Après avoir interrogé Sôhei Niikawa et Yasuyuki Oda, la dernière interview menée à Japan Expo nous présentait un défi de taille : deux personnes… En même temps. Et vu que c’était un peu déséquilibré d’aller en un contre deux versus deux membres de la team derrière Yakuza (même si Kazuma Kiryu trouverait ce type de confrontation facile), nous avons décidé de mener cet entretien en tag team avec la Big Boss herself ! Ainsi, Kayane et moi avons eu la chance de pouvoir poser des questions à Daisuke Sato, producteur de la série Yakuza et figure importante de SEGA, ainsi que Takaya Kuroda, a.k.a. la voix de Kazuma Kiryu et, plus récemment, Kenshiro dans la dernière adaptation de Fist of the North Star : Lost Paradise ! Autant dire que nous étions plus que ravis de discuter avec deux personnes dont nous apprécions énormément le travail !

Kayane : La saga Yakuza est vraiment populaire au Japon, de ce que j’ai cru comprendre. Qu’est-ce qui manque pour avoir une traduction française ?

Daisuke Sato : Je ne sais pas trop comment répondre à cette question, mais… Personnellement, je suis bien conscient qu’avoir la langue française permettrait à un plus grand nombre de joueurs de pleinement profiter du jeu et évidemment, j’aimerais pouvoir le proposer.

C’est la première fois que l’on peut s’exprimer en français, donc peut-être que le message va pouvoir remonter jusqu’à SEGA !

Kayane : J’espère aussi ! *se tourne vers Mr Kuroda* Mr Kuroda, avec votre look, vous êtes vraiment dans la peau d’un yakuza et je me demandais comment s’était fait le rapprochement, la validation de votre rôle de Kazuma Kiryu ? Est-ce que c’est dû à votre look ou c’est vraiment à la voix ? Qu’est-ce qui a penché dans la balance pour votre sélection ?

Takaya Kuroda : Je crois me rappeler que je me baladais dans mon quartier favori de Kabukicho *rires* (NdlR : Kabikicho est le quartier qui a été la plus grosse source d’inspiration pour Kamurocho dans la série Yakuza) Et je me suis fait interpeller par ces gentils messieurs de chez SEGA qui cherchaient un vrai yakuza et ils m’ont attrapé dans leurs filets *rires*… Non, c’est une blague *rires*

Kayane : J’aurais pu y croire *rires*

Takaya Kuroda : *rires* Plus sérieusement, depuis tout jeune je baigne dans le milieu sans non plus vraiment y baigner : j’ai fait du karaté, je me suis musclé, etc. J’ai toujours été attiré par cet univers et j’ai approché de très près l’univers des yakuzas… Sans y entrer, je précise.

Kayane, Red & Daisuke Sato : *rires*

Takaya Kuroda : Je me suis vraiment baladé dans Kabukicho et je connais les lieux. C’était « un point positif » quand j’ai été auditionné pour la série Yakuza. Et même, sans rigoler, quand je me baladais dans les rues de Tokyo, je me faisais souvent interpeller par la police, qui me demandais à quel clan j’appartenais !

Kayane : *rires*

Takaya Kuroda : Ils me demandaient « Est-ce que tu es du clan de tel coin ou tel coin ? » Mais en fait non, je n’appartiens à aucun clan. On croyait vraiment que j’étais un yakuza. Et donc la sélection s’est faite via une opportunité un peu différente, mais j’avais déjà travaillé sur un précédent jeu de SEGA, donc le lien s’est fait tout naturellement… En tout cas, pour conclure, tout ça, c’était pour dire que l’on s’est basé sur ma voix pour faire le personnage de Kazuma *rires*

yakuza kiwami 2

Kayane : Mr. Sato, pourquoi avez-vous fait un jeu sur les yakuzas ? Est-ce que c’était pour pouvoir parler de thèmes plus matures et sérieux et des choses que l’on n’avait pas pour habitude de voir dans des jeux japonais ? Est-ce que c’était pour parler de sujets qui d’habitude sont considérés comme tabous ?

Daisuke Sato : Effectivement, la genèse du projet Yakuza provient d’une idée de Mr Nagoshi (NdlR : Toshihiro Nagoshi, qui est également à l’origine de la série Super Monkey Ball), qui voulait casser cette image du jeu vidéo destiné aux enfants. C’est pour cette raison qu’il est parti sur une thématique plutôt rare de jeux destiné aux adultes, mais en plus, c’était très intéressant car le sujet des yakuzas n’avait jamais été traité en profondeur dans les jeux vidéo. Quand on travaille dans ce milieu, il est toujours important d’avoir au moins un élément clé qui soit « nouveau » et qui permette de stimuler la créativité des équipes.

