Faire un projet exclusivement en solo, c’est sacrifier un temps monstrueux au profit de l’accomplissement d’une vision purement personnelle et unique. D’un message qui ne risque pas d’être victime d’un compromis qui pourrait accidentellement lui faire perdre en saveur parce que quelqu’un d’autre a demandé un changement qui allait à l’encontre de la vision initiale. Et en jouant à Tunic, on sent clairement que ce jeu a été fait par une seule personne tant il n’y a aucun compromis et un sens de la précision qui le rend aussi machiavélique que génial. Andrew Shouldice a passé presque 7 ans à développer son projet et quand on voit le résultat final, on ne peut qu’être estomaqué devant le génie qui s’en dégage.
Je ne vais pas vous cacher que j’ai vraiment adoré Tunic et je vais même spoiler mon verdict, puisque non seulement Tunic est un Indispensable, mais il est déjà de loin le jeu que j’ai préféré cette année et il figurera plus que certainement dans le top 10 de mes jeux de l’année.
Et maintenant que vous connaissez mon ressenti sur ce jeu, je vais vous encourager à arrêter de lire cette critique et d’y jouer si vous avez le temps ou les moyens de le faire, car, comme avec 13 Sentinels Aegis Rim, le moins vous en savez sur ce jeu en le lançant, le plus grand sera la claque que vous vous mangerez ! Sachez juste que Tunic est d’une intelligence rare, est difficile sans être injuste en dehors de certains boss bien gratinés… Mais seulement si vous le voulez, car il est possible de devenir invincible via une option d’accessibilité qui transforme l’expérience d’un jeu d’aventure en un puzzle-game génialissime et sa culture du secret fait que chaque découverte que l’on fait est vécue comme une révélation ultra satisfaisante ! J’ai eu l’impression de jouer à un jeu de l’ère NES ou Super Nintendo où Internet n’existait pas dans ma vie et donc où chaque truc que je découvrais était de mon fait et non d’une campagne marketing qui veut absolument tout me montrer d’un truc au risque d’en gâcher le plaisir.
Maintenant, si vous voulez rester et en savoir plus sur le jeu, je vais élaborer un peu plus, sans non plus spoiler, mais voilà, si vous me faites confiance et que vous aimez les jeux où il faut réfléchir et explorer, vous pouvez vous en arrêter là et aller jouer au jeu ! Vous me remercierez de vous en être arrêté là.
Pour les autres, approfondissons un peu plus ♪
Un jeu vraiment tunique !
Bien évidemment, je ne vais pas parler de l’histoire, aussi bien parce que ça spoilerait que… Bah je l’ai pas non plus totalement comprise moi-même du fait que 80% du texte est écrit avec des glyphes créés pour le jeu et que même avec ça, il n’y a pas non plus des masses de texte. Est-ce qu’ils seraient traduisibles en prenant des notes ? Oh, très certainement, mais malgré la barrière de la langue, il y a aussi quelques mots en français disséminés ici et là pour ceux qui ont la flemme et, au grand pire, l’expérimentation et notre curiosité naturelle feront tout le boulot !
Car le truc absolument génial avec Tunic, c’est qu’il m’a constamment poussé à être curieux. À voir si je pouvais contourner tel ou tel truc pour dénicher un trésor planqué, ou mieux encore, un passage secret vers une toute nouvelle zone ! Tomber sur un nouvel objet à l’apparence étrange me poussait à essayer de comprendre comment il fonctionnait, quitte à ce que ça m’explose à la figure ou bien que ça fasse complètement autre chose.
Et aussi et surtout, le jeu a été conçu avec une précision absolument diabolique ! Le level-design est d’une intelligence folle qui ferait pâlir aussi bien les level-designers d’un Dark Souls que les développeurs de Captain Toad Treasure Tracker tant on a l’impression de se retrouver face à un hybride de ces deux séries ! Chaque recoin du monde de Tunic a été conçu comme une sorte de diorama que l’on va pouvoir explorer et l’angle de caméra fixe fait que l’on ne pourra pas trop facilement en griller tous les secrets sans être nous-mêmes curieux et aller là où la caméra refuse d’aller ! Mais le plus fou, c’est que non seulement le level-design est fou sur le moment, mais un même lieu pourra parfois servir deux ou trois fois pour des trucs que l’on ignorait ou bien parce qu’on n’avait pas encore le bon outil à la manière d’un Metroid, ou même plus drôle encore, il m’est arrivé plus de 4 ou 5 fois de traverser une zone assez complexe et difficile, uniquement pour découvrir en sortant du truc que j’aurais pu y accéder quelques heures plus tôt si j’avais juste poussé un peu plus ma curiosité. Sans trop spoiler, il est possible de trouver le bouclier dans les 3 premières minutes du jeu, mais je l’ai eu au bout de deux heures juste parce que je n’avais pas trouvé la sortie du lieu qui était invisible, mais bel et bien là ! Tunic est un jeu qui m’a fait me sentir très con tout comme il m’a fait sourire de nombreuses fois devant l’ingéniosité de son design, d’autant plus que certaines des options qui nous feront progresser bien plus tard sont dispo… D’entrée de jeu !
