S’il y a bien quelque chose que j’ai découvert au fil des années, c’est qu’être pote avec beaucoup de gens, c’est cool. Mais être pote avec des gens qui font des choses, ça l’est infiniment moins. Surtout quand on doit ensuite faire la critique des choses qu’ils font et encore plus quand lesdites critiques sont exposées au reste du monde. On peut aussi leur pardonner pas mal de choses que d’autres trouveraient inacceptables et donc on se retrouve dans une position très délicate. Où il faut à la fois offrir un jugement sévère là où il le faut, mais juste et surtout justifié, histoire aussi que ceux qui se font critiquer ne le prennent pas mal et puissent prendre en compte les remarques pour leurs prochains efforts.
(En tout cas, niveau accueil, on ne peut pas faire mieux. – Photographe inconnu)
Donc, comme vous l’aurez compris, je m’entends très bien avec quelques personnes du staff de Mandora et Lenno. Ils m’ont fait confiance en m’offrant un pass qui me permettait de me faufiler plus ou moins n’importe où, n’importe quand (sauf la Foire Internationale juste à côté et le carré VIP où était visiblement dressé un beau buffet… Auquel je n’aurais probablement pas touché même si j’y avais accès, puisque je ne me considère vraiment pas comme méritant de ce genre de choses), couper la plupart des files d’attentes et accessoirement profiter du festival sans payer d’entrée. De plus, et c’est aussi un autre point très important : tous les festivals organisés sur Bordeaux sont automatiquement cool pour moi, puisque même si rien d’intéressant n’arrivait, je pourrais passer du temps auprès de potes que je n’ai pas vus depuis une éternité.
Est-ce que ça veut dire que j’ai trouvé que le Bordeaux Geek Festival ne proposait pas des choses intéressantes ? Non. Juste que j’ai profité d’une partie de ces quatre jours pour passer du temps avec des amis et des proches.
Parce que niveau choses à faire, ce n’était pas nécessairement ça qui manquait : il y avait tout un côté dédié à l’eSport, un autre (plutôt vaste) aux jeux de plateau, un autre où des micro-tournois avaient lieu, un (trop*) gros espace dédié aux boutiques (dont une bonne partie vendaient des hand spinners par dizaines, ce qui était à la fois drôle et inquiétant car on aurait dit une histoire du Disque-Monde devenant réalité) et quelques espaces un peu « outsider », notamment une exposition de Playmobils, de la canne de combat transformée pour l’occasion en démonstration de combat de sabres laser de Star Wars (car il faut savoir que ces derniers sont basés sur ce véritable sport qu’est la canne de combat) et tout un espace dédié aux créateurs de robots et aux inventeurs. Il y avait aussi des espaces dédiés aux conférences, aux dédicaces et aux développeurs indépendants (mais j’y reviendrai un peu plus tard).
* Je dis trop grand, parce que forcément, être envahi de boutiques quand on a déjà payé son entrée 15€, ça peut donner l’impression de payer pour entrer dans un centre commercial exotique, mais il faut comprendre que c’est aussi grâce à eux que le salon peut se faire. La location d’un hangar du Parc des Expositions coûte une somme assez monstrueuse (j’ai même appris que le Parc des Expositions de Bordeaux était le second lieu de ce genre le plus cher de France), surtout sur quatre jours et pour permettre à des créatifs indépendants de pouvoir montrer leur art, ces plus grosses boutiques payent leur place une somme assez élevée. C’est un véritable jeu d’équilibriste qui se joue là, où il faut suffisamment de boutiques pour permettre de payer la location des lieux, mais où il n’en faut pas trop pour offrir au visiteur une bonne impression finale.
