C’est peut-être très étrange à dire, mais alors qu’il s’agit de la série la plus immuable au monde, la série des Dragon Quest a pour particularité de toujours me prendre à revers. On dit qu’il faut toujours se méfier des apparences et à chaque fois je me fais avoir par les couleurs chatoyantes et la promesse d’aventure de ces jeux

Et même si ce onzième épisode de la série principale n’est pas le meilleur auquel j’ai pu jouer, il n’empêche qu’il s’agit purement et simplement d’un des GotY, a.k.a. un des meilleurs de cette année, dépassant de loin la concurrence avec une maturité sous-jacente qui restera en toutes circonstances élégants et ne se résoudra jamais à utiliser d’artifices utilisés par les jeux s’autoproclamant matures avec son sang, son sexe et son langage « osé ».

Bref, Dragon Quest XI, c’est un des jeux les plus matures de cette génération de consoles et je serai prêt à le défendre sous tous ses aspects… à l’exception de trois d’entre eux.

Explications.

Les Contes de la Mère Dragon

Il était une fois, dans la contrée d’Elréa, un garçon étant né sous une bonne étoile. Ce garçon avait été choisi par Ygdrasil, l’Arbre de Vie, pour être le héros qui bannirait, voire anéantirait le Mal, dont le retour n’était qu’imminent. Bien entendu, étant un futur héros, les forces du Mal eurent la bonne idée d’attaquer au plus vite et ce fut sitôt l’enfant né qu’ils se mirent à attaquer en nombre. Malheureusement pour les monstres, le nourrisson parvint à leur échapper en arrivant suite à de nombreux facteurs extérieurs au beau milieu d’un village perdu, où il fut élevé pour devenir un charmant jeune homme épris de justice et d’aventures.

Cette occasion se présentera à lui bien assez vite, au moment où il découvre à cause d’un bête accident qu’il est l’Élu et, de fait, il décide de se rendre au royaume voisin pour annoncer la nouvelle de sa venue… Mais alors qu’il arrive là-bas, il découvre que le Roi de ce pays souhaite sa mort, car la venue du Héros ne pouvait que marquer celle du Seigneur des Ombres et donc, par précaution, il vaudrait mieux s’en débarrasser avant qu’il ne soit trop tard…

Je ne vais pas aller plus loin pour ne pas spoiler, mais comme tout bon conte, Dragon Quest XI ne sera pas l’histoire la plus surprenante que vous vivrez. La destination finale se devine dès l’instant où l’on lance le jeu et vous ne risquez pas de voir votre mâchoire décrochée en découvrant les motivations du grand méchant.

Cependant, et c’est là que la série en général se démarque, c’est que tout ce qui compte dans ce conte est ce qui se passe pendant le voyage. Ainsi, l’Histoire de ce jeu sera un enchaînement d’histoires où vous sauverez des villages des différents troubles qui l’accablent tout en vous faisant de nouveaux compagnons en route.

Et, en toute sincérité, ces histoires sont pour la plupart certaines des plus matures que j’ai pu vivre… Bah depuis le dernier Dragon Quest auquel j’ai pu jouer, en fait. Ce jeu nous dresse un immense portrait de l’Humanité dans tout ce qu’il peut y avoir de plus vil tout comme ce qu’il y a de plus formidable, tant et si bien que si vous vous laissez happer par l’ambiance conte de fées du jeu, vous risquez bien de faire couler quelques larmes à certaines reprises. Vous y connaîtrez la joie de voir des personnages vivant des aventures magiques tout comme la peine de découvrir certaines des thématiques les plus difficiles à aborder, comme le deuil ou bien les sacrifices.

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Le mot clé de cet épisode est la Nuance. Nuance tout aussi bien des situations que des personnages, tout comme dans leurs animations rendues possibles par cette nouvelle génération de consoles et dans leurs doublages anglais absolument phénoménaux. Chaque personnage a son histoire et sa personnalité qui les rendent instantanément attachants et le niveau d’attention dans le détail du monde d’Elréa fait que l’on est totalement immergé dans cette aventure qui peut vous tenir une quarantaine d’heures au grand minimum. Pour le coup, si je n’avais pas tant de jeux à critiquer ce mois-ci, j’aurais pris plus de temps pour explorer le monde ainsi que le post-game, mais bon, au moins j’ai réussi à finir le jeu et j’en suis plus que content.

