S’il y a bien quelque chose que je regrette, c’est de ne pas avoir des journées de 48 heures. Plus on prend de l’âge, moins on a le temps de jeter un œil à tout ce qui bouge. On est obligé de faire des choix et de délaisser certaines choses au prix d’autres qui auraient pu nous intéresser tout autant… Le fait que le marché du jeu vidéo ait également explosé ces dernières années au point de proposer pas moins d’une centaine de titres en un mois n’aide pas non plus, mais tout cela fait que certains jeux très prometteurs nous passent totalement par dessus la tête.

Masters of Anima fait partie de ces jeux. Alors certes, j’avais déjà vu le nom traîner ici et là au détour d’un communiqué de presse ou d’un événement, mais je n’avais jamais eu le temps de me pencher dessus, et ce n’est que grâce à un trou dans mon emploi du temps et le fait que le jeu soit sur Nintendo Switch que j’ai pu lui donner sa chance. Et je suis bien content de l’avoir fait, car même si le titre de Passtech Games (nom de studio génial, en passant) n’est pas parfait, il se place tout de même bien haut dans le panier de jeux auquel j’ai pu jouer ces dernières années.

Shadow of the Golem

L’histoire de Masters of Anima est plutôt classique : un ancien mal scellé bien des siècles auparavant par des sorciers très puissants menace de ressortir à cause d’un méchant très méchant qui a réussi à diviser en trois la sorcière la plus puissante encore en vie et il en incombe à Otto, un jeune sorcier un peu maladroit et le seul encore disponible, de l’arrêter… Enfin, de sauver la sorcière, puisqu’il s’avère que ladite sorcière est son épouse. Lui préférerait partir le plus loin possible et ne va sauver le monde que de manière incidentelle.

Comme dit plus tôt, l’histoire ne va pas révolutionner le paysage vidéoludique, mais il n’en reste pas moins cool à suivre, notamment grâce à ses personnages et son univers travaillés et un doublage anglais plus que plaisant, qui me rappellent un peu Trine sous certains aspects. De plus, Otto n’est pas une marionnette dans laquelle le joueur se projetterait, mais un personnage avec une personnalité marquée et assez différente du héros classique, ce qui est toujours un bonus appréciable à mon goût.

Eina not included

Masters_of_Anima_2

Et même si niveau présentation, c’est très bon, c’est dans le gameplay que Masters of Anima se démarque pour offrir quelque chose de vraiment intéressant.

Pour faire très simple, le jeu est un Pikmin/Little King’s Story-like : notre personnage a une petite armée de cinq types de golems différents qui lui permettront de se battre et de progresser dans les niveaux. On a les soldats de base, qui permettent de bourriner les ennemis et les obstacles ou pousser des trucs, les archers, qui font la même chose, mais à distance, les shamans, qui peuvent pomper l’Anima des adversaires et activer certains mécanismes, les commandants, qui peuvent relayer nos ordres, taper plus fort, déterrer des trucs et soulever des barrières protectrices et enfin les invocateurs, qui invoquent aussi bien des petites unités que des gros golems que l’on pourra piloter comme des Gundam téléguidés. Bref, aucune unité ne servira qu’à faire une seule chose et les développeurs se sont vraiment amusés à créer des petits puzzles ingénieux exploitant les forces et faiblesses de chacun.

Mais c’est surtout dans les combats que le jeu brille par son génie. Les types d’ennemis sont variés et proposent constamment un challenge. Les combats peuvent durer un certain temps et Otto est assez vulnérable, faisant que certains des affrontements les plus complexes peuvent vite tourner à une guerre d’endurance. Car on ne peut bien évidemment pas invoquer des unités à tout va. Notre réserve d’Anima joue un rôle vital dans les combats et plus vous en aurez, plus vous aurez de chances de vous en sortir, car vous pourrez l’utiliser pour invoquer des unités ou bien offrir des micro-boost de puissance à vos unités. Mais sachant que faire ça peut drainer assez rapidement votre réserve et que les ennemis peuvent décimer votre armée en quelques secondes, seriez-vous prêt à prendre ce risque ? En résulte donc des combats déjà assez tendus et stratégiques, où l’on sera sollicité constamment… Et c’est sans compter sur la jauge de rage des adversaires.

