Bon, je vous épargne l’histoire de Sonic, tout le monde la connaît : c’est une série qui depuis le milieu des années 2000 a eu beaucoup de mal à regagner le cœur des joueurs, au point que malgré toutes ses réinventions, ça finissait soit au minimum correctement, soit c’était le pire de jeu de tous les temps pour les fans de la série.

Et c’est aussi pour ça que Sonic Frontiers a tout autant cristallisé les attentes que les craintes de tous les joueurs, surtout en voyant des bande-annonces qui faisaient plus office de repoussoir que de générateurs de hype. Oui, Sonic Frontiers est un de ces jeux qu’il est extrêmement compliqué, voire impossible à vendre aux gens s’ils ne peuvent pas l’essayer, et c’était la raison principale pour laquelle j’ai préféré attendre de mettre moi-même la main sur le jeu plutôt que de le juger en ne voyant que des vidéos ici et là.

J’y suis allé avec un esprit ouvert, tout en ne m’attendant à rien en particulier et encore moins avec un regard de fan hardcore de Sonic et, franchement… Bah j’ai bien aimé. Genre même beaucoup plus que prévu.

Ceci étant dit, ne vous inquiétez pas, il y a beaucoup de trucs que je peux tailler tant le jeu reste un peu cassé dans pas mal de sens et on reste loin d’un jeu qui intégrera des tops de fin d’année, mais je peux aussi dire que la critique qui suit ne sera pas un écartèlement sur la place publique comme j’imagine pas mal de gens s’apprêter à le faire.

Stars fall and rise again

Pour le coup, le premier contact et la première demi-heure du jeu est très étrange. Ça commence sur deux cutscenes assez courtes montrant grosso modo comment Sonic et ses amis ainsi que le Docteur Robotnik sont arrivés sur les îles Starfall, puis on est catapultés dans le premier niveau du cyber-espace (j’y reviens), puis une minute plus tard, on commence à explorer la première île sans savoir ce que font les trucs que l’on ramasse et l’impression de faire des trucs parce qu’il y a des trucs à faire, ce qui est aussi un gros point à aborder plus tard.

L’histoire en elle-même est vraiment chouette : grosso modo, tout le monde part sur les îles Starfall parce que les Émeraudes du Chaos ont décidé d’y aller, mais alors qu’ils approchent de ce mystérieux archipel, tout le monde se retrouve coincé dans le cyber-espace, une dimension parallèle qui semble être façonné par les souvenirs de ceux qui le visitent. Seul Sonic parvient à sortir de cette dimension et il lui reviendra donc de faire ce qu’il faut pour libérer tout le monde, même si cela implique de devoir détruire des colosses qui le mettront bien à mal.

Et le premier truc que l’on remarque en vivant l’histoire de Frontiers, c’est que le ton est très différent de ce qui a précédé. Tout est plus sérieux tout en étant relativement crédible et tout ça s’explique par le fait que le scénario a été écrit par Ian Flynn, l’auteur des dernières séries de comics Sonic. Et, franchement, ça fait un bien fou, surtout concernant l’écriture de Sonic lui-même, qui est beaucoup plus qu’un simple farceur amateur de bonnes vannes, comme trop souvent dans les derniers jeux de la série. Là, il fait toujours des vannes rigolotes, mais pas que et il sera même au cœur de certaines scènes bien touchantes. Et aussi le jeu fait une tonne de références aux épisodes passés pas juste pour du fan service gratuit, mais aussi pour montrer que tout le monde a vécu plein d’aventures dont ils ont tiré des enseignements, en plus de poser des nouvelles bases de développement de personnages qui auront peut-être des répercussions dans les futurs épisodes de la série !

Le seul truc qui m’a un peu agacé avec l’histoire en revanche vient du nouveau mystérieux personnage introduit dans Frontiers. Non pas son développement ou son histoire, au contraire, c’est même très bien écrit et amené, mais c’est plus son écriture qui m’a agacé parce qu’elle aurait pu très facilement résoudre toute l’histoire dès la première heure de jeu en disant les termes. Tout du long elle ne fait que dire, « ça sert à rien ce que tu fais Sonic, tu vas mourir. » sans. Jamais. Dire. Pourquoi. Ce ne sont que des pseudo-mystères cryptiques qui n’ont pas lieu d’être et qui limite ne feront qu’aggraver la situation parce qu’on ne connaît pas le but de notre aventure avant un bon moment.

Mais bon, malgré ça, j’ai vraiment accroché à l’intrigue et maintenant je veux savoir ce que ça signifiera pour l’avenir de la série ! Oh et j’espère que plus tard Ian Flynn pourra convaincre Sega d’utiliser les personnages des comics ! Je veux voir Tangle, Whisper et le Docteur Starline dans un jeu officiel, ça serait très intéressant !