Mais avoir cette thématique a généré pas mal de problématiques, car personne ne connaissait le potentiel réel d’un jeu non seulement destiné aux adultes, mais en plus qui soit basé dans l’univers des yakuzas. On a fait face à beaucoup d’opposition de tous les côtés, que ce soit à l’intérieur de SEGA, ou bien l’extérieur. Les gens étaient critiques, en mode « mais qu’est-ce que vous êtes en train de faire ? ».

Il y a eu une grosse période de doute au lancement du tout premier Yakuza, mais Mr. Nagoshi a tenu bon, a vraiment cru en son projet et l’a porté à bout de bras pour en faire le hit que l’on connaît aujourd’hui. En tout cas, si Mr Nagoshi était là, on pourrait vous parler de ces problèmes jusqu’au bout de la nuit tant il y a d’anecdotes à raconter ! *rires*

Kayane : Je vois ! Mr. Kuroda, que pensez-vous du développement du personnage de Kazuma Kiryu ? Est-ce qu’il y a des moments où, en lisant le synopsis et les dialogues, vous auriez eu envie de lui dire « mais qu’est-ce que tu fais ? Mais non, fais pas ça ! »

 Takaya Kuroda : Pour le coup, c’est vraiment dans les moments où il aurait pu faire évoluer ses relations amoureuses que je suis le plus amer. J’aurais aimé qu’il soit un peu plus actif. Il y a notamment une scène où il est à Osaka avec Sayama et elle sort en serviette de bain de façon un peu impromptue. Il la voit et il n’ose pas trop la regarder et c’est aussi à ce moment-là qu’il tombe un peu amoureux et j’avais envie de lui dire « Mais vas-y ! C’est peut-être ta seule chance ! » et au lieu de ça il reste maladroit et complètement coincé. C’est vrai il y a un peu de ça.

Après, c’est vrai qu’après il l’emmène sortir dehors, mais ça aurait peut-être été plus intelligent de rester à la maison pour qu’il se passe quelque chose. *rires*

Kayane : Je le pense aussi !

Tout le monde : *rires*

fist of the north star lost paradise

Kayane & Red : Maintenant que vous faites Kenshiro sur Fist of the North Star : Lost Paradise, est-ce que vous voyez des ressemblances entre les personnages des deux séries ?

Takaya Kuroda : Je pense qu’il y a énormément de points communs entre Kazuma Kiryu et Kenshiro. Si je devais en citer quelques uns, c’est que les deux personnages sont peu bavards. Ils ont tous les deux une sacrée musculature. Ce sont des hommes forts, très puissants, aussi bien physiquement que mentalement. Ils ont une force mentale supérieure à la moyenne et un sens de la justice très très fort, avec cette envie de se battre pour les autres ou se mettre en danger pour résoudre une situation injuste et ils sont tous les deux très gentils et attentionnés auprès des enfants et maladroits aux alentours des femmes. Il y a pas mal de points communs entre les deux personnages.

Kayane : Ma dernière question est adressée à vous deux. Vous avez rencontré le public français aujourd’hui et hier. Qu’est-ce que ça vous a fait de voir qu’il y a énormément de fans de Yakuza ici ?

Daisuke Sato : Je suis vraiment ému. Il faut savoir que c’est la première fois que nous venons en France et donc à Japan Expo et savoir qu’il y a autant de gens en France qui peuvent être passionnés par notre travail – qui dure depuis plusieurs années -, recevoir et voir toute cette passion est quelque chose de très fort !

Takaya Kuroda : Il faut savoir que quand on fait des événements au Japon, en réalité il y a plus de femmes dans le public et les hommes se mettent généralement sur le côté, un peu moins visibles. Et là c’est tout l’inverse ! Aujourd’hui j’ai eu le plaisir de voir qu’il y avait énormément d’hommes dans le public et qui étaient vraiment fiers d’être fans du personnage de Kazuma Kiryu et de la série de manière générale. Peut-être qu’en France les hommes ressentent plus l’esprit du samouraï qui vit à travers le personnage, ses valeurs fortes d’homme qui tente de sauver le monde à sa façon. Et donc j’étais très ému en voyant ces hommes ressentir ça.

Kayane : Est-ce que vous avez des femmes amoureuses de vous parce que vous avez la voix de Kazuma Kiryu ?

Takaya Kuroda : Il y a peut-être des femmes qui tomberaient amoureux du personnage de Kazuma, mais si jamais je devais leur offrir un conseil en tant qu’acteur derrière le personnage, ce serait que ce n’est vraiment pas le genre d’homme que vous voudriez fréquenter. C’est pas le genre d’homme à tromper une femme, mais ce n’est pas non plus le genre d’homme avec qui vous passeriez beaucoup de moments amusants. Et vu que c’est le genre de personne qui s’absente très facilement au moindre problème, vous ne sauriez jamais vraiment quand il rentrerait *rires*

Kayane : J’en prends note pour moi-même !

*rires*

Kayane et Red : Merci beaucoup !

Kayane Daisuke SatoDe gauche à droite : Daisuke Sato, Kayane, Takaya Kuroda

Kayane & Benjamin « Red » Beziat