Tous en ont une et jamais elles ne s’arrêtent. Tout c que vous pouvez faire, c’est prier pour que vous vous débarrassiez de l’ennemi au plus vite, car si elle se vide entièrement, l’ennemi passe en mode berserk, voit son niveau d’attaque monter considérablement et de la foudre tombera en continu sur le terrain, faisant que vous devrez non seulement faire gaffe à un ennemi devenu plus difficile à battre, mais vous devrez aussi rester constamment en mouvement.

Même si je peux trouver ce système frustrant, ça nous pousse à trouver la stratégie idéale pour battre l’ennemi le plus vite possible, ce qui est vraiment cool d’un point de vue développeur, puisque le joueur devra apprendre à maîtriser le système de jeu pour être le plus efficace possible.

Cependant, le jeu possède un défaut majeur : il est trop long. Alors certes, ça peut paraître paradoxal, surtout avec un jeu qui dure moins d’une dizaine d’heures, mais quand il te faut plus de trente minutes pour finir qu’un seul niveau, si ce n’est carrément pas plus d’une heure, c’est qu’il y a un problème. Alors certes, il y a des checkpoints qui font que l’on peut reprendre plus ou moins en cours de route si besoin, mais la structure du jeu fait qu’il vaut mieux faire les niveaux d’une traite. Or, ici, on a l’impression d’être forcés à devoir se faire un niveau d’une heure quand on n’a pas nécessairement envie de jouer plus que ça. Peut-être est-ce à cause de mon train de vie ou bien le fait que beaucoup de jeux privilégient désormais des expériences plus compactes et donc je n’ai plus l’habitude, mais ça fait très bizarre de jouer à un jeu comme ça.

Après, même si certains niveaux sont un poil trop longs par rapport aux concepts qu’ils proposent, cela ne veut pas dire que le jeu ne se renouvelle pas, bien au contraire. Chaque niveau propose son petit gimmick et l’on peut être surpris de voir à quel point un concept à priori si simple peut se renouveler. Un coup on partira à la cueillette d’objets à donner à quelqu’un (un des niveaux les plus longs, d’ailleurs), un autre ça sera une séquence de fuite, etc. Du coup, entre les niveaux variés et les combats plus que prenants, on ne peut pas dire que l’on s’ennuie véritablement, ce qui est plutôt cool.

Masters of the Animaverse

Masters_of_Anima_1

Comme dit plus haut, niveau présentation, le jeu est plutôt pas mal. Les décors sont variés, les doublages sont bons et les musiques très bonnes (surtout celles des combats). Le seul souci que je détecte et qui vaut plus de l’ordre du pinaillage vient du fait que parce que les ennemis sont tous des golems, ils sont tous marrons et donc donnent l’impression de se ressembler, faisant que l’on passera une dizaine de secondes avant de correctement identifier le type d’ennemi et adapter sa stratégie en fonction.

Aussi, un autre petit souci est lié à la version Switch. Ou du moins, le mode portable, puisque le jeu est étrangement flou. Pas non plus au point d’être illisible et on s’y fait au bout de cinq minutes, mais le premier contact n’est pas forcément le plus agréable. Aussi, le jeu dévore la batterie de la console comme Kirby le ferait un buffet entier, ce qui est un poil ennuyant. On peut tenir une session de deux heures, mais pas bien plus.

Au final, Masters of Anima est une très bonne surprise ! Le jeu a tout ce qu’il faut en charme pour nous donner envie de continuer et même si les niveaux peuvent être un poil trop longs, ils n’en restent pas moins suffisamment variés pour donner envie d’en voir la fin. Les lyonnais de Passtech Games nous livrent donc là un bon petit jeu indé qui saura stimuler vos neurones et vos réflexes tout en vous transportant dans un monde très sympa. Si vous aimez les jeux comme Pikmin ou Little King’s Story, vous ne pouvez que foncer. Si vous aimez soutenir les jeux indés, il n’y a pas d’hésitation à avoir. Et si vous voulez un jeu sympa pour alimenter votre Switch*, ce n’est pas une mauvaise option.

*Certes, le jeu est aussi dispo sur PC, PS4 et Xbox One, mais bon, soyons honnêtes, qui achète encore ses jeux là-bas quand il possède une Switch et que l’option lui est offerte ?

Benjamin « Red » Beziat