Côté gameplay, Sonic Frontiers est découpé en deux phases : il y a des phases d’exploration et de combat sur les îles Starfall, et les phases de plateforme dans le cyber-espace.

Pour le coup, et je sens que ça va faire polémique, les phases de plateforme dans le cyber-espace ont été pour moi la partie la moins intéressante du jeu. Non seulement parce que ça recycle encore une fois Green Hill ou bien Chemical Plant, mais aussi parce que le gameplay est parfois un poil bancal et on a tôt fait de tomber dans le vide à cause d’un angle de caméra qui change subitement ou bien parce que le boost n’a pas fonctionné correctement (chose qui s’applique aussi durant certains défis en plein air, même si étonnamment moins souvent). Et aussi ces phases dans le cyber-espace sont là pour nous faire gagner jusqu’à 7 clés si l’on accomplit tous les objectifs, ce qui implique de les rejouer au minimum deux fois parce que le jeu veut que l’on aie un rang S et les chronos pour ce rang peuvent être soit assez souples, soit extrêmement tendus, sans juste milieu.

Et côté exploration des îles, grosso modo chaque île suit la même structure (sauf une) : le but consiste à réunir 6 Émeraudes du Chaos pour pouvoir taper sur le gros boss qui garde la 7ème. Généralement, trois d’entre elles nécessiteront les clés que l’on gagne dans le cyber-espace ou parfois sur le terrain, tandis que les trois autres sont planquées derrière des mini-jeux plus ou moins rigolos. Aussi, avant de pouvoir accéder au boss, il faudra résoudre une « énigme » spécifique et, je ne sais pas pourquoi, mais les développeurs ont jugé bon de faire de l’énigme finale de la première île la plus difficile de tout le jeu, tandis que celle de la seconde île peut être résolue sans même réfléchir du tout ! J’ai passé 10 minutes sur la première énigme avec la sensation de plus en plus forte que je devenais de plus en plus crétin passé un certain temps et vraiment je me demande comment certains enfants vont faire pour la passer.

En plus des clés et des Émeraudes, le jeu nous demande de trouver des souvenirs, qui sont grosso modo les noix Korogu de Breath of the Wild, mais si toutes étaient cantonnés aux défis de plateforme que l’on trouve littéralement tous les cinq mètres sur l’île. Ces souvenirs permettent de déclencher des scènes cinématiques qui feront avancer le scénario ou juste élaborer un peu plus sur certains personnages. Aussi, parmi les trucs à collectionner, on a les graines de puissance et de défense, qui sont des moyens de faire grimper nos points d’attaque et de défense et on peut ramasser des Kocos, qui sont grosso modo des Korogu de Breath of the Wild, mais qui ici nous permettent de faire grimper notre maximum d’anneaux ou notre vitesse de course.

Et enfin, l’île abrite pas mal de petits boss ainsi que des ennemis plus basiques pour mettre en avant le système de combat de Frontiers qui est… Franchement pas mauvais. Bon, il est un peu basique et on pourra s’en sortir la plupart du temps en bourrant le bouton carré, mais on pourra acquérir des compétences pour mieux s’en sortir à distance ou bien faire encore plus de dégâts ! Là où le jeu est plutôt cool et malin, c’est que même si certains boss se répètent, la plupart sont spécifiques à l’île sur laquelle on les trouvera et il y en a genre 2 ou 3 max identiques par île, donc ça évite que les confrontations ne deviennent trop répétitives.

Enfin, pour parler de l’exploration de l’île en elle-même, ça peut paraître paradoxal, voire même contre-nature pour un Sonic, mais je l’ai pas mal appréciée pour son côté étrangement méditatif (que certains qualifieront de fait d’ennuyant, mais passons). On peut se balader librement et fixer nos propres objectifs sans pression et ça peut détendre un peu. Ceci étant dit, même si on sent clairement l’influence de Breath of the Wild, Sonic Frontiers diffère un peu du fait que ses activités sont visibles tout le temps et aussi beaucoup plus concentrées sur une courte distance. Car ce qui faisait la force de Breath of the Wild, c’était que tout était suffisamment espacé pour susciter notre curiosité, sans pour autant nous balancer 15000 trucs à la tronche. Ici, dans Frontiers, non seulement on peut avoir deux, voire trois activités qui se chevauchent sur un petit espace, mais en plus une fois l’objectif accompli, le parcours qui permet de l’obtenir ne disparaît pas, faisant que l’on pourra parfois refaire le même défi sans comprendre qu’on l’a déjà fait ou bien on se demandera si un rail ou un ressort était destiné à une épreuve ou une autre.

