S’il y a bien une série que j’apprécie énormément et qui est malheureusement beaucoup trop largement sous-estimée, c’est bien la série des Etrian Odyssey. Conçus comme des hommages aux RPG des années 80, ces jeux ne se reposaient à la base que sur un simple gimmick : la possibilité de gribouiller la carte des labyrinthes que l’on traverse sur l’écran du bas et c’était largement suffisant pour transformer des jeux plutôt simplistes en expériences très prenantes et extrêmement addictives. Le souci, c’est que ces jeux ne fonctionnaient presque que grâce aux capacités uniques des Nintendo DS et Nintendo 3DS, où l’on explorait le donjon sur l’écran du haut et l’on gribouille sans délai sur l’écran du bas. Or, ces merveilleuses consoles arrivent en fin de vie et je sens que reproduire ce type d’expérience sera au mieux difficile à reproduire, au pire impossible sans que le plaisir de jeu n’en soit impacté. De fait, pour célébrer la fin potentielle de cette fantastique série, Atlus a décidé de sortir un épisode best-of qui reprend le meilleur de tous les épisodes précédents tout en y ajoutant quelques petites nouveautés bien appréciables.

… Comment ? Ils n’ont pas mis les Bushi ?

MAIS C’EST QUOI CE SCANDALE !!!???

Thésée-vous !!!

Critiquer une série comme Etrian Odyssey peut s’avérer assez compliquée, car dans les faits il n’y a pas plus simple dans le principe : vous êtes un groupe d’aventuriers devant explorer de nombreux labyrinthes pour progresser sur une île possédant un trésor fabuleux et c’est plus ou moins tout. Les personnages de l’histoire ne sont pas particulièrement élaborés, mais je ne saurais expliquer pourquoi, mais la narration purement textuelle renforce pas mal l’immersion et la fréquences de petits interludes narratifs dans les donjons fait que l’exploration n’est jamais totalement monotone. Quand vous arrivez dans une zone où un événement se passe (genre vous réveillez un ours qui va vous poursuivre), vous n’en verrez absolument rien, mais les descriptions sont telles que vous pouvez beaucoup trop facilement l’imaginer. Concrètement, on peut imaginer que 80% du budget est passé dans le character-design, le temps d’élaborer le level-design ingénieux des différents labyrinthes, la modélisation des très nombreux types d’ennemis et la grande majorité dans les musiques (mais j’y reviens).

D’un point de vue gameplay, vous constituez librement votre propre groupe d’aventuriers en choisissant parmi dix-neuf classes différentes, toutes issues des épisodes précédents à l’exception du Héros, qui peut créer des doubles pour l’aider en combat. Vous pouvez avoir entre un à cinq personnages dans votre groupe, sachant que plus vous en mettez, plus vous aurez de chances de vous en sortir en combat, mais vous sacrifierez le nombre de points d’expérience que chacun recevra à l’issue de chaque combat, équilibrant un minimum les sessions de jeu. Personnellement, je dois avouer que j’ai tout autant tenté de créer un groupe équilibré que d’avoir des personnages au design un minimum classe et se rapprochant le plus des miens pour faire de ce jeu un spin-off non officiel des Chroniques de Loutre-Monde (même si j’ai découvert un peu plus tard que le design du personnage ne dépendait pas forcément de sa classe et que vous pouvez tout à fait assigner à votre soigneur une apparence de guerrier et inversement, permettant d’avoir un groupe stylé et bien plus équilibré… Woops). Chaque classe possède ses avantages et inconvénient, tout comme des choix d’équipements qui leur sont spécifiques ainsi que des capacités spéciales uniques que l’on débloque en gagnant des points à chaque niveau franchi, garantissant ainsi une sensation de progression constante en plus d’un grand sentiment de satisfaction.

La structure est plutôt simple et sera toujours la même : vous allez dans un labyrinthe, tâtonnez à chaque nouvel étage tout en gribouillant votre carte à l’aide d’un éditeur de cartes vraiment complet et intuitif, complété d’icônes vraiment utiles, affrontez des monstres pour des points d’expérience et des matériaux que vous pourrez revendre pour débloquer de nouvelles options d’équipement à forger et acheter, puis progressez petit à petit tout en évitant les nombreux pièges jusqu’à ce que vous découvriez des raccourcis qui rendront les futurs voyages bien plus courts et satisfaisants. Oh, et bien évidemment vous ressentirez la terreur de faire face à des gros monstres visibles sur la carte et capables de vraiment vous faire mal… Jusqu’à ce que vous arriviez vers la fin du labyrinthe et que vous soyez capables de les battre en quelques tours, apportant un sentiment de satisfaction qui fonctionne à chaque fois. Franchement, si vous aimez les RPG qui vous font ressentir une grosse montée en puissance et d’accomplissement, il n’y a pas mieux que cette série, car peu importe que la structure soit si répétitive, ce sentiment est tellement puissant que l’on ne peut faire qu’une chose : continuer à jouer, encore et encore.