Car le truc génial avec le jeu, c’est que l’on récolte progressivement les pages de son manuel, nous montrant qu’en fait on avait déjà des capacités que l’on ignorait ou bien il va nous donner des indices sur où aller ou bien carrément la carte de certaines zones. Et c’est vraiment hyper fun de tomber sur une page du manuel, comprendre qu’on pouvait faire un truc, puis expérimenter pour voir si on peut pas l’utiliser ailleurs et soit débloquer un trésor utile, soit carrément un truc qui va nous aider dans notre quête ! Et sans entrer dans les détails, récolter toutes les pages du manuel permet de débloquer la vraie fin du jeu, que je rêverais de voir si j’avais le temps de le faire. Car oui, du coup j’ai fini le jeu, mais pas à 100% et ai eu… Quelque chose.
Aussi, un petit détail qui n’a l’air de rien, mais que j’ai adoré, c’est que certaines pages du manuel sont trafiquées au stylo-bille, comme si on était en train d’assembler le manuel d’un joueur qui a déjà fini le jeu avant nous et qui galérait sur certaines énigmes qu’il a tenté de résoudre. Non seulement ça permet d’avoir quelques indices supplémentaires, mais c’est aussi un détail ultra adorable qui me rappelle certains souvenirs quand je jouais aux Zelda Oracle of Ages et Seasons ou bien Golden Sun pour noter les mots de passe.
En dehors de l’exploration, il y a les combats, qui donnent concrètement l’impression de jouer à un Zelda rétro. On peut équiper des armes ou des gadgets comme différents types de bombes et pour la plupart des ennemis, il suffit juste de leur taper dessus assez de fois en faisant gaffe à ne pas se faire taper dessus. Ce n’est pas particulièrement complexe ou subtil, mais le truc intéressant, c’est le système d’endurance qui fait que si notre jauge s’épuise, on se mange le double de dégâts tant que la jauge ne s’est pas reremplie à 100%. Couplez ça au fait qu’attaquer empêche à la barre de se reremplir et vous avez un système qui fait qu’on ne peut pas être trop agressif ou bien où l’on spammerait les roulades. Aussi, 90% des combats sont une petite promenade de santé, et mourir n’est pas une grosse punition. Vous perdez juste 20 pièces que vous pouvez récupérer en retrouvant l’endroit où vous êtes mort à la façon d’un Souls-like… Mais bon, en vrai, 20 pièces, c’est rien donc il n’y a pas vraiment besoin de s’en préoccuper… Même si ce coût peut VITE grimper face aux boss si vous prenez pas la peine de les récupérer !
Il n’y a pas beaucoup de boss dans Tunic, mais bons dieux qu’ils sont brutaux ! Il ne sont pas insurmontables en soi puisque les patterns restent simples, à l’exception du boss final qui a une tonne d’attaques différentes et qui est trop rapide, mais tous font quand même de sacrés dégâts, au point que l’on écoule beaucoup trop vite son stock de potions. Heureusement, si vous trouvez le défi un peu trop relevé et que vous étiez là surtout pour les énigmes et l’exploration, comme dit plus tôt, il existe des options d’accessibilité qui vous permettent d’être totalement invincible et qui font des combats des simples formalités (et vu la difficulté absurde du boss de fin, je sais pertinemment que je n’y serais jamais arrivé de manière légitime et mon avis sur le jeu serait infiniment moins enthousiaste).
Et côté présentation, je ne vais rien dire autre que c’est hyper joli et que musicalement, c’est plutôt unique et inattendu, avec beaucoup de sonorités synthétiques là où je me serais attendu à un truc plus aventureux à la Zelda, mais ça passe super bien et ça n’est pas prise de tête du tout, complémentant bien l’exploration des différents niveaux.
En fait, si je devais lui trouver un défaut, c’est que même si je l’ai « fini » en 7 heures (sachant qu’il m’en faudrait quand même plus pour trouver les pages de manuel qui me manquent et donc avoir la vraie fin), je l’ai trouvé paradoxalement un chouïa trop long. J’imagine que c’est parce que, sans entrer dans les détails, il se relance pile quand je pensais qu’il avait atteint son sommet pour proposer un truc très intéressant, mais juste un peu trop tard et un peu moins puissant que la séquence qui l’a précédé à mon goût. C’est très loin d’être mauvais, et encore une fois, ce qu’il propose est très intéressant, mais parfois le mieux est de savoir quand s’arrêter pour rendre l’expérience d’autant plus mémorable et là je pense qu’il aurait pu se contenter de s’en arrêter là.
Comme cette critique que je ne vais pas relancer parce que j’ai déjà donné mon verdict en intro ! Tunic est un Indispensable ! Foncez si vous avez le temps !