Et aussi ça fait moche de voir des rails ou des plateformes vertes luisant dans le ciel, on est bien d’accord. Couplez ça aussi au fait que le clipping (donc quand un objet apparaît parce qu’il est chargé dans le jeu) est très présent, même sur PS5, et ça fait que parfois on verra des défis qu’à condition de s’en approcher, ce qui est pas mal contraire à l’esprit d’exploration qu’essaye de nous insuffler le jeu.

Enfin, vient le moment où je dois parler d’un ajout qui partait d’une bonne intention, mais qui m’a permis de briser le jeu en deux et vous ne devinerez JAMAIS qui est l’instigateur de mon massacre du rythme du jeu ! Yup, c’est Big le Chat et son excellent mini-jeu de pêche ! Concrètement, chaque île abrite un espace de pêche un peu planqué et ce mini-jeu se finance avec des pièces violettes qu’on trouve sur les îles. Le twist ? Les poissons pêchés rapportent énormément de points que l’on peut échanger contre des objets, comme des graines d’attaque ou de défense, des parchemins pour pouvoir débloquer la téléportation sur les îles ou bien les clés qui permettent de débloquer des Émeraudes, rendant donc les phases de plateforme dans le cyber-espace totalement inutiles ! Oh, et pour rajouter un peu plus de brisage de jeu, il arrivera certaines nuits qu’il y aie une pluie d’étoiles filantes, qui permettent de gagner en quelques minutes des centaines de pièces violettes, permettant donc de pêcher beaucoup plus de poissons et donc gagner des points pour avoir plus de lots ! Et en plus le mini-jeu de pêche est tellement fun qu’on enchaînera les parties trop facilement ! Autant vous dire qu’arrivé sur la troisième île, j’avais tellement de points que je pouvais juste acheter toutes les clés que je voulais et arrivé sur la dernière île, j’avais atteint le niveau 99 en attaque, faisant que le boss final m’a duré trois minutes à tout péter ! Bref : félicitations Big, t’as encore cassé un jeu !

Côté présentation, si l’on excepte le clipping dont j’ai déjà parlé, les décors sont assez variés pour donner envie de les explorer et voir ce qu’ils cachent, et sur PS5, une fois l’option 60fps débloquée dans les options, le jeu tourne super bien !

D’ailleurs, pour en revenir à la critique principale que j’ai vu littéralement partout où tout le monde dit que les décors du jeu sont vides… Oui, c’est vrai, et non, je ne vais pas nier ce fait. Cependant, et c’est aussi pour ça que le jeu était impossible à marketer correctement, une fois manette en main on ne le remarquera pas tant que ça, puisque l’on sera plus occupés à trouver notre prochaine babiole à récupérer plutôt qu’à faire du tourisme. C’était le même problème pour Pokémon Légendes Arceus et au final beaucoup de joueurs l’ont apprécié quand ils ont enfin pu mettre la main dessus.

Et comme d’hab, côté musiques, c’est très bon, même si infiniment plus discret que dans les précédents épisodes. On entendra très souvent les musiques d’exploration, qui tout naturellement sont très calmes et contemplatives, contribuant au côté méditatif que j’ai bien apprécié, tandis que les phases dans le cyber-espace auront leur lot de musiques bien plus dynamiques telles qu’on les connaît chez Sonic. Mais aussi et surtout : bons dieux les musiques des boss sont COOL ! Je sais d’avance que certaines d’entre elles vont tourner sur mes playlists de rock Sonic et j’ai déjà même chanté le thème du boss final à tue-tête durant ledit combat, donc c’est bon signe pour la pérénité de l’OST sur la durée !

Au final, Sonic Frontiers a tout de l’épisode qui peut se viander à tout moment et… Bah oui, ça lui arrive souvent, mais comme Sonic, il parvient toujours à se relever et offrir assez de bons moments pour qu’on en ressorte avec un bon petit sourire en coin. Est-ce que c’est un bon jeu ? À mes yeux, oui. Est-ce qu’il est excellent ? Oulà non, faut pas abuser ! Est-ce que ça va être pour tout le monde ? Non plus, et je pense même que beaucoup le détesteront, parce qu’il demande d’être dans un certain état d’esprit pour l’apprécier et faut quand même faire abstraction de pas mal de ses défauts.

De fait, je suis prêt à le recommander, mais seulement si vous savez dans quoi vous vous engagez, et limite de préférence, tentez de vous le faire prêter pour pouvoir l’essayer au moins une heure avant de l’acheter, parce que c’est vraiment qu’une fois manette en main que l’on sait s’il est fait pour nous ou non. C’est un bon jeu. Pas un excellent jeu, mais un bon jeu quoi qu’il arrive.