Le cycle de la hype fonctionne de manière assez étrange. Tout le monde s’est rué sur le dernier jeu Spider-Man là où les précédents n’ont que rarement fait autant de bruit alors que, niveau qualité, ils étaient largement équivalents. Peut-être est-ce parce que Activision et Beenox ont cédé la place à Sony, Marvel et Insomniac ou bien peut-être parce que ce nouvel épisode rejoue la carte de la simplicité en mettant en scène des personnages que tout le monde connaît, n’allant pas chercher dans le deep lore des comics pour faire plaisir aux simples fans… Qui sait.
Dans tous les cas, Spider-Man revient dans le monde du jeu vidéo et ça, c’est bien une raison de se réjouir, car même s’il est loin d’être parfait, il n’en reste pas moins hyper fun !
C’est mon Fisk ma bataille
Marvel’s Spider-Man est un de ces cas où les scénaristes font confiance à leur public et se doutent que tout le monde connaît au moins la base de l’histoire de Peter Parker. Ainsi, pas d’origins story qui prendrait des plombes ou bien des tonnes de bases posées, même si elle sait aussi où poser des bases pour permettre à l’histoire de ne pas perdre le nouveau venu. Le jeu se situe au moins huit ans après que Peter est devenu Spider-Man, il a vécu avec et s’est séparé de Marie-Jane Watson depuis quelques temps, a déjà affronté bon nombre de super-méchants qu’il a envoyé en prison et là, il s’apprête enfin à mettre le grappin… Enfin, la toile sur Wilson Fisk, plus connu sous le nom du Caïd (ou Kingpin, parce que pour une raison qui m’échappe ils ont décidé dans la version française de garder les noms anglais, quitte à ce que ça fasse très bizarre dans certains cas). Et après une introduction épique, Wilson se fait coffrer, menaçant au passage que le chaos se répandra dans toute New York car c’était lui qui maintenait une sorte de paix dans le monde du crime organisé. Cette prophétie s’avère plus que vraie, car une nouvelle faction étrange émerge et sème vite le trouble…
Je ne vais pas aller plus loin pour éviter les spoils, mais l’histoire est vraiment très bonne et, même si plus ou moins 80% de l’intrigue a été spoilée par le service comm’ de Sony et que le reste est très facile à deviner si on connaît ne serait-ce qu’un minimum le lore de base de l’univers de Spider-Man, elle n’en reste pas moins ultra prenante et passionnante grâce à une mise en scène millimétrée et des moments de « réel » que l’on devine influencé par le travail de Naughty Dog. Les personnages principaux sont vraiment très bien écrits et même s’il y a quelques sous-intrigues, elles restent toutes liées à l’histoire principale, faisant que l’on a jamais l’impression que c’est superflu. Et j’imagine que c’est aussi très personnel, mais le fait que Peter et Marie-Jane soient dans la même tranche d’âge que moi et se posent des questions que l’on se pose tous à cet âge font que j’étais encore plus touché par certains développements.
Le seul micro-bémol, et encore, ça reste du chipotage, c’est que c’est trop court, l’ayant fini en littéralement deux jours sans forcer. On veut en voir plus et je ne peux désormais qu’attendre avec impatience l’inévitable suite. Après, même si c’est « court », le jeu n’en reste pas moins intense avec un rythme maîtrisé et une histoire qui ne se perd pas en superflu. Mais c’est aussi pour ça qu’il avait l’air court : j’étais totalement accroché grâce à sa mise en scène et sa façon de faire les choses… Bref, l’histoire est la raison principale pour laquelle j’ai adoré ce jeu… Même s’il y a aussi une autre raison qui m’a bien fait aimer le jeu pendant les premières heures.
Y’a pas de Lézard. Juste des araignées.
On va faire simple : Marvel’s Spider-Man, pendant les premières heures, m’a vraiment donné l’impression d’être Spider-Man. Car même si d’un point de vue structure on n’a rien de révolutionnaire – un open-world tout ce qu’il y a de classique avec divers objectifs allant de la capture de bases ennemies à la recherche de petits bidules divers dans les décors – la manière, la grâce et la quasi-fluidité avec laquelle on se déplace couplée aux crimes aléatoires à déjouer au fil des balades font que l’on vit le quotidien de Peter Parker. On se balade tranquillement vers notre objectif d’histoire suivant avant de s’arrêter parce qu’on voit une voiture folle débouler dans les rues, nous donnant envie de s’occuper de ça en priorité.
Pour le coup, j’étais totalement à fond dans le délire au début, puis ai quelque peu délaissé cette attitude au moment où le scénario devenait vraiment intéressant et « pressant » dans ses enjeux.
Pour ce qui est de la quasi-fluidité, je dois prévenir que se déplacer dans la ville se fait très naturellement, même si ça demandera pas mal de temps avant que l’on ne maîtrise totalement le balancement de Spidey. Vous vous mangerez pas mal de murs et aurez parfois un peu de mal à surmonter certains obstacles car certaines combinaisons de boutons sont moins instinctives que d’autres. Après, ces problèmes n’arrivent que 5% du temps. Le reste, vous vous sentirez comme Spider-Man, ce qui est jouissif.
