Qu’est-ce que l’ironie si ce n’est être en panne d’inspiration pour l’écriture d’une critique à propos d’un jeu où la créativité est au centre de tout ? Peut-être est-ce parce que Super Mario Maker 2 est si similaire dans le principe à son prédécesseur que j’ai du mal à trouver mes mots,, mais je pense que c’est aussi parce que j’ai déjà couvert les bases de mon ressenti à travers la preview la semaine dernière.
Et c’est pour célébrer l’esprit de cet extraordinaire outil que je vais utiliser mon texte précédent comme fondation pour la construction de cet édifice à la gloire d’un des titres les plus fous de la Nintendo Switch !
Build an over-bear-ing level
Comme dit précédemment dans ma preview, je me dois de préciser une chose : la version que je teste est plutôt unique puisqu’elle est connectée à un serveur spécialement mis en place pour la presse et qui sera débranché à la sortie de la version commerciale, rendant mon exemplaire plus ou moins obsolète. Je me suis donc volontairement retenu de créer beaucoup de niveaux ou bien des trucs trop complexes auxquels personne ne pourrait jouer, mais il m’aura suffi que de quelques essais pour me rendre compte du potentiel de la chose.
Car si vous avez joué au premier Super Mario Maker, vous n’êtes pas sans savoir que les fans ont pu créer des niveaux complètement dingues avec une palette d’outils vaste… Mais comparée à celle proposée dans le 2, elle semblait carrément limitée, voire restrictive !
Ici, non seulement il sera possible de recréer ce qui a été déjà fait (notamment des autoscrollers ressemblant à des Machines de Rube Goldberg sauce champignons et des niveaux musicaux étonnamment élaborés), mais en plus de rajouter énormément de nouvelles options qui vont radicalement changer la donne. Si vous avez regardé le Nintendo Direct ci-dessus qui y a été consacré et qui liste vraiment bien les nouveautés montrées, vous comprendrez où je veux en venir et vous comprendrez que cet outil de création donnera lieu à des niveaux tellement fous qu’ils susciteront pas mal de vocations. Personnellement, le meilleur ajout de cette suite vient des conditions de réussite du niveau, qui rajoutent une couche de complexité folle à certains niveaux… Surtout si vous optez pour l’épreuve de sadisme qu’est « ne pas sauter de tout le niveau » ou bien se débarrasser d’un ennemi en particulier alors que réussir à l’atteindre est un défi à lui tout seul !
Dans un sens, c’est absolument génial que tout cela ait été ajouté, MAIS : il faut savoir que TOUT est débloqué d’office. J’imagine que ça a été fait dans le but de permettre aux plus créatifs d’éviter à attendre qu’une limite arbitraire soit atteinte pour qu’ils puissent utiliser tel élément ou tel autre, mais le contrecoup fait que celui qui n’a jamais joué au jeu sera très vite perdu dans le mode Création… Et même dans les menus, qui sont loin d’être aussi clairement annoncés qu’espérés. Pas plus tard que la veille de l’écriture de cet article, j’avais tout juste trouvé comment jouer aux niveaux que l’on créé soi-même sans avoir à passer par le mode Création et suis donc accidentellement tombé sur l’option qui permet de jouer en multi local, qui est représentée par un simple pictogramme mis sur le côté ! Certes, j’aurais pu regarder le manuel, et c’est ce que j’ai essayé de faire, mais celui-ci est aussi un menu interactif et au risque de passer pour le vieux joueur du coin habitué aux manuels papier, bah c’était un peu galère à utiliser…
Cela étant dit, il existe trois solutions à ce « problème » : le mode Histoire, les guides qui vous offrent une approche plus philosophique du level design et que je soupçonne même tiré des manuels stockés chez Nintendo à l’égard de leurs employés, les Wiki sur Internet qui vous ouvriront des portes jusque là insoupçonnées (et même jamais explicitées par le jeu lui-même) et la bonne vieille technique d’appuyer sur tous les boutons au pif jusqu’à ce que ça fonctionne, chose qui est justement encouragée par l’interface même de l’outil de création, avec ses multiples boutons colorés dispersés ici et là.
Mais avant d’aborder la partie Histoire, il me faut vite fait revenir sur le « » » »gros » » » » point noir du mode Création : l’absence de stylet rend la création un peu moins évidente. Si vous voulez créer des niveaux efficacement sur Super Mario Maker 2, oubliez la manette sauf si vous créez vos niveaux avec un ami (ce qui est très bordélique, au passage, mais dans le bon sens du terme). La manette rend le processus de création beaucoup plus lent et se rappeler des différentes combinaisons de boutons à effectuer pour entrer dans telle et telle section du menu est une gymnastique mentale que vous souhaiterez vous épargner. Ce n’est pas injouable, bien au contraire. C’est juste contraignant et une perte de temps par rapport au tactile.