(Photographe Inconnu)
Cependant, et c’est peut-être mon côté « vieux briscard d’la convention » qui fait ça – à force de faire trois à quatre salons par an depuis maintenant six ans (aïe) – j’ai eu la sensation qu’il manquait une certaine cohésion à l’ensemble, ainsi que du punch. Il y avait des conférences, mais il s’agissait rarement de sujets qui donnaient vraiment envie d’y assister. Peut-être qu’elles étaient bien, mais leur accroche manquait d’assez de mordant pour que je veuille plaquer tout ce que je voulais faire à ce moment précis pour y assister. De plus, même si les vidéastes étaient bien utilisés, avec des rencontres spéciales organisées, du côté des autres invités, ça pêchait pas mal. Un ami à moi fan hardcore de comics déplorait la sous-exploitation des dessinateurs venus pour l’occasion. On avait des dessinateurs de DC et de Marvel présents pour signer des autographes, mais j’aurais été curieux de les entendre donner une conférence sur ce que ça fait de bosser avec ces géants de la publication et de comment un artiste peut faire pour entrer chez eux (non pas que je veuille faire ça, mais pour les jeunes artistes, ça peut offrir un gain de motivation considérable). Certains invités ont aussi eu le droit à un traitement de faveur assez décevant et je pense tout particulièrement à Mathias Lavorel, que vous connaissez bien si vous regardez Game One : pour la petite histoire, il y avait plusieurs espaces de dédicaces. Un pour les dessinateurs de comics et deux sous la tente. Le truc, c’est que l’un des deux était très bien indiqué avec plein de logos et gros posters contre une paroi, tandis que le second passait tellement inaperçu avec ses trois pauvres feuilles blanches aux noms des invités collés sur un mur tout aussi blanc et des tables tellement vétustes qu’elles auraient pu être posées là sans raison que je suis tombé dessus par chance. J’ai littéralement passé tout mon samedi matin à essayer de trouver Mathias pour pouvoir l’inviter au Quizz des Gamers, sans succès, puis l’ai trouvé peu après le Quizz assis à sa table sans personne pour le voir. Il s’en est suivi une conversation fascinante et passionnante d’une vingtaine de minutes ininterrompue, au point que je ne peux que vous conseiller d’aller le voir la prochaine fois qu’il participe à un salon, parce que si le milieu de la télévision et de l’écriture centrée sur le jeu vidéo vous intéresse, vous ne verrez plus le temps passer.
Un autre détail curieux souligné par ma compagne était que « le salon était super petit ». Cette réflexion me semblait assez étrange, puisque en comparaison avec l’an dernier, cette édition était tout aussi grande, mais je me suis bien assez vite rendu compte qu’elle n’avait pas tort, puisque je me suis vite rendu compte que l’on avait fini assez rapidement d’en faire le tour. Dans un sens, pour ce qui est arrivé le premier jour, ce n’était pas un mal, mais la façon dont tout était arrangé (et le fait qu’il y ait autant de grandes scènes) donnait effectivement l’impression que tout était plus petit.
(Photo officielle. Photographe inconnu)
Et me voilà arrivé au point où je vais devoir sortir les phrases qui ne vont vraiment pas faire plaisir, et ça concerne la sécurité et d’un certain couac d’organisation qui aurait du être évité. Je ne vais pas entrer dans les détails, puisque ça relève du privé, mais ma compagne s’était légèrement blessée le premier jour. Rien de grave, mais c’était quand même quelque chose qui nécessitait de faire un tour à l’infirmerie.
Il s’est passé trente minutes entre le moment où l’incident a eu lieu et celui où elle a été prise en charge.
On va passer outre le fait que l’on a été pas mal stressés par cet événement, mais l’infirmerie n’était indiquée nulle part. Il nous a fallu faire plusieurs fois le tour du salon pour trouver des membres du staff, qui nous redirigeaient vers d’autres membres du staff, que l’on devait trouver dans la foule, pour enfin être redirigés vers le point presse pour que l’on nous appelle la croix rouge, qui a dépêché une ambulance, causant un petit mouvement de foule au passage. C’était particulièrement stressant et je dois avouer qu’écrire ces lignes ne fait que ressasser des souvenirs assez désagréables. Après, je ne veux clairement pas critiquer le staff, qui était plus qu’agréable et prêt à aider pour tout et n’importe quoi, mais l’absence d’un poste de secours clairement indiqué sur un plan ou qui aurait été communiqué à l’intégralité du staff relève de l’incompréhensible. C’est le genre de réalité auquel je n’avais pas fait attention avant que ça nous arrive, mais maintenant que j’en ai fait l’expérience, j’en demande aux organisateurs de faire de la prise en charge des incidents sur les personnes une priorité, car si ça n’avait pas été nous, ça aurait pu être quelqu’un d’autre. Et ça aurait pu être plus grave.
