Cela fait quelques mois déjà que j’avais envie d’écrire un article à destination de ceux d’entre vous qui aimeraient bien se lancer dans le métier de « journaliste jeux vidéo ». Pour le coup, il vous faudra encore attendre un peu, puisque je dois encore réfléchir à la manière de m’y prendre et bien sélectionner les conseils que je pourrai vous prodiguer, mais l’article du jour peut déjà servir de première leçon.
Pour vous (re)donner du contexte, j’écris des articles liés au jeux vidéo et la pop culture en général sur Internet depuis 2011. Six ans déjà que certains d’entre vous ont pu lire mes inepties et mes délires… Pour le coup, je n’en reviens pas moi-même que ça aie déjà duré aussi longtemps et que j’y aie déjà consacré un quart de ma vie. J’ai commencé humblement sur des sites comme PressStartButton.fr, NintenDomaine.com et Fréquence Geek, avant de passer à la vitesse supérieure sur le Fnac Gaming Network (PlayFrance.fr et WiiDSFrance.fr) et Radio Campus et temporairement tout plaquer avant de revenir à la charge sur ce site quand Kayane est venue vers moi pour me proposer d’y écrire des articles.
(Ce qu’elle ne savait pas, c’est que j’y écrirais beaucoup d’articles impliquant des chats mignons… Parfois je me demande si elle le regrette ou non.)
Et, si vous suivez l’actualité de la presse vidéoludique, il est possible que vous ayez récemment entendu parler de l’affaire Brash Games. Jim Sterling en parle bien mieux que moi dans un de ses derniers Jimquisition. Mais pour les non-anglophones, je vais résumer l’affaire sous l’angle qui m’intéresse tout particulièrement aujourd’hui : Brash Games employait pas mal de rédacteurs bénévolement. Cela n’est pas nécessairement un mal en soi si les personnes y travaillant n’y vont pas parce qu’ils sont attirés par l’attrait du « chèque en passion et en reconnaissance ». Là où c’était un problème, c’était que le patron du site mettait constamment des bâtons dans les roues de ses collaborateurs, principalement en modifiant des critiques qu’il n’appréciait pas (en changeant la note finale ou bien en demandant de recommencer, chose qui m’est arrivée une fois quand je travaillais au Fnac Gaming Network) et aussi et surtout en effaçant les traces de l’existence de ses rédacteurs dès l’instant où ils quittaient le site. (Il y a aussi des histoires assez pathétiques où le fondateur du site s’est carrément mis à insulter ses anciens collaborateurs et tenter de leur balancer des attaques en masse à la tronche par le biais de « trolls » un peu trop enclins à enfoncer les gens dès qu’ils sont un minimum handicapés… Une très sale affaire qui continue encore à l’heure actuelle de grossir, donc je ne vais pas m’étendre dessus plus longtemps).
Ainsi, le rédacteur qui aurait écrit énormément de critiques et articles verrait du jour au lendemain toutes les preuves de son passages sur le site balayées d’un revers de la main, son nom étant remplacé par le très cryptique « La Rédaction ». Le premier effet néfaste de ce genre de démarche est le coup de poing dans le ventre que peut sentir la personne qui a écrit les articles. « Tout ça pour ça. », se dira-t-il. Et le second, bien plus pervers, sera quand il passera un entretien d’embauche quelques jours/semaines/mois plus tard : le rédacteur pourra dire avoir travaillé sur ce site, mais où sont les preuves ? Nulle part. Peut-être que c’est vrai, mais l’employeur ne peut pas vérifier et peut imaginer que la personne devant lui cherche à s’inventer une carrière sur le dos de cet énigmatique « La Rédaction ».
Vision d’artiste d’un employeur qui regarde votre CV en se demandant si tout ce qui y est écrit est vrai ou non.
