L’Histoire derrière The World Ends With You (que je vais abréger en TWEWY pour gagner du temps) est des plus intéressantes. Projet passion de Tetsuya Nomura et d’une petite équipe de Square Enix, TWEWY est sorti sur Nintendo DS à une époque où tout le monde se creusait les méninges pour exploiter au mieux les deux écrans de la console. Le résultat est un jeu tournant fortement autour de la mode, de la culture japonaise de cette époque et avec une histoire sombre qui n’hésite pas à surprendre le joueur avec des twists bien sentis. Le jeu est sorti et a connu un très modeste succès, notamment à cause d’une distribution limitée et un univers beaucoup trop spécifique pour attirer le plus grand nombre.
Mais, entretemps, TWEWY a connu un beau succès d’estime, restant dans la mémoire des joueurs, et surtout celle de Tetsuya Nomura, qui voulait tellement voir cet univers grandir qu’il a décidé d’inclure ses personnages dans Kingdom Hearts 3D Dream Drop Distance. Histoire de surfer sur la vague de la hype, TWEWY est ressorti peu de temps après sur iOS dans une version Solo Remix, avec des graphismes retravaillés et aussi et surtout… Un teaser pour une suite.
Pour le coup, j’ai comme la sensation que TWEWY Final Remix pour la Nintendo Switch est une sorte de compromis. Tetsuya Nomura ayant été pas mal occupé sur Kingdom Hearts III. Son autre bébé ayant une notoriété certes présente, mais limitée, il a très probablement été décidé de changer ce teaser de suite en tout nouveau scénario pour le post-game et… Je dois avouer que je ne pourrai pas parler de ce nouveau scénario, car étant un gros crétin, je n’ai pas trouvé comment le débloquer. Il n’est pas directement accessible après avoir fini le jeu de base et j’ai l’impression que ça implique d’accomplir une tonne de quêtes annexes pas bien intéressantes (j’y reviendrai vite fait), mais ne sachant pas lesquelles, bah… Cette critique parlera surtout du jeu de base et des décisions surprenantes qui ont été prises pour transformer le gameplay en quelque chose de plus « adapté » à la Nintendo Switch.
Shibu-YAH ! YAH ! HEYAH !
Neku, un jeune garçon un peu asocial sur les bords, se réveille au beau milieu du célèbre carrefour de Shibuya sans se rappeler de la raison pourquoi. Mais à peine a-t-il le temps de comprendre que les choses ne sont pas normales et qu’il peut lire l’esprit des gens qu’il découvre un étrange compte à rebours sur sa main et des monstres à tous les coins de rue visiblement décidés à s’en payer une tranche. Sans comprendre comment, ni pourquoi, il se retrouve forcé de devenir le partenaire d’une fille qu’il ne peut pas saquer et tous deux doivent accomplir une série de missions données par des mystérieux êtres maléfiques sous peine d’être « effacé ».
Une des grosses forces de TWEWY, c’est son scénario totalement imprévisible et plus que prenant. Régulièrement, le jeu nous balancera des twists assez violents et nous fera dire « eh beh… C’est SOMBRE ! », car les thématiques sont loin d’être joyeuses et peuvent vraiment taper dans des choses que l’on traverse/a traversé en tant qu’ado. Dans un sens, c’est un peu un Persona « light », puisque ça reste plus grand public sans pour autant avoir peur de traiter des thématiques d’estime de soi ou bien de la mort en général, en plus d’être beaucoup plus court (ce qui n’est pas plus mal), tournant autour de la dizaine/quinzaine d’heures en ligne droite. Le rythme est soutenu, faisant que l’on enchaînera facilement les longues sessions pour en voir le bout.
Jazz h.a.n.d.
En matière de structure, TWEWY est un des RPG les plus agréables à parcourir. C’est très linéaire si on le souhaite et il n’est presque pas nécessaire de se battre en dehors des combats obligatoires si on ne veut que faire l’histoire, car les niveaux grimpent facilement et il est possible de customiser à l’envi son expérience de jeu en diminuant la difficulté à la volée et en s’attribuant plus ou moins de points de vie pour des récompenses plus ou moins importantes. De plus, la possibilité d’enchaîner plusieurs combats en une session rend les éventuelles sessions de leveling plus rapides et efficaces.