Ce qui l’est un peu moins, en revanche… Ce sont les combats. Très répétitifs, ils consistent plus ou moins à taper, esquiver et ensuite taper encore plus jusqu’à ce que tout le monde soit au tapis… Ou mort, parce que Spidey balance beaucoup de gens du sommet des bâtiments sans nécessairement prendre le temps de les rattraper. Second souci avec les combats : les ennemis en difficulté Normale sont beaucoup trop puissants et vous terrasseront en quelques secondes, d’autant plus qu’on n’a pas nécessairement une maîtrise totale de la situation. Certaines de nos esquives ou actions destinées à un ennemi en particulier pourront souvent être appliquées à quelqu’un d’autre, ce qui peut être un peu frustrant et les combats de boss sont parfois trop brouillons pour être pleinement appréciables. Sans trop entrer dans les détails, un certain combat impliquant deux boss se déroule uniquement dans les airs et la caméra devient complètement folle. Heureusement, ce genre de situation reste rare, mais ça peut un peu casser l’immersion et l’enthousiasme sur le moment.
Sans entrer dans les détails, le jeu propose aussi des phases d’infiltration. On pourrait penser que ça peut vite devenir frustrant, d’autant plus que c’est un game over immédiat si on se fait repérer, mais chacune de ces phases de distingue de la précédente, offrant à chaque fois un twist ou un gimmick supplémentaire qui rend le processus de plus en plus intéressant et fun. Mention spéciale aux deux dernières, qui exploitent à fond le concept et jouent avec le joueur de manière très intéressante.
Métier à Tisseur
Côté présentation, le jeu est très bon. Tout tourne comme un charme, les décors sont pas mal détaillés (si l’on prend la peine de mettre les pieds sur terre, car il est tout à fait possible de jouer au jeu sans en voir les rues) et même si les modèles de personnages sont encore un peu perfectibles, ils n’en restent pas moins beaux, avec notamment les yeux les plus convaincants que j’ai vu depuis God of War. De plus, le jeu se permet aussi parfois des moments artistiques vraiment fous et valent clairement le détour. Un autre petit détail que j’ai trouvé rigolo vient du personnage de Jonah Jameson, qui passe de rédacteur en chef du Daily Bugle à animateur de radio conspirationniste clairement inspiré par Alex Jones (le timbré américain qui clamait que l’eau était tellement polluée aux States que les grenouilles devenaient gay et qui s’est enfin fait bannir de tous les réseaux sociaux récemment)
Musicalement, c’est… Pas remarquable. C’est de la musique de super-héros tout ce qu’il y a de plus classique, à ceci près que son intégration peut parfois virer au comique : quand Spidey se met à se balancer, la musique se lance pour souligner le caractère héroïque de l’action, mais s’interrompt dès que l’on s’arrête ou que l’on se mange un mur. Et même si vous faites un tout petit déplacement pour faire un truc anodin, la musique s’emballera, rendant la situation involontairement drôle.
Enfin, il me faut parler de l’autre grande réussite de ce jeu : le jeu d’acteurs, aussi bien en VO qu’en VF. Donald Reignoux joue Spidey en VF et c’est absolument parfait. Les autres personnages aussi ont été castés à la perfection, dont Daniel Lafourcade, qui incarne un des personnages principaux avec une conviction et une nuance qui rend le personnage encore plus attachant qu’on aurait jamais cru l’imaginer. Franchement, même les puristes de la VO peuvent sacrifier la synchro labiale pour passer en VF tant elle est excellente.
En bref, malgré ses quelques soucis de gameplay et sa structure en open world qui ne révolutionnera aucunement le genre, Marvel’s Spider-Man est un excellent jeu et un divertissement de premier choix. L’histoire et sa mise en scène sont digne du standard de qualité que s’est imposé Marvel avec son Cinematic Universe et est une excellente introduction à l’univers de Tisseur pour ceux qui ont ne serait-ce que les films. Pour le coup, à moins d’être allergique aux super-héros, je peux facilement recommander le jeu à tout le monde même si je pense que ceux qui ont peur de ne pas aller au-delà de son scénario d’une dizaine d’heures pourront attendre une baisse de prix pour foncer.
Vu les indices laissés ici et là, je sens qu’une suite est inévitable et je ne peux qu’avoir hâte d’y jouer… Même si je me demande aussi si Marvel n’a pas l’intention de faire une sorte de Marvel Gaming Universe et si le projet Avengers de Square Enix sera lié d’une manière ou d’une autre à cette série.
Enfin… L’avenir n’est qu’une lointaine incertitude. Présentement, une chose est sûre : Marvel’s Spider-Man est un de ces jeux qui fait partie de la catégorie…
Benjamin « Red » Beziat