La raison pour laquelle j’écris cet article est bien évidemment parce que ça m’est arrivé. La veille de l’écriture de cet article, on m’a demandé si ça valait la peine de prendre Disgaea 5 Complete sur Switch. Naturellement, mon premier réflexe a été de dire « Bah oui. D’ailleurs, je l’avais testé à l’époque sur PS4 pour PlayFrance ». J’ouvre mon navigateur pour trouver le lien vers ma critique, clique sur le lien vers PlayFrance… Rien. Le site ne veut pas s’afficher. Curieux, je décide alors d’aller directement sur le site, sans aller dans le détail, on me redirige juste vers la section gaming du site de la Fnac. Je découvre que PlayFrance s’est éteint, emportant avec lui toute trace de mon passage. Idem pour WiiDSFrance, lui aussi enterré. Toutes mes news. Toutes mes critiques… Parties en fumée. Alors certes, j’ai encore quelques backups Word de certaines de mes critiques, mais rien ne prouve qu’elles étaient destinées à ces sites. J’ai aussi en archive la plupart des mails que j’ai envoyé et mes maigres fiches de paye, mais l’employeur ne verra jamais ça, sauf s’il les demande expressément.
J’avais également connu cette sensation le jour de la mort de PressStartButton.fr, puisque là aussi, il n’y a plus de preuves de mon passage sur le site en dehors d’une vidéo faite sur Dailymotion il y a cinq ans (et que je n’ai franchement pas envie de revoir, parce que je sens que j’en aurais un poil honte). NintenDomaine, pendant un petit moment, avait connu un sort similaire lors d’une migration de serveur, mais la plupart des critiques ont pu être remises en ligne. Mes news, elles, ont disparu aussi.
Au final, que reste-t-il comme traces de ma carrière de rédacteur sur le Net, en dehors de pas mal de tweets et de posts Facebook où je me vantais de l’écriture desdits articles ? Plus grand chose. Comment puis-je justifier auprès de potentiels futurs employeurs ce que j’ai pu faire ces six dernières années ? Je n’en ai pas non plus la réponse.
L’une des seules preuves concrètes qu’il me reste, c’est ce site. Je peux écrire cet article aujourd’hui car j’ai pu prouver que je ne me débrouillais pas trop mal dans l’écriture d’articles et je pourrais vous offrir beaucoup plus de preuves de mon existence si j’avais le temps d’écrire plus régulièrement… Mais pour combien de temps ?
Je ne souhaite pas m’attirer le malheur en disant ceci, mais on n’est jamais à l’abri d’une panne de serveur qui efface purement et simplement tout le contenu de ce site. Et pour ce qui est de l’effacement volontaire de tous ces articles, rassurez-vous, ça n’arrivera jamais. Kayane m’a fait confiance pour que j’écrive des articles ici en me donnant carte blanche sur les sujets à aborder et jamais elle ne causerait de tort aux personnes en qui elle fait confiance. Suffit de voir les écrits de Namus, qui sont toujours sur le site et qui sont encore à ce jour signés de son pseudo. Je sais que la seule raison pour laquelle tout ce travail disparaîtrait, ce serait si jamais le serveur plantait et perdait toutes ses données.
Enfin bref, tout ça pour vous offrir deux conseils que je juge essentiels : primo, faites des sauvegardes régulières de votre travail. Qu’il s’agisse de votre blog ou d’un site appartenant à quelqu’un d’autre, sauvegardez. Sauvegardez, sauvegardez sauvegardez. Vous n’êtes jamais à l’abri d’un effacement volontaire ou non de votre travail et avoir des preuves de votre travail ne servira peut-être pas à grand chose sur le long-terme, mais cela peut toujours s’avérer utile.
Et le deuxième conseil, qui dans un sens est lié au premier : ne travaillez pas sur un site si jamais la chose que vous y cherchez principalement ou que l’on vous a le plus mis en avant est la « Reconnaissance ». Si l’on vous propose de l’argent pour votre travail ou, au pire, des jeux gratuits, ça peut aller. Si vous le faites pour le fun et pour vous permettre de lâcher du lest quant au sujet qui vous pèsent/parler de choses que vous aimez et souhaitez faire découvrir des choses que des gens ne connaîtraient peut-être pas, c’est encore mieux. Mais n’y allez surtout pas pour la reconnaissance ou un tremplin pour booster votre carrière sans déjà avoir de retours concrets. Il suffit que le serveur lâche ou que votre rédac’ chef soit une ordure pour que tout ce que vous ayez tenté de bâtir se retrouve réduit à néant et que vos « années d’expérience » sur votre CV ne sonnent que comme d’éventuels mensonges créés de toutes pièces pour passer sous couvert une éventuelle inactivité auprès d’employeurs peu confiants.
… Quand on y pense, cet argumentaire peut aussi valoir sur le jeu en dématérialisé, tiens… Hum.
Soyez concrets !
Benjamin « Red » Beziat