Pour le coup, seules deux choses dans la structure m’ont un peu gonflé : le système de mode et la carte, car cette dernière n’est pas claire du tout. Je n’irai pas jusqu’à dire que je me suis perdu plusieurs fois, parce que Shibuya reste assez petit et quadrillé selon les missions pour éviter de trop tourner en rond, mais il m’est quand même arrivé à quelques reprises de devoir faire des allers et retours pour retrouver mon chemin.
En revanche, le système de modes est assez éreintant quand certaines missions y sont attachées. Pour faire simple, vos badges (armes) et vos vêtements (équipement) sont chacun liés à une marque. Shibuya étant un quartier où la mode et les tendances vont plus vite que ne le permet la pensée humaine, certaines marques seront tendance un jour, puis « obsolètes » le lendemain. En combat, cela se traduit par une efficacité démultipliée ou bien diminuée en fonction du classement de la marque dans le top des tendances. Si telle marque est dans le top 3, les dégâts infligés seront multipliés par 1,5, voire 2, mais si elle est treizième, son efficacité sera divisée par deux. Dans les combats, ce n’est pas trop important si vous ne jouez pas en Difficile (et c’est carrément obsolète en Facile, puisque les combats sont une promenade de santé), mais il arrivera que quelques missions demandent qu’une marque soit catapultée à la première place, signifiant qu’il faudra enchaîner les combats en portant un maximum de pièces d’équipement de ladite marque. Et selon sa place initiale dans le classement, cela signifie qu’il faudra parfois faire des petites sessions de grinding. Bon après, ce ne sont pas des séances de plus de quinze minutes et, dans un sens, ça permet de se remettre un peu à niveau au cas où, mais ces missions arrivent toujours quand on a le plus envie de voir le scénario progresser, donc ça peut facilement frustrer.
Et là on arrive au plus gros point de frustration du jeu : les contrôles.
Je ne sais pas comment ils s’y sont pris, mais ils ont réussi à créer le système de combat le moins intuitif au monde en nous forçant à n’utiliser soit qu’un Joy-Con, soit uniquement l’écran tactile. Pas de Classic Controller, pas de duo de Joy-Cons (sauf pour jouer en co-op avec un pote) et… Encore moins de stick analogiques ! Pour déplacer Neku avec l’écran tactile, il suffit de glisser le doigt là où l’on veut qu’il aille. Là, ça reste gérable (sauf en combat, mais j’y reviens). Avec le Joy-Con, il faut pointer l’écran et appuyer sur L. Soit. C’est stupide, mais soit.
Le gros souci, aussi bien en tactile qu’avec la manette, c’est quand il faut se battre, car toutes les actions sont dictées par l’écran tactile/le pointeur. Je ne vais utiliser que l’exemple de l’écran tactile, parce que je dois avouer que je n’ai même pas tenu plus de dix minutes avec le Joy-Con avant de baisser les bras en lâchant quelques insultes devant l’absence d’intuitivité du système.
Vous vous rappelez quand j’ai dit que pour déplacer Neku, il fallait toucher l’endroit désiré pour y aller ? Eh bien en combat, il faut poser le doigt sur Neku, puis le déplacer plus ou moins vite pour faire une esquive ou non. Et pour lancer certaines attaques selon le badge équipé, il est parfois nécessaire de toucher Neku et glisser rapidement sur le côté. Autrement dit, il est possible de déplacer Neku par accident ou bien de le faire attaquer sans raison. C’est stupide et inutilement compliqué et donc le gros de mes combats consistait à ne pas me concentrer sur la partie déplacement et de juste frotter l’écran comme un demeuré jusqu’à ce que les ennemis disparaissent et parfois prier que le jeu comprenne ce que je veuille faire, car les hitbox sont aussi particulièrement hasardeuses, notamment sur les objets que l’on peut balancer sur les ennemis avec la télékynésie, qui ne marche qu’une fois sur trois… De fait, j’ai fait le dernier tiers du jeu en Facile pour ne pas me prendre la tête. A ce stade du jeu, j’arrivais quand même à faire plus ou moins bien ce que je voulais sans trop de difficulté, mais à cause de ce manque de fiabilité dans les contrôles et pour rendre les combats fun, je devais me résoudre à passer plus ou moins en God Mode (et terrasser ses ennemis en faisant n’importe quoi s’avère étrangement fun, je dois l’avouer).
