Vous le savez tous : c’est quand on s’amuse le plus que le temps se joue de nous, raccourcissant les journées de manière presque surnaturelles pour que notre bonheur disparaisse au plus vite.

Je n’ai pas vu les trois jours d’Animasia passer. Il y a certes eu quelques petits moments de vide, ou bien des moments de pause nécessaires pour m’éviter de m’écrouler en plein salon, mais lorsque je suis sorti du salon une dernière fois pour rentrer chez moi le dimanche, je n’ai eu qu’une pensée : déjà fini !? Sérieux ?

Bref, je pense que vous l’aurez compris. J’ai passé un excellent moment à Animasia cette année. Et même s’il y a eu des micro-problèmes non liés à l’organisation, tous les problèmes que j’avais évoqué les années précédentes ont été corrigés !

Le salon en lui-même

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Virons de suite les micro-problèmes : la chaleur était assez peu supportable le samedi. Pour le coup, on peut remercier le réchauffement climatique qui nous a offert un joli 30°C à l’extérieur en plein milieu d’Octobre, se répercutant en des températures à l’intérieur bien supérieures. Couplez ça à l’humidité produite par le corps humain, multipliez ça par le grand nombre de visiteurs et vous comprendrez que des pauses à l’extérieur étaient souvent nécessaires pour éviter de se dessécher comme un pruneau. C’était d’ailleurs une chance que le Parc des Exposition possède un assez grand nombre de portes menant à l’extérieur, et ce des deux côtés du bâtiment.

L’autre micro-problème est lié à la popularité du salon : comme d’hab’, il y a foule et donc la circulation des allées peut être légèrement compliquée. Bon, faut dire aussi que les groupes de personnes restant plantées comme des piquets au beau milieu des allées pour discuter et s’offensant presque quand on leur demande de se décaler n’aidait pas beaucoup. Cependant, et tout naturellement, le gros des bouchons se faisait là où l’on pouvait trouver de quoi manger.

Après, ce problème n’était pas si important qu’au BGF, puisque, et c’est le premier gros point positif, la disposition des stands rendait la circulation plutôt facile et offrait des solutions de repli si nécessaire. De plus, le regroupement par thèmes était une sacrée bénédiction et leur variété faisait que l’on pouvait facilement trouver son bonheur ! Les développeurs indés d’un côté, les artistes indé de l’autre, un espace lié au thème de cette édition (le Japon), les commerces réunis au centre, les espaces de tournois et essais de jeux vidéo et de plateau plus populaires vers le fond et les restaurants pas loin des portes pour permettre aux gens de se poser dehors après avoir récupéré leur commande. Il y avait certes quelques anomalies ici et là avec un ou deux artistes indés placés en dehors de leur espace, mais de ce que j’ai compris dans un des cas, c’était lié à une décision de l’artiste de venir plus ou moins à la dernière minute et donc elle avait eu un des derniers emplacements libres.

L’autre gros point fort, c’est qu’en dehors des activités offertes par les stands individuels, la programmation faisait qu’il n’y avait aucun temps mort. Quatre scènes et salles de conférences offraient chacun des animations toutes les 45 minutes et en dehors de rares trous, les programmes de chaque espace faisaient qu’il y avait toujours quelque chose à voir et la variété offerte faisait que même si un individu n’allait pas forcément passer tout son temps là-bas, il y avait de tout pour tous les types de nerds que nous sommes.

Mon expérience du salon

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(Featuring Dina, qui a mis le feu à la scène deux jours consécutifs !)

N’étant qu’un simple humain et n’ayant pas les pouvoirs des personnages de mes livres, je ne pouvais pas assister à tout, ni tout essayer, mais j’ai fait mon maximum pour pouvoir couvrir un maximum de choses tout en essayant de ménager ma santé quelque peu défaillante.

Pour le coup, mon expérience d’Animasia a eu lieu un jour avant la majorité des visiteurs car j’avais été convié à une journée pre-show de l’Indie Game Factory destinée aux professionnels, mais aussi et surtout les développeurs indépendants. Au programme : un après-midi de conférences avec des thèmes tous plus intéressants les uns que les autres allant de l’importance de la narration/la différence entre narrative designer et scénariste, le financement via le CNC et la région, l’importance de la musique (ainsi qu’un moment où ça a failli tourner en émeute lorsque la SACEM est entrée dans l’équation), les outils de programmation (que je dois avouer n’avoir pas vraiment suivi parce que j’étais déjà au bord du décès physique et parce que la programmation est ma bête noire) et la communication. Toutes les conférences étaient animées par un FibreTigre en feu et les invités étaient très pertinents dans leurs propos. J’ai même eu l’occasion d’ajouter ma pierre à la conférence sur le financement en expliquant les choses à ne pas faire lorsque l’on lance une campagne de crowdfunding (faut bien utiliser ses échecs comme fondations pour les succès futurs des autres et de soi, après tout).