Mais ledit tactile pose lui-aussi problème dans une bien moindre mesure. Car à moins d’avoir un de ces fameux stylets offerts en précommandant le jeu ou bien un que vous utilisez d’habitude sur des tablettes tactiles, vous devrez utiliser vos doigts. Et les doigts, bah ça peut être gros, gras et surtout cacher notre vision de l’écran, faisant que l’on peut potentiellement toucher à côté de l’endroit désiré. Si vous avez les doigts fins, pourquoi pas, mais ça reste un poil plus inconfortable que les stylets utilisés par les versions Wii U et Nintendo 3DS du premier épisode… Encore une fois, ce n’est pas injouable et naviguer dans les icônes reste fun une fois que l’on a apprivoisé cette interface, mais vous aurez assez souvent le doigt sur la gomme.
En vrai, on pourrait croire que je frappe un peu fort sur l’outil de création, vu que j’ai passé mon temps à ressortir les détails qui m’ont un peu titillé de la mauvaise façon, mais toutes ces critiques reflètent mon point de vue de personne qui va juste passer un peu de temps dessus avant de comprendre que faire un niveau compétent requiert au minimum une demi-heure à une heure de travail. Toutes ces micro-frustrations couplées au temps qu’il faut pour créer me donnent la sensation que beaucoup d’entre nous toucheront vite fait au mode de création avant de passer à autre chose car même s’il est agréable à utiliser une fois qu’on le comprend, il n’en reste pas moins trop intimidant à cause des ses innombrables possibilités, beaucoup trop vastes pour nos faibles esprits.
Super Mario Maker 2 s’adresse aux deux catégories très spécifiques de joueurs que sont les Créateurs qui s’amuseront sans fin à créer des niveaux très élaborés et les Joueurs qui profiteront du travail des Créateurs pour passer un bon moment. Et je fais clairement partie de la catégorie des Joueurs… Et ça tombe bien, puisque je me dois de parler de la partie qui me fait hurler de plaisir : la partie jeu !
Tourist Traps Everywhere !
Comme dit plus haut, le Mode Histoire est non seulement un excellent tuto déguisé pour le mode de création, mais aussi un moyen pour les level-designers de Nintendo de créer des niveaux qu’il leur serait interdit de faire en temps normal.
Car s’il y a bien un mot qui peut définir ce mode, c’est la « folie ». Au bout de trois niveaux à peine les choses se corsent significativement. Certains défis relèvent d’une créativité débridée et sont le résultat d’idées poussées à leurs extrêmes. Certains sont très drôles, d’autres très difficiles, et d’autres vous donneront l’impression d’être accidentellement tombés sur ces ROM-hacks obscurs où tout est extrêmement difficile.
Mais dans tous les cas, c’est absolument kiffant.
Et même si la structure du mode Histoire est plus fonctionnelle qu’autre chose – gagnez des pièces pour débloquer d’autres niveaux via l’avancement de la construction du château de Peach – les petits dialogues sont rigolos et les niveaux sont tellement impressionnants qu’on finit par tous vouloir les faire.
Et l’autre petit détail très cool qui permet à ces niveaux d’être difficile vient du fait que si vous mourrez plus de deux fois, il est possible ensuite d’invoquer un nombre limité d’objets pour vous aider si besoin. Personnellement, ma fierté fait que j’ignorais toujours ces petits bonus et je faisais presque toujours en sorte de finir les niveaux tels qu’ils ont été imaginés, mais l’aide sera plus que bienvenue si vous n’avez pas la patience ou bien êtes véritablement bloqués.
Et comme dit plus haut, chacun de ces niveaux est une sorte de tutoriel déguisé destiné à montrer chacun des outils et leur utilisation dans le contexte du mode Création. Des sortes de sources d’inspiration si l’inspiration ne vient pas d’elle-même.
Et avant de passer à la partie online, je reviens vite fait sur les différents types de gameplay offerts par les différents styles de jeux. Comme dans le premier épisode, vous pouvez créer et jouer à des niveaux dans les styles de Super Mario Bros., Super Mario Bros. 3, Super Mario World et New Super Mario Bros. U. Non seulement chaque style change l’apparence des niveaux, mais ils permettent aussi de changer leur gameplay et les différents power-ups utilisés, ce qui rajoute un certain degré de profondeur supplémentaire, puisqu’il faut prendre en compte les forces et les faiblesses de chacun des styles pour créer le niveau idéal. Par exemple, le style du premier SMB est tellement simple que vous ne pouvez que courir et sauter, tandis que dans le style de SMB 3, vous aurez une jauge de course qui vous permettra de vous envoler avec le costume de tanuki. Le style de SMW, lui, vous offre la possibilité de creuser dans les blocs et utiliser la plume et celui de NSMBU vous permet de sauter de mur en mur et d’utiliser un triple saut.