Dans tous les cas, je n’arrive pas à comprendre comment ou pourquoi les développeurs se sont entêtés à nous imposer ce style de contrôles, car il n’était pas impossible de jouer à la manette. On peut équiper jusqu’à 6 badges et les actions de notre partenaire sont assez simples, donc ça fait sept actions, les déplacements et les esquives à gérer. Un système d’auto-lock aurait certes fait un peu brouillon, mais ça n’aurait pas été impossible à faire… Enfin bref.
Calling in Style
En termes de remake à proprement parler, la version Final Remix reprend les graphismes améliorés de la version mobile et les adapte au format de la Nintendo Switch. Les sprites sont plus beaux que jamais et le jeu est un véritable plaisir pour les yeux. Chaque quartier a son identité propre et les décors fourmillent de petits détails que l’on prendra plaisir à dénicher.
Là où le gros des efforts est passé, en plus de la création d’un tout nouveau pan de scénario pour qui souhaite le dénicher, du mode co-op et des nouveaux contrôles, c’est dans la partie sonore.
Toutes les musiques du jeu d’origine ont été remixées et ont gagné en qualité dans l’audio. Les changements sont subtils, mais plus qu’appréciables, sachant que la bande-son est une des meilleures que j’ai pu entendre de l’année. Vous dire que je ne tapotais pas furieusement du pied durant les batailles serait vous mentir et, en dehors de deux ou trois pistes légèrement inférieures au reste, tout est mémorable et pêchu. Que ce soit Calling, Twister ou Give Me All Your Love, il n’est pas improbable que vous vous mettiez à chanter au bout de quelques heures de jeu (confession : je suis en train de le faire à l’instant où j’écris ces lignes car l’écris cette critique avec la bande-son du jeu en fond sonore… D’ailleurs, cette B.O. en général est très cool pour écrire des histoires).
En bref, même si je regrette un peu le manque d’intuitivité des contrôles, l’absence de support pour des manettes plus normales et aussi le fait qu’il fasse travailler un peu plus pour obtenir le contenu inédit, The World Ends With You – Final Remix est largement à la hauteur de la réputation que le jeu de base s’est taillée au fil des années. Une histoire vraiment prenante bardée de personnages cool, des combats plutôt jouissifs (en Facile) qui nous font passer pour un chat hyperactif devant un pointeur laser et une identité visuelle et musicale forte qui le démarquent de 98% du paysage vidéoludique font que si vous êtes un tant soit peu sensible à la culture pop-urbaine, vous passerez un excellent moment.
Si vous aimez les RPG pas trop exigeants et les histoires complètement folles, il n’y a pas à bouder son plaisir. Idem si vous cherchez un jeu sortant un peu du lot. Pour le coup, j’espère qu’il y aura un jour un nouvel épisode avec un cadre un peu plus modernisé et des contrôles plus normaux, car cet univers mérite d’être exploré plus en profondeur.
Je ne lui donne pas le titre d’Indispensable pour ses petites erreurs, mais je ne peux que très, très solidement lui décerner le titre de…
Benjamin « Red » Beziat
Alors, c’est drôle. J’ai bouclé le jeu avant-hier soir, prévoyant d’en faire ma propre critique écrite. Ayant déjà un avis bien défini dessus, je décide de chercher d’autres critiques ayant éventuellement déjà abordé le sujet et je tombe sur celle-ci…
Je ne changerais pas UN MOT, c’est EXACTEMENT ce que je pense du jeu et je l’ai joué de l’exacte même façon (Quoique j’ai tenu un chouille plus longtemps au joy con, le temps de choper une tendinite et de passer au tactile). Donc merci de m’épargner le besoin d’en parler, cet article fût ma foi très défoulant à lire !