J’ai fini Kingdom Hearts III.

Encore maintenant, en écrivant cette phrase, j’ai du mal à croire ce qu’il vient de se passer. Après des années d’attente, le dernier chapitre de la saga du « Chercheur des Ténèbres » est entre nos mains et… Eh bah ça fait du bien de voir que toute cette attente était justifiée, car les faux-pas sont plutôt rares et le fun constant d’un bout à l’autre !

Et histoire de faire les choses bien, comme avec la critique de Travis Strikes Again : No More Heroes, celle-ci va commencer par la conclusion pour ne pas trop spoiler, puis j’élaborerai un peu plus dans une partie que l’on pourra considérer comme remplie de spoilers, abordant les bases de l’histoire, ce qui va et ne va pas avec elle ainsi que deux-trois trucs qui me viendront probablement en tête au fil de l’écriture de ce texte.

La Ultima Confrontazione

https://www.youtube.com/watch?v=LYqlBv5qvMQ

(Non, pas de trailers cette fois, parce que Square Enix ne s’est pas privé de montrer plus ou moins tout le jeu dans ses trailers au fil de ces dernières années, combat final inclus… Grumpf)

La première question qui vient à l’esprit est : peut-on jouer à Kingdom Hearts III sans avoir fait les épisodes précédents ? La réponse est des plus simples : ab-so-lu-ment pas ! Contrairement aux autres séries phare de Square Enix que sont Final Fantasy et Dragon Quest, Kingdom Hearts est une série dont l’histoire n’est qu’un simple fil continu… Enfin, disons qu’avant Kingdom Hearts III, ces fils étaient plus ou moins éparpillés et ce troisième épisode a pour ambition de tous les réunir pour tenter de (presque) TOUS les amener à leur conclusion. Il est possible de faire comme n’importe qui et de regarder un des très nombreux récap’ sortis sur YouTube qui tente de condenser l’histoire de la série en une trentaine de minutes, mais je pense sincèrement qu’il vaut mieux soit jouer aux deux compilations sorties sur PS4, ou au grand pire regarder des vidéos qui enchaînent les cutscenes si vous ne vous sentez pas à coeur de jouer à Re:Chain of Memories (et je vous comprends parfaitement).

Concrètement, pour tout ce qui concerne les mondes Disney, leur histoire se suffit souvent à elle-même (même si avoir vu les films adaptés au préalable n’est jamais une mauvaise idée), mais pour tout ce qui est des segments consacrés au scénario, il convient d’avoir joué à Kingdom Hearts I et II, Chain of Memories, Birth by Sleep, Dream Drop Distance, 0.2 A Fragmentary Passage et avoir vu 348/2 Days, lire un résumé de Re:Coded et surtout… Surtout avoir regardé le film Back Cover de la compilation II.8, parce que ce dernier possède des clés des plus importantes pour comprendre les motivations de certains personnages… Donc oui, en fait il est préférable d’avoir fait tout le reste de la série avant d’envisager commencer le III.

Non seulement cela vous permettra d’apprécier l’histoire pour ce qu’elle peut apporter en émotions pures, mais en plus ça vous permettra de mieux digérer un gameplay qui prend tous les meilleurs éléments des épisodes passés et qui ne va pas forcément faire le tri, résultant en un gameplay tout aussi bordélique que jouissif une fois que l’on a trouvé notre façon de jouer en plus d’être très riche en possibilités tout en ajoutant son propre système de transformations d’armes pour dynamiter d’autant plus les combats. Pour faire simple, imaginez juste que vous pouvez vous battre en faisant de simples combos, ou bien en y ajoutant des attaques spéciales qui vont temporairement vous booster, utiliser le décor pour vous propulser un peu partout (le Flowmotion), utiliser des sortes d’invocations qui changent radicalement le gameplay tout en vous offrant un gros boost de puissance, ou bien utiliser des invocations plus classiques qui vous accompagneront le temps de bien casser les rangs ennemis. Personnellement, je dois avouer que j’ai joué au jeu de la manière la plus neutre possible en n’utilisant que très peu les invocations classiques et le Flowmotion et y ai largement trouvé mon bonheur malgré tout.

Cela étant dit, dans la plus pure tradition des Kingdom Hearts, le gameplay est tellement pêchu et dynamique que parfois la caméra en prendra un sacré coup. Heureusement ça n’arrive pas trop fréquemment et le jeu est suffisamment généreux pour ne pas trop vous punir si vous mettez régulièrement votre équipement à jour avec tout ce que ça entraîne de boost de stats (sauf si vous vous mettez volontairement des bâtons dans les roues en activant la capacité spéciale qui bloque l’obtention de points d’expérience et que vous jouer en mode Fier, mais ça, c’est de votre ressort).

D’ailleurs, un petit conseil, car le jeu n’en parle pas vraiment, mais n’hésitez pas à assigner votre sort de soin au menu des raccourcis que l’on peut utiliser avec L1 (ou LB si vous jouez sur Xbox One). Les combats peuvent parfois être tellement intenses qu’éviter d’avoir à trifouiller dans les menus tout en esquivant les ennemis peut être une option qui vous sauvera la mise.