Et, pour certains, ça l’a été. Pour le coup, ce n’est aucunement la faute de l’organisation, et ça relève entièrement de la malchance : le soleil.
Cette édition du Bordeaux Geek Festival aurait pu être une campagne de publicité pour les rôtisseries du Bassin d’Arcachon tant il faisait chaud. La chaleur était écrasante dehors et étouffante dedans. Tellement étouffante que l’on a pu voir l’ambulance aller et venir quelques fois à cause des cas de malaises multiples. Heureusement, le hangar était climatisé du mieux que possible, faisant que contrairement à ce que l’on aurait pu croire, il faisait beaucoup plus chaud dehors que dedans… Sauf sous les tentes, où avaient lieu les dédicaces des vidéastes, les démonstrations de jeux indépendants, l’archery tag (qui au passage est hyper fun, même si j’ai fait la stupide erreur de faire une partie le premier jour et donc passer les jours suivants avec des courbatures monstre, me faisant ressortir une canne dont je n’avais plus eu l’utilité depuis un sacré bail) et les conférences.
Là-dessous, la chaleur était absolument insupportable et je plains les personnes qui devaient y rester toute la journée. Là où une certaine chose me met mal à l’aise, c’est que le deuxième jour, certaines personnes ont ramené leur propre ventilateur, ou ont déclaré dire qu’ils allaient au centre commercial situé à un kilomètre de là pour s’en acheter un. La solution côté organisation les premiers jours ont été de légèrement ouvrir les tentes pour essayer de laisser l’air entrer, mais niveau efficacité, c’était loin d’être parfait. La différence était minimale, tant et si bien que mon séjour à l’intérieur le vendredi après-midi n’a duré que dix minutes, finissant dans la sueur et l’envie de boire une bouteille d’eau entière. Après, je ne vais pas dire que le staff n’a rien fait, puisqu’ils faisaient régulièrement des rondes pour fournir des bouteilles d’eau à qui en voulait bien et la climatisation était de plus en plus forte dans le hall principal au fil des jours (au point que la différence de températures entre l’intérieur et l’extérieur m’a achevé le dimanche après-midi), mais il aurait fallu trouver un moyen plus efficace de rendre les tentes vivables.
Enfin, et c’est le dernier point négatif que je vais soulever pour éviter que cet article ne fasse quinze pages : la scène eSport. Elle servait non seulement à montrer les différents tournois, mais aussi à accueillir diverses animations, comme le Quizz des Gamers, qui est une animation qui remporte toujours un assez gros succès quand il y en a un. Le problème, c’est que l’on était au courant des animations qu’au moment où ils avaient lieu. Le planning n’indiquait rien et le site encore moins. Je n’étais au courant de la tenue d’un Quizz des Gamers que le premier jour, quand j’ai demandé aux personnes qui l’organisaient s’il y en avait un (je croyais que ça n’avait pas été validé par le staff avant de leur demander). Et visiblement, personne n’était au courant en dehors des habitués, puisque j’y ai retrouvé pas mal de personnes que je connais des Quizz lors de la première session et le public n’était pas aussi grand qu’il n’aurait du l’être. Après, il n’a fait que grossir au fil de la session (et j’ai fini acclamé par une foule assez importante comme d’habitude ♫), puisque les curieux se sont arrêtés en voyant de l’animation. Et pour les compétitions du style Street Fighter V, Overwatch ou League of Legends, c’était là-aussi au pif total.
(Désolé pour la photo floue, mais voici une des rares tirées du Quizz des Gamers de cette année… Et oui, comme d’habitude, je suis incapable de rester sérieux sur des photos de ce genre.)
Mais revenons sur un point que j’ai particulièrement apprécié : la présence des développeurs indépendants. Même si une bonne partie était cantonnée aux tentes, il y avait pas mal de beau monde. Que des têtes déjà vues lors de l’Animasia, avec le Headbang Club et son très métal Double-Kick Heroes, qui devrait sortir cet été pour nous faire tuer des zombies en rythme avec la musique, Primal Seed, qui nous présente le lugubre Forsake the Grave, une sorte d’Overlord/Pikmin-like où l’on ressuscite nos adversaires pour en faire nos alliés et Novabox, qui nous faisait la démonstration d’Along the Edge, un visuel novel adulte sorti l’an dernier et qui bosse actuellement sur un spin-off à Orphan Age en collaboration avec Black Flag Studios, qui était étrangement absent de l’événement. Idem pour Motion Twin, qui aurait pu faire la démonstration de Dead Cells, sorti quelques jours avant le BGF et Manufacture 43, même si pour eux, je sais que leur absence était due à un voyage au Japon pour montrer Pawarumi au BitSummit qui s’était tenu la semaine précédant cet événement.