Cependant, je me dois de pointer du doigt un tout petit détail qui projette une tache monstrueuse sur mon appréciation du jeu et ça vient d’un des personnages principaux de notre groupe : Sylvando, l’artiste de cirque.

Ce. Personnage. Me. Sort par les yeux. Il est censé être le comic relief du jeu, mais ils ont décidé d’opter pour le stéréotype de l’homme ultra efféminé que l’on n’avait plus vu depuis des lustres et que l’on aurait cru enterré avec l’arrivée de personnages LGBT comme Chloé et Max de Life is Strange ou bien Emil de NieR. Là, le personnage est présenté comme cette personnalité flamboyante avec un but tout aussi absurde que charmant, mais il est possible d’écrire des personnages gay plus nuancés, naturels et multidimensionnels que ça et pour un jeu qui justement mise tout sur la nuance de littéralement tous ses autres personnages et de ses situations, se retrouver avec un personnage si simple et écrit tout aussi simplement, bah… C’est dommage.

Over the Hills and Far Away

DQXI_Erik

Et là on attaque la partie la plus compliquée de la critique : le gameplay de Dragon Quest XI… Il est beaucoup trop simple pour être âprement décrit.

Vous le savez probablement, mais la série principale des Dragon Quest est, contrairement à celle des Final Fantasy, une série qui ne peut que très peu changer. Les fans hardcore sont une des raisons (le IX s’était pris une volée de bois vert pour avoir voulu être un Action-RPG et le X, malgré son succès, avait été haï au départ pour être un MMO), mais je suspecte aussi Square Enix de vouloir éviter de prendre des risques et aussi garder un pied dans le « RPG d’antan » sans avoir à créer une nouvelle IP.

De fait, si vous avez joué à n’importe quel Dragon Quest ou bien un JRPG des années 80/90, vous savez déjà à quoi vous attendre : des combats au tour par tour tout ce qu’il y a de plus basiques. Chaque personnage a sa propre classe et vous adapterez son équipement au fil de l’argent gagné pour le rendre plus puissant en attendant qu’il passe suffisamment en niveaux pour obtenir de nouvelles capacités en plus de pouvoir en débloquer grâce à des arbres de compétences eux-aussi assez simples.

Mais parce qu’il fallait bien trouver un ou deux gimmicks aux combats pour donner l’impression d’une évolution, deux « nouvelles » mécaniques ont été ajoutées : les « mouvements sur le terrain » et l’état hypertonique.

La première est absolument anecdotique. Vous pouvez déplacer vos personnages dans l’arène de combat, mais ça ne sert absolument à rien. Vous n’obtiendrez aucun bonus en contournant l’ennemi et vous éparpiller ne vous épargnera pas d’être touché par un sort ou une attaque visant plusieurs cibles. Comble du non-risque, il est possible dans les menus de laisser les personnages en position fixe pour se retrouver dans une disposition en ligne comme dans n’importe quel RPG d’époque. Bref, autant dire qu’il s’agit de simple poudre aux yeux.

Le second gimmick inutile vient de l’état hypertonique. Tout comme l’état d’hypertension de Dragon Quest VIII, il s’agit d’un état temporaire où vos stats seront boostées. La principale différence ici est que le joueur n’a aucunement la capacité d’influencer le déclenchement de cet état. Tout est lié au hasard, ce qui fait que c’est sympa quand on l’a, puisque l’on peut aussi faire des attaques combinées avec d’autres personnages dans cet état, mais si on ne l’a pas alors que l’on veut faire une de ces attaques, il faudra juste prier pour que ça se déclenche au plus vite.

DQXI_Théo

Après, pour être tout à fait franc, je n’ai que très rarement utilisé les attaques groupées parce que non seulement elles font perdre un peu de temps, mais en plus le jeu de base est tellement facile qu’on en n’aura jamais besoin. Si vous faites les choses bien en mettant régulièrement à jour la liste de vos compétences et renouvelez votre équipement, et faites au moins deux ou trois séances de leveling ici ou là, vous roulerez sur le jeu sans avoir la sensation de perdre votre temps, ce qui est vraiment appréciable.

Si vous voulez du challenge, il vous faudra soit atteindre le post-game, soit vous l’infliger en commençant une nouvelle partie, car il est possible de s’imposer divers handicaps d’une liste donnée. Dans un sens, c’est pas plus mal, puisque tout le monde peut finir cet épisode et apprécier cette fabuleuse histoire.