Le second seul point noir que j’ai trouvé au jeu, même si en vrai c’est simplement du pinaillage, vient de la structure ultra linéaire. D’un point de vue rythme de jeu, c’est absolument génial, puisque l’on enchaîne rapidement les scènes les plus mémorables, mais il arrivera une ou deux fois que l’on tombe sur un segment obligatoire qui décide de passer pour du semi-ouvert et ce changement précis va venir nous les briser pendant 10 à 20 minutes… Notamment une qui vous fera probablement détester Olaf de la Reine des Neiges si vous ne détestiez pas déjà cette petite abomination des neiges. Je ne vais pas plus entrer dans les détails, mais disons que ce passage pouvait être comparé au moment dans une attraction où l’on est coincé dans la file d’attente entre un môme particulièrement bruyant et un autre qui l’est encore plus alors que l’on a juste envie de faire ce fichu train de la mine d’Indiana Jones et… Disneyland me manque terriblement…

Enfin bref, j’ai mis 23 heures pour finir le jeu en ligne droite sans vraiment prendre le temps de faire les contenus annexes que je détaillerai dans la partie spoilers et qui peuvent ajouter une petite dizaine d’heures de plus au compteur. Pour un RPG, ça peut paraître court, mais pour un critique comme moi, c’est du pain béni, sans compter que dans ces 23 heures, il n’y a concrètement eu qu’une heure et demi de moins intéressante que le reste. Le reste, c’était juste un enchaînement de cutscenes, de séquences de gameplay et de boss tous plus cool les uns que les autres capable de mettre une claque à la majorité des jeux sortis ces dernières années. Certes, cette variété est aussi le résultat de l’équation bénie « long temps de développement + tonne d’argent balancée dans le projet », mais juste pour donner une idée de la chose : les trois premières heures du jeu pourraient aisément passer pour le grand final d’un jeu plus classique et ça reste quasi-constant d’un bout à l’autre !

Le dernier point que je vais aborder avant de passer à la conclusion, puis à la partie spoiler concerne la présentation, qui transpire le très gros budget alloué. Presque toutes les musiques du jeu ont été jouées par un orchestre et certaines pièces ont été écrites pour correspondre aux scènes qui se jouent devant nous, ce qui est très cool sur l’instant, mais qui rend l’ensemble un poil moins mémorable et qui fait que l’on retiendra surtout les reprises des morceaux que l’on a déjà entendu au fil de la série. Cela ne veut pas dire que les nouvelles compositions sont mauvaises, très loin de là, mais j’ai peu de souvenirs d’une musique inédite qui m’aie marqué.

Et pour ce qui est de la partie graphique, c’est juste… Fou ! J’étais assez mitigé par rapport à la transition sur Unreal Engine 4 à l’époque de 0.2, surtout pour tout ce qui est personnages Disney, mais ils s’y sont bien mieux pris sur cet épisode et on s’y fait bien assez vite. Après, vu que presque tous les films représentés dans cet épisode ont été fait en images de synthèse, c’est plutôt logique. Et pour un certain monde nécessitant un rendu plus réaliste, le résultat est carrément là, avec une impression de réel parfois très perturbante (et une sensation de loupé d’autant plus forte quand certains personnages sont un peu moins détaillés).

Au final, Kingdom Hearts III est tout ce que j’espérais de l’épisode final de cet arc qui m’aura suivi littéralement sur plus de trois cinquièmes de ma vie. C’est du pur fun tout du long en plus d’offrir une conclusion plutôt satisfaisante sur pas mal de points, permettant ainsi à la série de repartir sur des bases beaucoup plus simples pour un inévitable futur épisode. Comme dit dans le titre, je ne pense pas que j’aurai droit à un jeu qui me plaira autant cette année et il n’est pas impossible qu’il se serait placé au sommet de ma liste des jeux de 2018 s’il n’y avait pas eu ce report de dernière minute. Et comme dit plus haut, cet épisode est plus réservé à ceux qui connaissent la série que ceux qui seraient vaguement intéressés.

Après, si vous êtes fan de Disney, rien ne vous empêchera d’apprécier ce beat-them-all complètement barré et débilement fun, mais je ne peux vraiment vous le recommander qu’à la condition d’avoir au moins vu un récap’ pour comprendre pourquoi un vieux chauve aigri met le bazar au pays de Mickey… Mais je rentre un peu plus en détail là-dessus après l’image de verdict.

Bref, si vous êtes fan de Kingdom Hearts, m’est avis que vous avez déjà mis la main sur le jeu, mais, au cas où, mon verdict est le suivant :

Indispensable

Spoilers da Dolore

Pour ce qui est de l’histoire, je n’irai pas non plus dans trop de détails, mais je ne vais que parcourir les grandes lignes et parler vaguement de deux petits détails qui m’ont un peu dérangé.

