Légendes Pokémon Arceus tient du miracle : développé en un peu moins de 3 ans et demi par une team d’à peine 170 développeurs en pleine pandémie et très certainement sous la pression de The Pokémon Company, il s’agit d’une expérience totalement inédite au sein de Pokémon qui réinvente pas mal les codes de la série, même s’il reprend ici et là des éléments aussi bien de la série principale que de Pokémon Snap et Pokémon Go.

À titre de comparaison, Breath of the Wild, c’est 5 ans de développement, et Breath of the Wild 2, c’est très certainement 4 à 5 ans alors que la base est déjà constituée et la plupart des assets ont été créés pour le premier épisode ! Pour leurs open world, Ubisoft, c’est souvent 3 à 4 ans de développement avec des équipes faisant le double, voire parfois le triple des effectifs de Game Freak.

Est-ce que j’excuse le jeu ? Probablement un peu. Est-ce que je trouve le jeu « beau » ? Non, pas non plus, faut pas déconner. Mais ça m’agace de voir des gens avec des exigences lunaires attirer l’attention alors qu’ils n’y connaissent rien aux réalités du développement et qui croient littéralement que le jeu vidéo est créé par des magiciens. Rien que la semaine de la sortie de Pokémon, on a encore vu un gars faire le buzz parce qu’il trouvait scandaleux que Horizon Forbidden West recyclait une animation de l’épisode précédent alors que 1, c’est une pratique courante dans l’industrie et 2, c’est le signe que le temps des développeurs et le budget du studio est allé dans l’élaboration d’autre chose qui rendra très certainement le jeu plus fun !

Le contexte est un élément clé dans une conversation et tout l’argent du monde ne pourra pas accomplir autant de miracles que le temps qui est donné à un projet. Or là… Bah ils ont eu moins de 3 ans. En pleine pandémie. Je n’imagine même pas le crunch ultra intense qu’ils ont du traverser, uniquement pour s’en prendre plein la tronche de la part de joueurs qui en filigrane leur ont dit qu’ils n’ont pas assez travaillé…

Donc oui, si vous cherchez un coupable, ne cherchez pas du côté des développeurs, mais plutôt du management qui leur a filé un objectif impossible à accomplir et souhaitez plutôt aux devs d’avoir plus de temps plutôt que de demander constamment la suite du programme sans penser que ce genre d’exigences leur met une pression supplémentaire de devoir faire plus et surtout plus vite.

Et même si on est toujours en droit d’exiger mieux, ce qui reste sain tant qu’on n’est pas juste cons et dédaigneux, il ne faut pas oublier que si on veut mieux, il faut aussi accepter qu’il faut attendre plus longtemps.

… Bref, tout ça pour dire que oui, Légendes Pokémon Arceus est moche, mais… Bah en vrai, ça reste un jeu vraiment fun et la promesse d’un avenir très intéressant pour la série si jamais The Pokémon Company venait à laisser tomber le modèle traditionnel pour la future génération !

Turbo Mode Activated !

Je ne vais pas trop parler de l’histoire, car même si comme d’hab pour la série, ça casse pas trois pattes à un Couaneton, elle réserve quelques surprises bienvenues ainsi qu’un mystère cool… Même si certains twists peuvent être grillés la seconde de l’introduction de certains éléments.

Ceci étant dit, même si l’histoire reste sympatoche, ce sont vraiment les personnages qui relèvent l’ensemble. Ils sont tous très agréables à suivre et c’est toujours plaisant de les voir gagner petit à petit en profondeur au fil de l’aventure, même si ça reste toujours un peu dommage de ne pas les voir s’impliquer activement dans l’histoire et qu’ils finissent juste par être des machines à contextualisation et des donneurs de missions pour le simple ado de 15 ans qu’on incarne…

Et pour le coup, les deux missions principales qui nous sont données sont vraiment cool. La première consistant à résoudre le mystère derrière les gardiens de chaque zone qui sont liés à un certain truc dont je préfère ne pas parler, et la seconde, plus classique, consistant à voir tous les Pokémon de la région de Hisui pour remplir le Pokédex et qui est la clé pour débloquer la « vraie fin » du jeu… Ce qui m’amène vite fait au fait que cet objectif risque d’en décourager pas mal. Imaginez la quête de fin de The Legend of Zelda Wind Waker sur GameCube avec la collecte des morceaux de Triforce, mais remplacez les 8 fragments de Triforce par plus de 240 Pokémon dont l’apparition peut parfois dépendre de facteurs comme l’heure de la journée ou la météo et vous pouvez entendre l’immense soupir que j’ai poussé en reposant ma console par dépit.