La journée s’est clôturée sur une rencontre autour de la table et même si mes skills en matière de social frisent toujours le néant absolu, rencontrer de nouvelles têtes et revoir d’autres était plus que sympathique. Après tout, comme dit dans une des conférences, le milieu du jeu vidéo indépendant ne peut véritablement survivre que par l’entraide et il est important de connaître les autres équipes pour pouvoir les aider et être aidé en retour, histoire de gagner du temps et aussi et surtout ne pas perdre trop d’argent (en plus de ne pas se sentir trop seuls, bien entendu).

Durant cette soirée, il y a également eu la remise des IGF Awards, récompensant les meilleurs projets de l’année. Ainsi, à la meilleure direction artistique, le très beau Unspoken Chronicles Nora du studio Howly Games a été récompensé. Notez d’ailleurs que ce jeu est actuellement à la recherche de fonds sur Kickstarter et je ne peux que vous encourager d’aller y jeter un oeil.

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(Exserv, Fibretigre, Moodie et Nat’Ali nous donnant des conseils pour dominer le Twitch Game)

Le second prix était celui du meilleur jeu, décerné à Nova Box pour le très beau Seers Isle. Un visual novel sorti le mois dernier ayant connu un joli succès critique et qui, je l’espère, sortira un jour sur une certaine console de Nintendo à l’avenir. J’en ai discuté avec le directeur du studio et la possibilité n’était clairement pas écartée, même si le focus reste placé sur leur prochain projet.

Enfin, le troisième prix était le coup de coeur du jury, décerné au Studio Tako pour le jeu Minimal Move, que j’ai pu essayer sur le salon. Ce jeu est un puzzle game particulièrement inventif et jouable en co-op où chaque joueur incarne un personnage capable de manipuler certaines plateformes. L’un peut les faire monter, tandis que l’autre peut les faire pivoter. C’est assez difficile, mais très stimulant. Et là encore, j’ai pu en discuter avec un des développeurs et une version Nintendo Switch n’était pas écartée de l’équation.

Un autre prix destiné au meilleur projet étudiant a été décerné le dimanche et j’étais particulièrement heureux de voir qu’un de mes amis en était à l’origine. Gravity Knights est un runner compétitif où l’on choisit entre huit coureurs aux apparences variées. L’objectif est d’être en tête de la course pour remporter un maximum de points tout en faisant gaffe aux trous dans le sol et le plafond car comme son nom l’indique, on peut changer la gravité à tout moment. Le jeu est très fun et pourrait potentiellement sortir sur Steam dans les prochains mois.

Tant qu’à faire, je vais continuer dans la lignée des jeux en parlant des deux autres projets que j’ai pu voir/jouer directement sur le salon avant de parler du reste de mon expérience.

Ainsi, le dernier jeu indé que j’ai pu essayer était Onima de Ratel Studio. Pour le coup, il ne s’agissait que d’un prototype pour montrer le concept du jeu, car la vraie vie est le pire ennemi de la création artistique et ses développeurs n’ont pu concrètement bosser dessus que quatre/cinq mois, donc il y avait pas mal de bugs et la caméra était très capricieuse.

Onima est un jeu de plateforme jouable à deux où notre personnage peut se transformer à l’envi en animal ou en hybride, sachant que la forme humaine lui permet de franchir les obstacles et la forme animale de frapper les monstres (j’ai oublié ce que faisait la forme hybride, pour le coup). Pour le coup, vu la nature du platforming, j’aurais envie de die qu’il s’agit d’un épisode de Prince of Persia mélangé à Animorphs et je me sens vieux pour avoir casé cette référence obscure… Dans tous les cas, vu le concept, je suis très intrigué et curieux de voir comment le projet va évoluer dans les prochaines années.

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Alain Juppé est même venu visiter le salon !

Le dernier jeu vu, je l’attendais depuis son annonce avec grande impatience et je suis très heureux de voir que le festival Animasia a eu la primeur d’une démonstration de gameplay publique live en avant-première mondiale !

A Plague Tale : Innocence est le dernier bébé du studio Asobo, édité par Focus et sortant en 2019 sur PS4, Xbox One et PC. La démo nous montrait un extrait du cinquième chapitre. On y suit un groupe de trois enfants devant se frayer un chemin dans notre bon vieux Sud-Ouest de la Guerre de Cent Ans (donc pas loin de Saint-émilion et Castillon-La-Bataille), au beau milieu des cadavres, de la peste noire, des Anglais et des rats… Des très nombreux rats.