Pour faire simple : après la défaite de Sora (le Naruto de Kingdom Hearts en bien plus naïf) dans Dream Drop Distance, qui a manqué de peu de succomber aux ténèbres et qui s’est vu repasser au niveau 1, notre héros doit réunir les sept gardiens de la lumière pour affronter les treize émissaires des ténèbres réunis par le vil et vieillissant Xehanort (un vieux grigou maléfique). De leur côté, Riku (le Sasuke de Kingdom Hearts, mais en mieux développé sous certains aspects malgré une backstory de base un peu bif-bof) et Mickey (Mickey) partent secourir Aqua (héroïne de Birth by Sleep), restée dans le domaine des ténèbres pendant pas loin de dix ans, tandis que Maléfique (la méchante de La Belle au Bois Dormant) et Pat Hibulaire (le rival de Mickey depuis plus ou moins toujours) sont à la recherche d’une boîte noire introduite dans Kingdom Hearts Back Cover (le film qui est sorti dans la dernière compile et qui reprend des éléments d’Union X, un jeu mobile que peu ont joué) précédemment détenue par le Maître des Maîtres (un mec chelou mais très attachant et rigolo dont on n’a jamais vu le visage) et dont le contenu est encore inconnu (parce que personne ne l’a ouverte encore). Vous avez compris pourquoi je dis qu’il est préférable d’avoir vu/joué les précédents épisodes ?

Ce qui fait la force de ce troisième épisode, c’est que presque toutes ces histoires en plus de celles introduites dans les épisodes précédents trouvent leur résolution ici… Et c’est aussi ce qui fait un peu leur faiblesse, puisque Tetsuya Nomura et son équipe ont décidé d’inclure TOUT ce que la série nous avait introduit jusqu’ici, y compris les détails les plus anodins, rendus importants ici via des justifications parfois tellement perchées et sorties d’un chapeau que l’on ne peut qu’en rire. L’avantage, c’est que les prochains épisodes pourront emprunter la voie du pur reboot et l’on n’aura pas la sensation d’y avoir perdu au change et j’espère secrètement qu’ils feront comme ça, car même si pas mal de scènes étaient ultra satisfaisantes pour les fans de longue date que nous sommes, je dois avouer que cette surabondance de choses à retenir frôlait parfois l’indigeste et l’absurde.

Là où le jeu n’était pas particulièrement malin, c’était avec l’envie de nous balancer plus ou moins cinq ou six gros fils conducteurs à résoudre et de nous en balancer un autre juste pour mettre en place la suite, car elle ne sert absolument à rien sur toute la durée de cet épisode en dehors de justifier l’absence de certains personnages, créant ainsi un gros sentiment de confusion lorsque l’on se rend compte que ce fil n’allait nulle part. Et c’est sans compter sur des révélations qui sortent réellement de nulle part pour créer un effet de surprise pseudo-rétroactif et même des gens qui n’écrivent pas d’histoires verront que cet effet ne repose que sur du vent pour se justifier dans ses développements actuels.

Après, cela ne veut pas dire que l’histoire est foncièrement mauvaise. On est plus là pour les personnages et voir un vieillard se prendre des coups de clé dans la tronche et en cela, Kingdom Hearts III atteint ses objectifs avec un certain brio. Je dois avouer que j’ai eu la larmichette occasionnelle durant certaines scènes car elles offraient ce qu’il fallait de fan-service et d’accomplissement pour être satisfaisantes, sans compter l’écriture des mondes Disney, qui est bien… Bien meilleure que dans les épisodes précédents, recréant parfois les films de C à W (oubliant le début, la fin et parfois certains éléments mineurs pour ne pas perdre en rythme). De plus, et même si c’est hélas sporadique, le jeu comporte quelques fulgurance de mise en scène dans les dialogues qui peuvent rendre certains passages incroyablement vivants. C’est assez surprenant quand ça arrive parce que le jeu nous habitue à des scènes de dialogues assez standard où les personnages bougent assez peu tout en discutant, mais quand ça devient vivant, ça y arrive de manière plutôt convaincante. Après, pour ce point, j’imagine que cela est dû aussi bien au budget que de la fatigue accumulée à écrire un scénario si important (croyez-moi, en tant qu’auteur, je dois avouer que je tombe souvent dans le même piège à force d’enchaîner les pages, au point que j’en oublie tout ce qui est langage corporel pour me focaliser sur les dialogues sans forcément penser à y retourner pour la retoucher et c’est pas un phénomène rare).

Je ne vais pas répéter ma conclusion, mais j’ai vraiment adoré le temps que j’ai passé sur Kingdom Hearts III et je suis vraiment heureux d’avoir passé ces 16 dernières années en sa compagnie ! Une histoire s’est achevée et une nouvelle commencera… Un jour. Quand ? Sûrement après que Final Fantasy 7 Remake soit terminé. Eh.

Benjamin « Red » Beziat