Ça fait deux semaines (déjà) que la Nintendo Switch a été révélée, disséquée et analysée de toutes parts. Tout et son contraire a été dit : « Nintendo est foutu », « Nintendo fait du Nintendo », « Nintenquoi ? » et « Bah… Ça va, quoi. »

Cependant, s’il y a bien quelque chose que tout le monde s’est accordé à dire, moi-même inclus, c’est que le line-up de la console à son lancement est assez… Minimaliste. Alors certes, les choses se sont petit à petit éclaircies, avec notamment quatre « nouveaux » jeux annoncés pour le jour du lancement. I Am Setsuna est le jeu que Square Enix balance dans la mêlée, tandis que 2D Boy y va carrément comme un bourrin en sortant tous ses jeux directement dessus (l’excellentissime World of Goo, Little Inferno et Human Ressource Management). Couplez ça à Just Dance 2017 chez Ubisoft, Skylanders Imaginators chez Activision, Super Bomberman R de Konami, The Binding of Isaac Afterbirth + proposé par Nicallis (et bientôt suivi par CAVE STORY aaaaaaahhh !!!), Has-Been Heroes de Frozenbyte (les même qui ont fait la série Trine) et le duo 1, 2 Switch et The Legend of Zelda : Breath of the Wild, parce que bon, Nintendo propose quand même aussi des jeux au lancement.

Au final, on se retrouve avec 11 jeux dès le premier jour, dont au moins trois qui sont des valeurs plus que sûres (World of Goo avait fait partie de mes Jeux de l’Année il y a… Longtemps), ce qui est plus que correct. Alors certes, quand on se penche sur le détail, on n’a au final que trois exclusivités et un quatrième jeu qui le sera probablement quelques mois avant d’être porté partout ailleurs (Has-Been Heroes), mais en y repensant et en le comparant au line-up de lancement d’autres consoles, on peut se dire que c’est plus qu’acceptable.

Car si on joue le jeu des comparaisons, du côté de Nintendo, rares ont été les consoles disposant d’un line-up solide au lancement, mais pire ont été les mois qui ont suivi. Pour prendre les exemples les plus récents, la Nintendo DS nous proposait un Yoshi Touch n’ Go anecdotique, un WarioWare Touched amusant, le demi-remake Super Mario 64 DS et deux-trois amuse-gueules, mais il aura ensuite fallu attendre Septembre pour avoir Castlevania Dawn of Sorrow, puis presque l’année suivante avant que la console ne décolle vraiment avec le combo Nintendogs/Animal Crossing Wild World/Mario Kart DS. La Wii aussi accusait d’un line-up de lancement assez fort, mais vite épuisé. The Legend of Zelda Twilight Princess, Wii Sports, Red Steel et Rayman Contre les Lapins Crétins nous a occupé quelques semaines, mais pendant les mois qui ont suivi, c’était le désert. WarioWare Smooth Moves et… Boogie ? 2007 aura été l’année du grand décollage, avec Zack and Wiki : Le Trésor de Barbaros (meilleur jeu kid-friendly de Capcom ever !), Metroid Prime 3 : Corruption, Super Smash Bros Brawl et Super Mario Galaxy… Eeeet je viens de me rendre compte que tout ça est sorti il y a 10 ans et je vais aller me mettre en PLS dans un coin, je reviens…

Zack-et-wiki

La Wii U non plus n’a pas été fabuleuse et son line-up de lancement n’a su nous contenter bien longtemps. Nintendoland, Zombi U, des portages de jeux Third-Party un peu faits par dessus la jambe… C’était certes impressionnant, mais là encore, la traversée du désert qui a suivi a été plus ou moins fatale pour la console de Nintendo… Et c’est sans parler de la Nintendo 3DS, dont le line-up était tellement minimaliste et le prix tellement élevé qu’il s’est vu fortement réduit à peine quatre mois après la sortie et a forcé les équipes de Nintendo à redoubler d’efforts pour sortir au plus vite Super Mario 3D Land et Mario Kart 7. À partir de là, les choses se sont grandement améliorées, mais il avait quand même fallu attendre sept mois avant de vraiment pouvoir jouer à grand chose.

Et il ne faut pas croire, mais c’était pareil du côté de Microsoft et Sony. La PlayStation 2 est célèbre pour s’être énormément vendue à son lancement, puis pour être pendant bien des mois un lecteur DVD faisant tourner Fantavision et la PlayStation 3 a pendant deux longues années été considérées comme étant le futur déclin de Sony pour la simple et bonne raison que personne n’arrivait à créer des portages décents (Bayonetta, on pensera toujours à toi) à cause d’une architecture assez complexe. La PlayStation 4 possédait aussi un line-up relativement moyen, mais s’est quand même assez vite rattrapé et la PS Vita… Bref. Microsoft, lui, semble s’en être mieux tiré, même si son avance d’une année sur la concurrence avec la Xbox 360 faisait que les efforts pour fournir des gros jeux hors studios financés par Microsoft restaient timides.