À ce stade de la critique, on pourrait penser que j’ai pas trop kiffé le jeu, mais, clairement, c’est tout le contraire et je ne fais que souligner les petits points qui m’ont frustré et qui mériteraient d’être améliorés dans l’inévitable suite sur Switch 2 (ou la future console de Nintendo) avant de parler des trucs vraiment positifs qui m’ont fait vibrer !

Déjà, ça peut avoir l’air de rien, mais j’aime bien le fait que Rusti-Cité, la ville centrale de la région, évolue en même temps que nous. La voir grandir un peu et proposer de plus en plus d’activités et de trucs à débloquer fait que l’on a toujours un truc à faire en rentrant au bercail. Et même si l’option de customiser son Dresseur existe depuis quelques épisodes maintenant, je ne m’en lasserai jamais et c’était très drôle de lui donner le style le plus ridiculement cool possible !

Côté trucs à faire, malgré le court temps de développement, l’équipe a réussi à caser pas mal de contenu pour nous occuper un bon moment, puisqu’en plus des Pokémon à capturer, il y a une quasi-centaine de quêtes annexes à accomplir, dont certaines qui étofferont l’histoire de certains PNJ ! Bon, la plupart de ces quêtes sont des quêtes Fedex où on doit trouver des ingrédients ou matériaux, mais d’autres impliquent de trouver des Pokémon spécifiques, voire même d’affronter des ennemis spéciaux ! Ajoutez à ça pas mal de petits trucs à ramasser pour vous pousser à explorer un peu plus en profondeur les différentes zones du jeu et vous avez un jeu qui peut facilement vous occuper une trentaine d’heures. Personnellement, j’ai atteint les crédits de fin en 18h30, puis suis arrivé aux portes de la « vraie fin » au bout de 22h30 avant d’abandonner en voyant que j’avais à peine rempli la moitié du Pokédex et que je n’avais pas au moins 5h de plus à passer sur ce jeu alors qu’il y en d’autres à critiquer qui m’attendent en plus du boulot…

Et avec tout ça, je n’ai même pas encore parlé de la boucle de gameplay principale, qui reprend la base formée par Pokémon Épée et Bouclier et rajoute une pincée de Pokémon Go et un tout petit peu de Pokémon Snap tout en y mettant une forme de mobilité digne des open worlds les plus récents !

Comme vous le savez très certainement, dans Légendes Pokémon Arceus, les combats au tour par tour ne sont plus vraiment le cœur du gameplay, car il est tout à fait possible de capturer des Pokémon directement dans la nature en leur lançant une Pokéball dans la tronche… Parfois très littéralement dans le cas des Pokémon les plus inoffensifs, puisqu’on peut courir vers eux et la leur balancer dessus alors qu’on se tient à 10cm d’eux. De plus, dans cet épisode, le monde est bien plus hostile, au point que même notre Dresseur peut se prendre des coups, et même carrément s’évanouir s’il se fait trop taper dessus, avec pour conséquence immédiate de perdre pas mal d’objets très utiles de sa sacoche ! Pour le coup, je suis « mort » en tombant d’une montagne de plusieurs dizaines de mètres de haut pour tester les dégâts de chute et mon expérimentation m’aura coûté un talisman bien utile et pas mal d’objets utiles pour crafter. Woops.

D’ailleurs, le crafting est une nouvelle mécanique de jeu vraiment utile, puisque l’on peut désormais faire nos propres Pokéballs avec des matériaux trouvés dans le décor, plutôt que d’avoir à les acheter en masse et dépenser un argent qui tombe bien plus difficilement que dans les épisodes précédents ! On peut aussi créer différents appâts et autres potions, même si je dois vous avouer que je n’ai jamais eu à utiliser un appât de tout le jeu tant le taux de capture des Pokémon reste assez généreux, surtout si on lance une Pokéball alors qu’ils ont le dos tourné.

Enfin, le système de montures rend l’exploration des zones encore plus rapide et agréable, surtout si on utilise la technique de parcourir la zone avec sa monture, en descendre quand on trouve un coin pour recueillir des matériaux, demander à un de nos Pokémon de faire le boulot et remonter sur sa monture avant même que l’animation de récolte ne soit terminée ! Le processus prend moins de 3 secondes, faisant qu’on l’on n’a pas du tout l’impression de perdre son temps et ça rend toute la progression infiniment plus fluide !