Les deux autres grosses nouveautés de cet épisode viennent des montures et la forge.

De temps à autres dans le jeu, vous tomberez sur des monstres scintillants. Une fois vaincus, il sera possible de les utiliser pour accomplir diverses actions, notamment traverser des obstacles que le joueur ne pourrait pas franchir en temps normal. Leur utilisation rend l’exploration bien fun, même si je dois avouer qu’ils auraient gagné à être plus nombreux et les donjons plus adaptés, parce qu’il y a de belles graines d’énigmes qui n’ont pas eu le temps de pousser plus que ça.

Enfin, la forge permet, comme son nom l’indique, de forger des armes, armures et accessoires avec les matériaux que l’on trouve en explorant le monde. Il suffit de trouver la recette dans des livres ou coffres assez bien planqués et si l’on peut, on peut lancer un mini-jeu assez rigolo qui permettra de débloquer des morceaux d’équipement très souvent bien plus utiles et puissants que ceux que l’on peut avoir en boutiques. De plus, il est possible en forgeant des objets de gagner des perles qui permettent de renforcer notre équipement actuel et ainsi créer des armes dévastatrices sans forcément avoir à débourser une fortune. Ce n’est pas l’à-côté le plus prenant au monde, mais il n’en reste pas moins utile et je me suis surpris à l’apprécier bien plus que prévu.

Evil Hands

Dragon-Quest-XI-Serena-Veronica

Comme dit plus haut, Dragon Quest XI est un jeu qui adore jouer la carte de la nuance et de vouloir être le plus crédible possible pour immerger au maximum le joueur. Cela passe non seulement par l’écriture de ses personnages, mais aussi par la façon dont est construit le monde.

Et même si Elréa n’est pas aussi vaste que l’on pourrait le croire, il compense plus que largement par le niveau de détail qu’il met avec énormément d’amour dans ses décors. Pas deux lieux se ressemblent et parfois même certaines sections au sein même d’une même zone offriront leur lot de choses à voir. Il m’est arrivé à quelques reprises de tout simplement m’arrêter pour observer les paysages tant ils fourmillent de petites choses intéressantes, qu’il s’agisse de cascades discrètes, mais magnifiques aux ravins les plus effrayants.

Un autre détail qui rend le jeu d’autant plus prenant vient de son doublage anglais au poil. Le plus surprenant est que la version originale était entièrement muette et je me demande comment ils ont pu faire sans. Les cutscenes sont faites pour avoir de la voix en elles et la version internationale fait bien de nous les offrir tant elles sont parfaites. Beaucoup d’accents différents, de voix différentes et tous les acteurs savent mettre en avant les nuances nécessaires dans les dialogues pour nous en mettre plein la tronche dans les moments les plus émouvants.

Enfin, il faut parler des musiques, grand «  » »bien » » » j’en pense de Kôichi Sugiyama, l’homme derrière certaines des meilleures musiques de jeux vidéo de tous les temps (ndlr : il possède des opinions très… Discutables, même si je vous laisserai vérifier tout ça par vous même pour vous faire votre opinion). Pour le coup… Le résultat était bien en deçà de mes espérances. Il y a de bons morceaux ici et là, mais il y a aussi pas mal de recyclage des précédents épisodes et les nouvelles pistes sont parfois peu inspirées. De là à dire que ça casse un peu l’expérience serait mentir, car toutes habillent bien les situations et permettent à certaines scènes de vraiment s’élever au panthéon des scènes les plus cultes de l’Histoire du jeu vidéo.

Au final et malgré mes trois grosses complaintes, Dragon Quest XI n’en reste pas moins un des meilleurs jeux de l’année. Une des meilleures histoires que l’on pourra vivre, c’est un conte qui se destine à absolument tout le monde, peu importe l’âge ou bien l’intérêt qu’il porte au jeu vidéo. C’est un futur classique qui joue très bien la carte du classicisme et qui démontre bien qu’il n’est pas nécessaire d’innover pour être excellent. Il se repose sur des bases plus que solides pour faire ce qu’il fat de mieux : nous faire voyager et, surtout, vivre des émotions intenses.

J’ai adoré ce jeu et c’est bien pour cela que Dragon Quest XI – Les Combattants de la Destinée est un…

Red Indispensable

Benjamin « Red » Beziat