Le détail qui me rassure un peu plus avec la Nintendo Switch, c’est que Nintendo a décidé de jouer la carte du « line-up épisodique », avec chaque trimestre une à plusieurs nouvelles exclusivités de poids. En Mars, on a The Legend of Zelda Breath of the Wild, 1,2 Switch et Snippeclips (qu’il faut faire absolument si on a un très bon pote). En Avril, Mario Kart 8 Deluxe. Mai, probablement Arms. Juin ou Juillet Splatoon 2, puis Fire Emblem Warriors en Septembre ou Octobre et très certainement Super Mario Odyssey en Novembre s’il n’est pas repoussé (chose qui ne devrait pas arriver, vu qu’il s’agit quand même d’un des piliers fondateurs du lancement de la console et le perdre avant Noël serait une très grave erreur). Et c’est bien évidemment sans compter sur Xenoblade Chronicles 2, qui devrait arriver cette année (même si personnellement, j’émets encore quelques doutes, étant donné la taille de ces jeux) et les plus petits jeux à sortir sur l’eShop (prions pour un Rolling Western 3) et les surprises qui seront révélées aux alentours de l’E3, même s’il m’est avis que le reste des grosses licences sera mis en attente pour 2018/2019, histoire quand même d’éviter à Nintendo d’épuiser toutes ses cartouches beaucoup trop vite.

Switch Lineup

Bien évidemment, je ne me concentre que sur Nintendo, ici, puisque du côté des développeurs indé et des éditeurs tiers, ça reste largement honnête, avec notamment Wonder Boy : The Monster Trap, Yooka-Laylee, Shovel Knight, Minecraft, Stardew Valley, Disgaea 5 Complete, Skyrim et même Waku Waku 7. Encore une fois pas mal de portages, mais des portages qui ont l’avantage d’être portables, ce qui, pour des gens comme moi, reste un très bon argument de vente. Et c’est sans compter sur les deux megatons que seront le nouveau No More Heroes et Shin Megami Tensei (et Dragon Quest XI, mêem si celui-là sortira très probablement en 2018 chez nous).

Là où je trouve intelligente la décision de Nintendo d’espacer autant ses jeux tient en un mot : Zelda.

Breath of the Wild est un jeu absolument massif qui occupera la plupart des joueurs une bonne semaine facile et un bon mois pour le reste du monde. Et forcément, qui dit attention portée sur uniquement un jeu dit aucune attention portée sur le reste. Mario Kart 8 Deluxe aurait certes eu son public s’il était sorti au lancement, mais aurait été écrasé par son compère plus aventureux et chronophage pour la simple et bonne raison qu’il s’agit d’un Zelda inédit et donc pour beaucoup de fans de Nintendo, il restera une priorité absolue. Sortir Arms à ce moment-là aurait aussi été un grave erreur de débutant, car même si de ce que j’ai pu en jouer, il est fun, il ne hurle clairement pas Day One pour beaucoup de gens et aurait très certainement été envoyé à la mort directement. Pour le coup, Snipperclips sortira à priori quelques semaines après Zelda et je sens qu’il risque d’en faire les frais. Bon, aussi parce que c’est un « plus petit jeu » et donc que la communication autour du jeu sera bien moins importante, mais je sens que celui-là risque malheureusement de tomber bien assez vite dans l’oubli.

On ne va pas se mentir : pour un fan de Nintendo, n’importe quel jeu portant le nom de la boîte devient une sorte d’achat compulsif. Et donc en espaçant les sorties, le fan non seulement aura le temps de tout faire, mais aussi potentiellement l’argent pour tout prendre. De plus, et c’est aussi là le plus important : ça évite de donner une impression de vide.

Avec les consoles citées ci-dessus, il se passait toujours quatre à neuf mois d’attente entre leur lancement et le second titre le plus intéressant. Là, cet espace n’est que de deux mois maximum. Une personne qui aura la Switch au lancement ne sera pas nécessairement plus désavantagée que celle qui aura eu le bon sens d’attendre au moins l’été, car celui qui prendra la console au départ aura la gratification instantanée d’un Zelda et d’un Snipperclips (j’insiste) qui l’occuperont jusqu’à la prochaine grande exclusivité (et pourra aussi profiter de classiques à emporter partout si l’on prend en compte les jeux des éditeurs tiers en plus d’un Binding of Isaac qui lui bouffera des dizaines d’heures d’emblée), tandis que celui qui aura attendu aura déjà à disposition un choix assez conséquent de titres de qualité qui l’occuperont pas mal jusqu’au moment où d’autres gros jeux pointeront le bout de leur nez.

Cette stratégie s’était avérée particulièrement payante en 2015 et 2016 avec la Nintendo 3DS et si Nintendo parvient à maintenir un flot de titres exclusifs et de qualité avec des gros noms aussi bien cette année qu’en 2018, voire 2019 pour sa Switch, il se peut qu’elle parvienne à s’imposer sur le marché… Ou au moins auprès de ses fans, ce qui est déjà pas mal.

Benjamin « Red » Beziat