Et maintenant que je fais ce parallèle, quelque chose me dit qu’en fait le projet est probablement né pour essayer de répliquer le succès de NieR, vu les thématiques plutôt similaires d’un jeu sur l’autre. Hum.
Dans tous les cas, c’est un pari extrêmement risqué et… Ouais non, ça n’a pas payé. Enfin, en théorie, ça aurait pu et ça aurait même du, parce que Valkyrie Elysium a vraiment tous les bons ingrédients pour faire un titre qui aurait pu être exceptionnel, mais même après l’avoir fini, je ne saurais totalement dire quel est l’ingrédient qui a manqué et qui a fait que rien n’a marché comme il l’aurait fallu.
Par contre je crois que j’ai défoncé tellement de mobilier dans ce jeu que j’ai à tout jamais été blacklisté chez IKEA.
Un jeu bien meublé
À la question : faut-il avoir fait les Valkyries de profil pour apprécier celle en 3D, je dirai non, vu qu’il n’y a aucune référence à Lenneth et sa bande. L’histoire ici est vraiment hyper simple : c’est la fin du monde ! Le Tout Puissant Odin et la louve Fenrir se sont mis sur la tronche pour tenter de déterminer quel serait le sort du monde et d’Asgard et après une bataille ardue, tous deux s’en sont sortis avec de graves blessures, les forçant tous deux à se réfugier dans leur tanière pour récupérer. En attendant, Odin a décidé de créer une Valkyrie à qui il va confier la tâche de purifier un maximum d’âmes pour les sauver de la fin du monde et réunir un maximum de guerriers valeureux pour l’aider dans sa lutte contre Fenrir.
Eeeet… C’est là que le jeu se prend les pieds dans son tapis finement brodé. L’histoire est vraiment maladroitement écrite et ne fait que faire le taf plutôt que de raconter une histoire tragique qui nous aurait transporté et traumatisé comme les anciens épisodes. Là, l’histoire est non seulement hyper basique, mais aussi ultra prévisible, avec juste deux twists un minimum sympa et les morceaux intéressants sont plus ou moins coincés dans le menu collection à mesure que l’on fait des missions secondaires pour nos Einherjars, puisqu’il s’agit de souvenirs audio avec une spatialisation du son qui donnerait presque l’impression d’écouter une pièce de théâtre les yeux bandés. Tout va à la fois trop vite et pas assez parce qu’il ne se donne pas la peine de raconter une histoire, ce qui est d’autant plus dommage que, vu la longueur des niveaux, il y avait large de quoi meubler efficacement pour donner l’impression de voir un semblant d’histoire progresser plutôt que de ressentir le poids de notre solitude pendant des sessions de 30 à 45 minutes… Et c’est sans parler du personnage de la Valkyrie, qui essaye de copier la froideur d’une 2B de NieR Automata, mais sans le côté cool et dont le développement semble plus précipité et forcé qu’autre chose, ou même les confrontations avec la mystérieuse Valkyrie qui nous sert de rivale et dont tous les échanges avec elle se résument à « T’es méchante ! » « Non toi t’es méchante ! » avant de partir en baston alors que la situation aurait pu être résolue dès la première confrontation si elles avaient pris le temps de discuter et du coup ça créé un faux mystère dont on se fiche parce que c’est juste mal écrit. Aussi, juste pour vous donner une idée du truc : je ne me souviens déjà plus du nom des personnages principaux en dehors de ceux tirés de la mythologie nordique alors que j’ai fini le jeu il y a 4h au moment où j’écris ce texte…
Et pour en finir avec l’écriture, je vais passer sur quelque chose de bien plus littéral : les sous-titres sont illisibles 80% du temps ! Pour une raison esthétique, ils ont choisi une jolie police d’écriture, mais c’est écrit tellement petit et la police est tellement fine et les contours sont tellement inexistants et posé sur une boite de dialogue à peine sombre que dès que le texte passe devant un décor un minimum clair, on ne voit plus rien ! Sachant que la plupart des dialogues prennent place dans le palais d’Odin, qui est d’un blanc immaculé, autant dire que je me suis fait mal aux yeux rien qu’à essayer de lire un texte assez mal traduit et qui donne même parfois lieu à des non-sens (sans parler des fautes de syntaxe, que je laisse passer, parce que j’ai passé la semaine avant Valkyrie Elysium à relire certains passages de The Hayseed Knight, et j’ai moi-même laissé passer des bourdes impardonnables).
Et là où le bât commence à blesser, c’est qu’en dehors du scénario, le jeu propose un gameplay bien cool qui a le potentiel de tout rattraper ! Car quitte à reprendre des éléments de NieR Automata et de Devil May Cry, autant aussi reprendre la base de leur gameplay !
Concrètement, Valkyrie Elysium est un jeu focalisé en grande partie sur les combats, et ceux-ci sont presque parfaits ! On a les classiques attaques légères et lourdes qui peuvent s’enchaîner de différentes manières pour créer des combos rigolos, de nouvelles attaques qui s’ajoutent à notre arsenal à mesure que l’on développe nos armes, des sorts que l’on peut lancer pour exploiter les faiblesses élémentaires de nos adversaires (ou plus tard lancer des super attaques qui déciment les ennemis) et on a même une sorte de grappin à la Nero de Devil May Cry pour foncer tout droit sur nos ennemis ou nous accrocher plus facilement aux ennemis aériens !
Et en plus de ça, la principale nouveauté de ce jeu vient des Einherjars, qui peuvent être invoqués assez facilement et qui permettent d’attaquer l’ennemi pour détourner son attention et rajouter un effet élémentaire à notre arme pour permettre de défoncer plus facilement tout le monde ! Les Einherjars peuvent aussi utiliser leurs talents pour se débarrasser de certains obstacles eeeet… C’est là que j’en reviens aux problèmes.