Mais ce n’était pas tout, puisque planqué au frais dans l’espace Makers, qui abritait les inventeurs et diverses écoles, on avait le très jeune studio Legio Corp, issu du campus bordelais Ynov, venu présenter un prototype de jeu nommé Drenay Arena. Le principe était très intéressant, car le joueur pouvait construire son propre « golem » pour le faire combattre celui créé par son adversaire. Prototype oblige, les golems ne ressemblaient qu’à un amas de carrés se battant sur un fond gris, mais chaque carré avec une propriété spéciale (déplacement, attaque, défense et points de vie) et le but était de bondir partout et s’écraser contre son adversaire avec le plus de force pour le démonter pièce par pièce. C’était simple, mais on pouvait y entrevoir une certaine profondeur qui pourrait déboucher sur un jeu intéressant. En tout cas, parce qu’il n’y avait aucun équilibrage, ma forteresse de Lutricia faisait des miracles ♪ L’univers semble déjà pas mal élaboré et je suis ressorti de cette rencontre plus qu’intrigué.
(Image tirée du compte Twitter officiel du projet Drenay)
Enfin, et c’est juste un point que je ressortirai à l’occasion de la sortie future de mon « Petit Guide de Survie en Convention » à paraître dans les prochaines semaines, quatre jours, c’est cool, mais c’est un peu trop, au point que j’ai du partir beaucoup plus tôt que prévu (et rater systématiquement les conférences qui m’intéressaient car se déroulant toujours en fin de journée). J’étais une véritable loque humaine le dimanche, tant et si bien que même ma canne n’arrivait plus à supporter mon propre poids et mes genoux hurlaient à la mort. Heureusement qu’il y avait un canapé plus que confortable sur lequel décéder dans l’espace presse, car plus le temps passe, plus ce genre d’événement me casse physiquement. Bref, prenez le temps de vous poser. Surtout si vous faites les quatre jours à la suite, ou plus de deux jours.
Au final, même s’il y a bien quelque chose sur laquelle le staff va devoir bosser activement dans les prochains mois, c’est bel et bien la Clarté. Clarté aussi bien sur les plans et les plannings que la mise en avant de ses invités et aussi et surtout d’un point de vue santé pour éviter des incidents qui auraient potentiellement pu être plus graves. Sur le facteur humain, il n’y a rien à redire. Les conventions de Mandora/Lenno font toujours partie du haut du panier en ce qui concerne l’humanité et la bonne humeur et je suis toujours heureux de voir les membres du staff être toujours aussi motivés et prêt à aider les personnes en difficulté. Il y avait pas mal de choses à faire pour ceux qui n’ont pas l’habitude de faire des salons, ce qui était plutôt cool, mais je souhaite que les prochaines éditions du BGF et d’Animasia prennent en compte les remarques faites ci-dessus, car même si le BGF a pas mal rattrapé le coup par rapport au dernier Animasia, j’ai encore eu le droit à quelques échos négatifs ici et là ces derniers jours et les gens ont encore en mémoire le bad buzz causé par l’événement d’Octobre dernier. Il faut vraiment que le prochain Animasia gagne en fougue, hargne et mordant, autrement je sens que d’autres organisations se feraient un plaisir de piquer ce tapis qu’est le Parc des Expositions sous vos pieds. J’ai un très mauvais pressentiment là-dessus et je ne souhaite vraiment pas de le voir devenir réalité, car comme dit plus haut, Lenno/Mandora possède une des rares conventions de très grande envergure qui soit aussi humaine.
(Oh, et si vous pouviez inviter Hiromu Arakawa (FullMetal Alchemist) ou Kohei Horikoshi (My Hero Academia) pour un Animasia à venir, je vous bénirai plus que jamais. Just sayin’)
Benjamin « Red » Beziat