Et un autre truc qui rend le jeu plus fluide, bien qu’un poil loupé vient des Barons, ces Pokémon bien plus gros que la moyenne et aux yeux rouges. Au début, ils sont un peu intimidants. Ils ont 20 à 30 niveaux de plus que nous, peuvent faire mal et nous attaquent dès qu’ils nous voient… Mais le twist, c’est qu’il ne sont intimidants que durant des deux premières heures de jeu, car le ratio de dégâts de tout le monde est ultra élevé. Ainsi, il n’est pas du tout surprenant de voir une équipe de Pokémon niveau 15 réussir à enlever un tiers de vie d’un Baron en une seule attaque si elle est du bon type ! Ajoutez à ça le fait que les Barons filent énormément de points d’expérience à l’équipe une fois vaincus et qu’en plus ils réapparaissent quand vous revenez dans la zone et une fois le premier Baron tombé, toute trace de peur est remplacée par l’idée qu’on pourra tous les défoncer pour devenir très puissant très rapidement, au point que ma team était niveau 30 avant même le premier gros boss du jeu.

Ceci étant dit, ce sentiment de déséquilibre est temporaire et on sent que les développeurs savaient qu’on ferait tous comme ça, puisque la difficulté augmente de manière assez significative à partir de la troisième zone et nous rattrape rapidement, au point que sur la fin, j’avais finalement que très peu d’avance par rapport aux autres adversaires.

La dernière grosse nouveauté vient des Rois, a.k.a. Les gros boss de fin de zone ! Il y en a quelques uns et ils sont tous vraiment fun, puisque non seulement ils testent les Pokémon de notre équipe, mais aussi et surtout les réflexes de notre Dresseur, puisque l’on devra éviter les assauts incessants de notre adversaire et lui balancer un max de boules apaisantes dans la tronche ! Les combats sont intenses et plus on avance dans le jeu, plus ils deviennent fous ! C’est limite au point que je regrette qu’il n’y en aie pas beaucoup, parce que c’est vraiment un des points culminants du jeu !

Enfin, côté présentation, j’ai déjà dit que le jeu était un peu moche, surtout à cause de la distance d’affichage dynamique qui fait que les décors se réajustent souvent quand on se rapproche de certains lieux. Pour le coup, j’imagine que les développeurs ont utilisé cette technique de simplification dynamique de la géométrie des éléments de décor pour éviter à la Switch d’exploser en plein vol, mais je ne vais pas rentrer dans les détails pour ne pas vous ennuyer. Juste imaginez que la stabilité d’un jeu dépend de beaucoup de facteurs et qu’en fonction de la puissance de la console, il faut faire des sacrifices et donc soit vous faites un jeu détaillé, mais qui tourne comme une patate à deux à l’heure, ou bien qui a l’air d’une patate, mais qui tourne de manière fluide. Il est compliqué de maintenir un bon équilibre sans passer par une phase d’optimisation intensive qui demande beaucoup de temps, mais bon, comme je l’ai dit plus tôt, le facteur temps est ce qui a pas mal manqué au développement de ce jeu, donc j’imagine qu’ils sont allés avec la solution de la géométrie dynamique pour atteindre une espèce de compromis acceptable. À noter aussi que le jeu reste aussi bien lisible, ce qui est un plus plus qu’appréciable et qui fait que l’on ne perd pas de temps à repérer notre prochaine cible ou bien à voir qui va potentiellement nous envoyer un projectile dans la tronche.

Et côté musiques, c’est… Ça passe. Ils ont voulu opter pour une approche un peu minimaliste à la Breath of the Wild où les musiques ne sont pas diffusées tout le temps, mais ça fait aussi que les seules mélodies que j’ai retenu, c’est celles qui reprennent la bande-son de Diamant et Perle… Et encore, même 3h après avoir posé la console pour écrire ce test, le seul morceau qui m’est resté en tête est celui du boss final avant la vraie fin pour la seule et unique raison qu’il était tellement brutal que je m’y suis repris à quatre fois pour le battre…

Au final, Légendes Pokémon Arceus n’est certainement pas un jeu parfait, mais j’ai passé un très bon moment dessus, au point même que ça m’a permis de faire passer la pilule des remakes de Diamant et Perle qui m’avaient ennuyés plus que de raison ! Game Freak a pris pas mal de risques sur ce nouveau jeu et ça a grave payé et, clairement, si l’avenir de la série repose sur cette nouvelle base, je vais pas dire non, surtout s’ils doublent le nombre de boss pour créer un jeu encore plus épique !

Si vous êtes fan de Pokémon, vous allez très certainement kiffer ce jeu, tout comme si vous vouliez un jeu de la série un peu plus orienté action ! Ayez juste un peu l’esprit ouvert concernant les graphismes et vous verrez, on fait abstraction très rapidement pour se focaliser sur le gameplay !

Si le prochain épisode vient à s’améliorer sur la partie graphique et à offrir un scénario avec des personnages secondaires plus directement impliqués, on tiendra là un indispensable, mais en l’état Légendes Pokémon Arceus est très, très fortement recommandé !

Oh et faites le prochain épisode à Unys ou Alola si c’est pas carrément dans une région inédite ! Ça serait cool !