Car même si le level-design n’est pas mauvais, avec des niveaux aussi vastes que bourrés de micro-embranchements qui mènent à des coffres ou des quêtes annexes, il dispose de deux problèmes fondamentaux qui rendent leur exploration un peu redondante. Primo, ils sont LONGS ! Chaque niveau prend entre une demi-heure à 45 minutes pour être parcouru (d’après le timer de fin de niveau, parce que je pense qu’ils sont un peu plus longs en comptant les rares cutscenes), ce qui fait que si on en enchaîne plusieurs sur une journée (voire on se fait le jeu quasiment d’une traite comme je l’ai fait), on peut vite les sentir passer, parce que deuxio : ils sont simples. Je parlais du fait que les Einherjars pouvaient interagir avec les éléments du décor, mais c’est peut-être genre une ou deux fois par niveau et ce sont des obstacles qui sont placés là plus pour dire qu’ils existent plus que pour proposer un défi quelconque. La seule fois où le jeu est devenu un peu foufou, c’était dans le cinquième niveau… Qui s’avère être le dernier (j’y reviens). Là, pour accéder à une zone optionnelle, il fallait utiliser plusieurs fois son grappin d’affilée sous peine de tomber dans le vide. Si vous ne trouvez pas ça impressionnant, dites-vous que le reste du jeu, c’est grosso modo un enchaînement d’arènes de combat et parfois des moments où on se perd parce qu’il faut franchir une porte qui n’est pas indiquée comme étant ouvrable alors qu’on est passé devant plein de portes avant qui servaient que pour faire joli.
Enfin, le dernier gros problème que j’ai eu vient d’un truc que je croyais important, mais en fait pas vraiment : le mobilier regorge de gemmes pour renforcer nos capacités et nos armes. De fait, pendant les quatre premiers chapitres du jeu, dès que je voyais une caisse, une table ou un tonneau, fallait que je le casse si je voulais rendre mon personnage plus puissant. Sur les pile 10 heures qu’il m’a fallu pour finir le jeu, je n’exagère pas en disant que j’ai passé 45 minutes à une heure juste à péter des meubles plutôt que les rotules des ennemis. Le plus débile dans cette histoire et ce qui m’a motivé à être l’ennemi numéro un des ébénistes, c’est que les upgrades nécessitent pas mal de gemmes pour être activés… Mais arrivé au chapitre 5, on découvre que la plupart des upgrades passé un certain stade nécessitent des gemmes qui se trouvent uniquement dans des zones plus tard. De fait et parce que j’avais la flemme d’améliorer des armes dont je ne me servais pas, je me suis retrouvé avec un surplus de gemmes sur la fin du jeu. Et en plus, si vous faites bien vos devoirs, vous roulerez sur le jeu, même en difficulté Normale parce que le jeu est plutôt généreux en objets de soin et que vos stats d’attaque peuvent être ridiculement élevés assez rapidement.
Enfin, entre deux chapitres de l’histoire, on peut s’adonner à faire des quêtes annexes qui nous ramènent dans des niveaux déjà explorés et qui nous proposent grosso modo de taper sur plus de monstres que dans le scénario principal. Encore une fois, leur écriture n’est pas folle, donc on les fera plus pour gagner des gemmes en plus et les quelques attaques supplémentaires pour nos Einherjars ou bien des potions qui augmentent notre barre de vie, d’invocation ou de magie.
Et côté présentation, je sens que je vais être dans la minorité en disant que c’est pas aussi terrible que ce que les gens disent. Oui, on dirait un jeu Switch qui a été légèrement retouché pour avoir quelques effets de lumière, de particules et de reflets ici et là, mais vu le budget estimé du jeu, je ne m’attendais vraiment pas à plus et en plus ça tourne bien, donc ça passe. Par contre la caméra un poil trop près de notre héroïne peut rendre les combats un peu plus brouillons que prévu, surtout dans les espaces étroits.
Ceci étant dit, là où le jeu est intouchable est du côté de la bande-son ! Motoi Sakuraba est de retour et a réussi à renouer avec le style des premiers épisodes tout en apportant un peu de son expérience sur les Dark Souls pour nous proposer un truc vraiment sympa pour les oreilles.
Oh et fun fact : dans la version japonaise, Odin est doublé par Kenjiro Tsuda, qui a doublé Overhaul dans My Hero Academia, William Hende dans The DioField Chronicle ou Seto Kaiba dans YuGi-Oh, tandis que Fenrir est doublée par Ryusei Nakao, que l’on connaît surtout pour la voix de l’empereur Freezer de Dragon Ball Z ! Autant dire que c’est très rigolo de les entendre à chaque fois que tous deux apparaissent à l’écran !
Au final, je ne peux pas dire que Valkyrie Elysium est un mauvais jeu, ni un mauvais moment, mais… Comme pour The DioField Chronicle, ça manque un peu d’idée, d’ambition et de budget pour vraiment s’élever comme un jeu vraiment important. L’histoire manque clairement d’ambition et de complexité par rapport à ses prédécesseurs et même si le système de combat est vraiment fun, il est un peu desservi par ses niveaux un peu trop longs qui ne proposent rien de bien fou pour ne pas finir par devenir redondant sur la durée. Alors que le jeu dure à peine plus de 10h, voire même 9 si vous n’avez pas décidé de décimer l’équivalent de deux magasins Conforama et réduit à néant les rêves d’un village entier d’artisans du meuble.
Bref, vous comprendrez que c’est compliqué de le recommander, surtout à 60, voire 70 euros, surtout vu que le Valkyrie Profile originel sortira en Décembre pour beaucoup moins cher et que le volume de sorties de jeux actuel fait que c’est compliqué de faire des choix.