Note : la critique qui suit a été réalisée à l’aide d’un code presse qui nous a grâcieusement été fourni.
13 Octobre 2016. 15h40 Benjamin regarde le ciel. Il fait gris, froid, mais il est heureux. Certes, il aurait été heureux peu importe les circonstances qu’il aurait fait qu’il était heureux, puisqu’il faisait gris dehors, mais cette journée est particulièrement bonne, car après des années de silence radio, il met enfin la main sur le jeu des anciens du défunt studio Cing, CHASE : Cold Case Investigations.
Cing, c’était les excellentissimes Little King’s Story, les Another Code, mais aussi et surtout le dyptique Hotel Dusk/The Last Window, deux polars intéractifs de qualité. Benjamin voulait des suites à cette série, qui nous offrait des personnages attachants et réalistes, ainsi qu’une ambiance rarement vue ailleurs… Mais, hélas, le studio dût fermer ses portes, car même si les jeux étaient tous géniaux, le piratage massif sur la portable de Nintendo couplé à une friosité des joueurs à payer pour ce genre de jeux ont eu raison d’eux.
Les années passèrent et l’espoir de les voir revenir s’amenuisait. Mais c’était sans compter sur Arc System Works, célèbres pour la série des Blazblue et visiblement des fans des jeux de Cing, puisqu’ils n’ont pas hésité à demander à l’équipe derrière Hotel Dusk de pondre un nouveau jeu d’enquêtes.
Bref, Benjamin finit de télécharger le jeu et le lance. Il est heureux.
14 Octobre 2016, 10h31. Benjamin finit le jeu. Il hurle.
Ghost Tricks
CHASE nous narre l’histoire de Shônosuke Nanase (le cousin japonais de Kyle Hyde, visiblement) et Koto Amekura deux policiers en charge de la division des affaires classées sans suites. Forcément, vu la division, nos deux protagonistes s’ennuient ferme et passent leur temps à ne rien faire. Heureusement pour eux, quelqu’un les appelle pour leur signaler qu’un accident ayant eu lieu il y a cinq ans était en fait un meurtre. Les deux enquêteurs sont suspicieux, mais décident quand même de se pencher sur l’affaire, menant sur une semaine riche en rebondissements.
Je ne vais pas aller plus loin, puisque ça serait spoiler, mais on retrouve ici tout ce qui faisait la force de Hotel Dusk : une présentation plutôt léchée et des personnages bien écrits… Enfin, pour la plupart, puisque Shônosuke est assez agaçant, notamment dans sa manière de traîter Koto, qui se fait constamment victimiser et qui n’est pas assez développée dans cet épisode pour la rendre attachante. Cependant, les musiques défoncent, le mystère est bien présent et même si un des twists peut assez vite être grillé, on se retrouve bien vite happé par cette aventure au rythme à la fois étrange et réaliste (le jeu se déroule sur une semaine, donc les mini-scènes s’enchaînent rapidement), qui hélas se termine de manière tellement brutale que j’en suis personnellement ressorti avec une furieuse envie d’aller voir les gens qui ont écrit ce jeu pour leur envoyer une chaise à la tronche et ensuite poliment leur réclamer la suite.
Car c’est aussi là tout le problème de ce jeu : il s’agit d’un prologue. Un prologue assez bien contenu pour être sa propre histoire, mais un prologue quand même. Et si on remet tout dans son contexte, il n’est pas difficile de comprendre pourquoi les choses sont ainsi faites : Arc System Works n’est pas Cing et n’a pas Nintendo themselves pour financer le jeu dans son intégralité ou prendre le risque de le faire. D’ailleurs, ce budget réduit se ressent énormément, puisque les transitions sont un poil moins soignées, les décors sont peu nombreux, le gameplay est réduit à son minimum (appuyer sur A pour lire la suite du texte et choisir des réponses dans un QCM), la traduction uniquement en anglais et il était bien évident que tout ce qui aurait concerné d’éventuels déplacements en 3D était à rayer de la carte. On se retrouve donc non pas face à un jeu, mais à un dépôt public de concept d’histoire dont le destin de ses suites ne dépendront uniquement que des gens qui seraient éventuellement prêts à investir ou non.
Vous n’imaginez pas à quel point je suis frustré par ce jeu, car j’ai vraiment l’impression qu’il est condamné à échouer alors qu’il a été créé par des mains d’orfèvres un peu fauchés devant se débrouiller avec ce qu’ils ont sous la main. On se retrouve avec un non-jeu qui n’est au final que le prologue de quelque chose de bien plus grand et qui promet d’être aussi fascinant que The Last Window et ça me mettrait en rogne si jamais on n’avait jamais la suite. De fait, je vais profiter de ce paragraphe de conclusion pour m’adresser directement à vous : si vous aimez les polars passionnants et que vous comprenez parfaitement l’anglais, n’hésitez pas à investir dans CHASE, car oui, il est évident que ce jeu est un appel aux investisseurs que nous pouvons être. Aussi, si vous n’y avez jamais joué et que vous êtes un peu sceptiques, faites le duo Hotel Dusk/The Last Window sur Nintendo DS. Ça doit se trouver maintenant pour une bouchée de pain et ces jeux sont tellement bons que vous comprendrez pourquoi il faut donner votre argent à Aksys et Arc System Works, car je suis persuadé que eux aussi veulent financer la suite de CHASE, mais ils ont besoin de la confirmation que le public est là, car eux aussi sont des développeurs/éditeurs assez instables financièrement. Bref, pour le bien des jeux vidéo matures et réalistes, n’hésitez pas à investir dans ce jeu. Ça dure certes 1h30, mais ça reste une bonne heure et demie de suspens et d’intrigue et pour 6€, soit le prix à tarif réduit d’un ticket de cinéma, on peut trouver largement pire.
Benjamin « Red » Beziat