… Ou du moins, si vous y jouez en Basique (l’équivalent du mode Normal). Par souci de gagner du temps sur ma critique, j’ai décidé de changer de niveau de difficulté assez tôt dans ma partie. Et là où Etrian Odyssey Nexus propose un joli challenge en Basique, où chaque pas doit être calculé et chaque combat est remporté de peu, en mode Pique-Nique (ça ne s’invente pas), on a affaire à un jeu radicalement différent, mais tout aussi intéressant, si ce n’est plus selon votre profil de joueur. En Pique-Nique, les points d’expérience sont doublés (si ce n’est pas carrément triplés), les monstres font tellement pas mal que ça en devient risible et vous frappez tellement fort que ces monstres visibles sur la carte capables de mettre un frein à votre exploration deviennent une simple formalité,, sans compter que je ne suis plus jamais tombé sur un événement in-labyrinth qui détruisait par accident mon équipe, au contraire la soignant systématiquement.

Vous pourriez dire que dans un sens, je ne jouais plus au jeu et vous auriez parfaitement raison, mais personnellement j’ai eu plus l’impression de jouer à un tout autre jeu basé sur Etrian Odyssey Nexus, où tout mon plaisir était tiré d’explorer tranquillement les labyrinthes et découvrir les secrets de chacun (d’ailleurs, certains d’entre eux sont des monstres d’ingéniosité) tout en souriant comme un idiot à chaque fois que je tuais les plus gros boss de chaque donjon en littéralement trois tours ou moins. En gros, Etrian Odyssey Nexus peut tout aussi bien être un RPG exigeant qu’un jeu auquel on va jouer pour simplement se détendre et vous aurez raison de l’aborder comme l’un ou comme l’autre selon vos envies et il n’y a aucune honte à avoir.

Le seul défaut que j’ai vraiment trouvé au jeu vient de l’inventaire limité qui fait que les allers et retours en ville pour revendre les matériaux sont beaucoup trop fréquents et nous empêchent d’avancer trop vite. L’avantage, c’est que l’on peut ensuite débloquer de nouvelles pièces d’équipement pour devenir une meilleure machine à tuer ou bien accomplir des quêtes annexes assez rudimentaires pour gagner l’argent nécessaire pour obtenir ledit équipement. Il est aussi possible de remplir la carte à 80/90% sur chaque étage pour ensuite la rendre à la guilde des explorateurs et obtenir des bonnes récompenses.

Je vais passer la partie graphique, puisque les labyrinthes sont aussi détaillés et jolis que le fond d’écran de veille de Windows 95 où l’I.A. déambulait dans un labyrinthe (eeet je me suis pris un gros coup de vieux), mais je ne peux pas parler d’Etrian Odyssey sans évoquer ses bande-sons légendaires composées par Yûzô Koshiro ! Nexus étant un épisode best-of, il y a bien évidemment beaucoup de reprises de thèmes passés et ce n’est clairement pas pour nous déplaire, car toutes sont plus extraordinaires les unes que les autres. Et je pense que ce sont aussi ces musiques qui font que l’on prend autant de plaisir à explorer les labyrinthes, car elles ne sont pas répétitives pour un sou en plus de nous détendre (pour la plupart). Les thèmes de combat sont très variés, provenant des épisodes précédents et même si la qualité de son est toujours aussi immondes aux haut-parleurs pour les thèmes d’Etrian Odyssey IV (jouez-y avec des écouteurs), la richesse des compositions rend plus qu’honneur aux capacités sonores de la Nintendo 3DS. Et, petit bonus appréciable, le thème « inédit » pour les donjons exclusifs à Nexus est en fait un arrangement d’un morceau composé pour le tout premier épisode, mais qui n’était jamais sorti car trop étrange par rapport au reste de la bande-son ! Sans compter les thèmes des boss qui sont monstrueux… Si vous n’avez pas pour intention de jouer à ce jeu, penchez-vous au moins sur la bande-son, car elle contient quelques unes des meilleures pistes que vous pourrez écouter dans n’importe quel RPG !

Au final, Etrian Odyssey Nexus est la meilleure lettre d’adieu à une série que j’adore de tout mon coeur. Même si la structure fait que le jeu peut paraître répétitif, le sentiment d’être constamment récompensé pour nos efforts rend l’expérience tout aussi accrocheuse que diablement addictive. Couplez ça aux options de customisation tellement nombreuses que ça frise l’indécence ainsi qu’à une bande-son légendaire et vous avez un véritable gouffre à temps qui peut être tout aussi zen que stressant selon l’utilisation que vous en faites.

Si vous cherchez un RPG avec un peu plus de mise en scène et de panache, il existe pas mal d’autres options (dont normalement Persona Q2 : New Cinema Labyrinth, qui est un spin-off d’Etrian Odyssey dans l’univers de Persona 5 et qui devrait prochainement arriver ici), mais si vous n’avez pas peur de sa simplicité apparente, Etrian Odyssey Nexus est un des meilleurs RPG de la Nintendo 3DS !

Et puis bon, franchement, rien que pour sa bande-son, ce jeu mérite d’être un…

Indispensable

(Même si ça reste toujours un scandale qu’ils n’aient pas inclus les Bushi… Grumpf)

Benjamin « Red » Beziat