Si vous suiviez l’actualité aux alentours de l’E3 2015, Square Enix avait annoncé durant sa conférence pré-E3 la création d’un studio dédié à la création de RPG typés rétro pour tenter de reproduire le « succès surprise » (d’après eux) de Bravely Default. En guise de figure de proue de ce studio sobrement appelé Tokyo RPG Factory, un jeu développé pour la PS4 et la PS Vita nommé I Am Setsuna.

Le développement aura duré au moins une bonne année et demi, faisant que durant le bilan de Square Enix de l’année fiscale 2015-2016 s’étant arrêtée en Mars dernier, Siliconera nous relaye que la boîte annonçait des pertes sèches de 244 millions de yens, soit un peu plus de deux millions d’euros. Alors certes, ça peut paraître peu, mais pour un jeune studio, ça peut envoyer de très mauvais signaux aux investisseurs, qui peuvent potentiellement ne pas voir ces pertes sèches d’un très bon oeil.

On pourrait dire « Bah ça va, I Am Setsuna n’est pas sorti durant cette période, donc bon, les coûts de dev’, on s’en cogne un peu, non ? »

Le jeu est sorti au Japon en Février dernier sans aucune véritable publicité et y a fait un flop modéré en ne se vendant « qu’à » un peu plus de 60 000 exemplaires. Donc le jeu n’est pas rentré dans ses frais dans son pays natal et a été considéré un échec lorsque comparé aux autres jeux de la boîte.

Cela n’aurait pas été particulièrement grave quand on considère que ce jeu s’adressait en majeure partie au marché américain et européen, bien plus enclin à consommer des RPG rappelant « l’âge d’or » de Squaresoft/Enix/Quintet et consorts, mais le jeu n’est sorti uniquement qu’en dématérialisé sur Steam et sur PlayStation 4 (la version Vita ayant été abandonnée parce que souffrant de ralentissements ignobles) pour 40€ sans aucune publicité, faisant que pas mal de gens ne se sont pas rendus compte que le jeu est sorti il y a deux semaines. Et c’est là que ça coince, puisque le titre est plus ou moins en train de faire un bon gros bide.

D’après le site Steam Spy, le titre n’a pas dépassé la barre des 23 000 exemplaires vendus. Alors certes, Steam Spy n’est pas non plus hyper fiable, mais reste un relativement bon indicateur, si on y met une marge d’erreur de 10% et même en prenant en compte ce paramètre, on se rend vite compte que ça ne sent pas bon. Pour ce qui est des ventes PS4, on peut imaginer que ça reste meilleur, mais m’est avis que ça n’est pas significativement meilleur. Dans tous les cas, quelque chose me dit que l’on arrivera pas à dépasser la barre des 150 000 exemplaires avant quelques mois au moins.

Pour le coup, je n’ai pas eu l’occasion de jouer au jeu, mais les retours que j’en ai eu sont globalement assez positifs. Pas mirobolants, mais de ce que j’ai pu tirer des critiques, ça reste quand même un bon trip rétro avec un semblant d’âme. Donc je ne peux vraiment pleurer en voyant ces données, mais, au fond… Bah quand même un peu pas mal, puisque ça montre le degré d’implication de Square Enix, qui visiblement se dit que ça ne sert à rien de promouvoir « un jeu condamné d’avance ».

Bravely Default a été un « succès surprise » pour la seule et unique raison que les gens voulaient une expérience rétro et que son annonce avait créé une agitation médiatique telle que ça a incité Square à en faire la promotion. Bravely Second, lui, semble avoir un peu moins bien marché pour la simple raison que Default possédait un défaut particulièrement aggravant et Second est tombé dans l’exact même piège… Mais Bravely Default avait marché grâce au pouvoir de la hype et du marketing un minimum impliqué.

I Am Setsuna aurait pu sûrement connaître un succès similaire si Square Enix s’en était donné la peine. Mais non. Le jeu avait été annoncé un peu par dessus la jambe au terme d’une conférence pré-E3 particulièrement mauvaise (les annonces étaient pour la plupart cool, mais le rythme rendait tout absolument ennuyant) et ensuite il a été balancé sur le marché sans presque aucune véritable ferveur. Le jeu m’intéresse, et depuis son annonce je n’ai vu en tout et pour tout qu’un seul trailer, et c’est juste parce que je l’ai vu tomber sur mon feed durant ce dernier E3. Mais en dehors de ça, rien.

Le sortir en boîte, même à très peu d’exemplaires, aurait pu vraiment bénéficier au titre, puisque les revendeurs en auraient fait la promotion durant une période particulièrement avare en sorties (cet été est vraiment pauvre en gros jeux), donc I Am Setsuna aurait eu un minimum de chances de succès s’il avait été proprement mis en avant… Enfin… Espérons que ce bide ne va pas envoyer le mauvais message aux investisseurs et que Tokyo RPG Factory va au moins bénéficier d’une seconde chance sans non plus être condamné à faire un jeu mobile qui sera enterré la minute où il sera balancé sur l’App Store parce que Flappy Clash Go sera sorti…

Benjamin « Red » Beziat