Et dans ce nouvel épisode se rajoute un tout nouveau style : celui de Super Mario 3D World, avec des obstacles et des ennemis qui lui sont totalement uniques et inutilisables ailleurs (et les scies circulaires disparaissent, hélas). Là où les choses deviennent très intéressantes viennent du fait que Mario peut faire ici un saut en longueur, a différentes vitesses de course et peut utiliser le costume de Mario Chat, ce qui rajoute encore plus de possibilités et d’options à l’ensemble ! Ajoutez à l’équation un tout nouveau véhicule et vous avez je pense un style qui sera très fortement utilisé par la communauté en ligne.
D’ailleurs, il est temps de parler de la composante online du jeu, qui est d’après moi la seconde meilleure partie du jeu !
Comme dans le premier, il est possible de partager et jouer aux niveaux avec le reste du monde et les options de recherche et de classement sont plutôt efficaces. De plus, il est possible de laisser des petits commentaires prenant la forme soit de petites cartes, soit des messages écrits, voire dessinés, façon Miiverse ! J’ai pas mal apprécié la possibilité de suivre des créateurs que l’on aime bien en plus de pouvoir télécharger leurs créations pour pouvoir les disséquer et les faire sans avoir à se reconnecter au net. L’autre truc cool vient de la personnalisation de notre profil, avec la possibilité de débloquer des éléments de costume en réalisant diverses tâches, comme être le premier du classement de tel niveau, obtenir un certain nombre de « Likes » sur les niveaux que l’on a uploadé, etc.
Enfin, il est possible de jouer jusqu’à 4 en ligne et simultanément, ce qui est assez exceptionnel si l’on prend en compte le fait que Nintendo n’avait jamais voulu inclure une telle feature dans un platformer Mario en 2D ! Il est possible d’y jouer en mode coopératif ou bien compétitif (et bientôt avec ses amis via une future mise à jour, ce qui est tout aussi rassurant qu’exaspérant) et même si personnellement je sens que je ne vais pas y toucher plus que ça (joueur solo un jour joueur solo toujours), je sais d’avance que ça plaira à beaucoup et j’espère que la version publique tiendra le choc.
Le seul truc qui me dérange vient du fait que le Nintendo Online soit requis même pour jouer aux niveaux des autres. Que ce soit nécessaire pour le multi en ligne, pourquoi pas, mais je ne suis pas trop fan de l’idée de mettre derrière un mur payant ce qui sera la partie la plus fun du titre pour la majorité des joueurs. Bon, après, ça reste du 20€ par an et si vous avez l’abonnement, m’est avis que vous jouez à pas mal d’autres jeux en ligne, mais bon, on va juste dire que c’est le vieux joueur fan de manuels en papier que je suis qui joue les vieux réac’.
Enfin bref, malgré toutes ces petites critiques, il m’est impossible d’être vraiment sévère envers ce Super Mario Maker 2. Certes l’interface de création peut être intimidante pour celui qui ne cherchera pas à bâtir la chapelle Sixtine du jeu vidéo, mais je pense qu’avec un peu de temps et de bidouillage on peut finir par aboutir sur quelque chose qui soit plaisant.
Et si vous n’êtes pas du genre créatif, ce n’est pas vraiment grave, puisque vous pourrez malgré tout vous amuser avec une source potentiellement infinie de niveaux et faciles à trouver ! Tant qu’il y aura des créatifs dessus, il y aura forcément quelque chose pour vous amuser vous et m’est avis vu la palette d’outils proposés (sans compter les inévitables DLC à venir) ces personnes-là seront présentes et actives pendant au moins les cinq prochaines années !
Si vous aimez les jeux de plateforme, il n’y a absolument aucun doute à avoir : il vous faudra ce jeu ! Le mode Histoire est incroyablement ingénieux en plus de n’être que la surface de ce que je suis sûr de voir dans les prochains mois (et d’être aussi complet que New Super Mario Bros. U Deluxe, ironiquement) et je sais d’avance que vous aurez rentabilisé votre achat en à peine quelques jours.
J’ai juste hâte de pouvoir découvrir la version publique et de rager sur vos créations ! Et aussi, finissez ce que je n’ai pas eu la patience de bâtir… Faites un niveau musical Megalovania !
Benjamin « Red » Beziat