Je ne sais pas comment se profilera le jeu final, mais cette portion du jeu était très linéaire et faisait pas mal penser à du The Last of Us dans sa manière de faire les choses. Ainsi, même si les ennemis sont très peu nombreux (à l’exception des rats), tous ont la possibilité de nous faire passer un très mauvais moment du fait que l’on incarne que des enfants (en y repensant, avec A Plague Tale, Orphan Age et les Chroniques de Loutre-Monde, je sais pas ce qu’on a à Bordeaux avec les enfants, mais je remarque qu’on aime beaucoup les mettre dans des situations extrêmes…. Hum). Le seul moyen de se défendre vient de la fronde que transporte l’aînée du groupe, avec laquelle elle peut dégommer des obstacles, allumer des torches à distance, voire même détruire celle des adversaires pour leur priver de la seule lumière les protégeant de rats tellement affamés qu’ils attaquent en masse tout ce qui bouge.

Peu après la présentation du jeu, il y a eu une session de questions/réponses et l’on a pu apprendre que le jeu durera une douzaine d’heures, sera très certainement PEGI 18, que, même si le côté reconstitution historique de l’Aquitaine médiévale a été assez poussé, pour les besoins du jeu et de son histoire il y aura tout de même une grosse part d’invention et, pour répondre à une de mes questions, il n’y aura probablement pas Rémy de Ratatouille (Asobo ayant développé beaucoup de jeux pour Disney, dont Ratatouille en plus d’applications pour l’Hololens et le très sympathique Fuel sur Xbox 360 et PS3).

Comme dit pas un des développeurs, le jeu mettra surtout en avant sa dimension narrative et promet un conte macabre légèrement horrifique sur les bords et j’ai vraiment hâte de jouer au jeu lorsqu’il sortira.

Enfin, pour clôturer la partie jeu, j’ai aussi eu l’occasion de discuter un peu avec les développeurs de Primal Seed, qui développe le prometteur Forsake the Grave. Le développement avance bien, même si le destin du projet dépendra surtout de s’ils parviennent à trouver un éditeur capable de les aider financièrement pour tout boucler.

Côté Manufacture 43, le très cool Pawarumi dont j’ai parlé à plusieurs reprises est sorti il y a quelques temps, mais ce n’est pas la fin pour autant, car une version consoles est en préparation pour la première moitié de 2019. Si une chose est certaine quoi qu’il arrive, c’est que vous reverrez ce nom assez prochainement sur ce site !

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Enfin niveau conférences, je n’ai pu assister qu’à l’une d’elles, mais c’était très certainement la conférence la plus riche en rebondissements et en annonces folles.

Ainsi, Benzaie nous a révélé ses nouveaux projets. Le premier se nomme Hard Looters et est réalisée en collaboration avec Mr Quaraté et Guillaume Dorison. Tournée au Japon, cette série en quinze épisodes et diffusée début 2019 consistera en une chasse aux trésors cachés. Visite de boutiques de jeux obscures et tour des brocantes, il nous a été promis pas mal de surprises et de bons moments pour les fans de retro gaming.

Le second projet, lui, est encore plus fou, puisqu’il s’agit d’une série de documentaires sur Street Fighter V en cours de tournage racontant le périple de Benzaie allant du bas de l’échelle jusqu’au tournoi du Red Bull Kumite qui aura lieu en Novembre prochain. Le twist ?

Il n’a commencé qu’à sérieusement jouer au jeu il y a trois mois !

De ce que l’on sait, il a passé le premier mois directement au Japon à s’entraîner avec les meilleurs joueurs au monde et n’a presque cessé de jouer depuis. Arrivera-t-il au moins dans le top 100 lors du tournoi Last Chance la veille de l’événement ? Pour le coup, on le saura en direct et je suis très curieux de voir le résultat. Les premiers épisodes de ce documentaire débarqueront le 27 Octobre sur YouTube.

La dernière surprise de cette conférence était l’apparition non programmée de Bob Lennon en plein milieu, surprenant même le staff du salon et résultant en une interview particulièrement drôle à base de parallèles entre Benzaie et Sacha du dessin animé Pokémon. Bref, c’était une conférence en roue libre qui nous a vraiment bien amusé.

Enfin, ce tour d’Animasia ne serait rien sans le classique tour du côté des artistes indépendants. Ils étaient nombreux et il y avait beaucoup de goodies uniques à ramasser ici et là, voire de commandes à faire… Ce que je n’ai pu m’empêcher de faire en commandant un joli petit Desmond Almundi des Chroniques de Loutre-Monde à Adlynh.

Desmond by Adlynh Mini 2

Au final, je pense que vous aurez compris que mon expérience du salon cette année a été plus que positive ! Les soucis du BGF ont été entièrement gommés et le fait qu’il se passait tout le temps quelque chose quelque part faisait que l’ennui n’a jamais vraiment pointé le bout de son nez. Et pour une fois, je peux affirmer que le fait que ce festival soit situé dans ma ville n’a pas pu biaiser mon jugement (bon ok, probablement un peu, mais pas autant que les années précédentes). Animasia a vraiment trouvé son rythme de croisière et ça, c’est cool !

Benjamin « Red » Beziat