C’est assez marrant de voir à quel point Platinum Games s’est rendu indispensable dans le milieu du jeu vidéo. Tout le monde veut son jeu du studio, que ce soit au départ avec SEGA et le trio Bayonetta, Mad World et Infinite Space, Activision avec Transformers Devastation et The Legend of Korra, Konami avec Metal Gear Rising Revengeance, Square Enix avec NieR Automata, Microsoft avec Scaleb… Bon ok, plus vraiment vu que Scalebound a été annulé.

Et là, aujourd’hui, on a Nintendo qui a à nouveau décidé de se financer une nouvelle IP avec Astral Chain. Car Nintendo et Platinum, ça remonte déjà au rachat de Bayonetta et le financement du 2 et prochainement du 3 en plus de la création de The Wonderful 101 et le co-développement de Starfox Zero.

Avec Astral Chain en plus, ça prouve aussi à quel point Nintendo fait confiance à ce studio en leur laissant faire purement et simplement ce qu’ils voulaient. Et visiblement, Platinum Games a apprécié ce geste, puisque Astral Chain transpire la passion et l’envie de bien faire par tous les pores.

Mieux encore, plutôt que de ressortir un simple copié-collé de tout ce qui a marché précédemment, le studio a carrément décidé d’innover en créant un tout nouveau système de gameplay et en revoyant un peu la structure. Après… Innovation et qualité exemplaire ne sont pas forcément compatibles et c’est malheureusement ce que l’on voit ici.

Pas pour dire que le jeu est mauvais, loin de là, mais… Disons que l’on a plus l’impression de se retrouver devant une sorte de baroud d’honneur du studio mélangé à une sorte d’apéritif en attendant la star absolue qu’est Bayonetta.

Chains of Love

Je ne vais pas vraiment me pencher sur le scénario d’Astral Chain parce que… Erm… Disons qu’il n’est pas fantastique.

On incarne une jeune femme flic ou son frère que l’on peut un peu customiser et on les suit dans des aventures impliquant des créatures venant d’une autre dimension qu’ils devront arrêter avec d’autres créatures spécialement domptées pour l’occasion. Le truc, c’est que si vous avez vu au minimum une dizaine d’anime dans votre vie, vous devinerez le scénario de A à Z à la seconde où le jeu commence.

Et je n’exagère même pas. Les twists arrivent quand vous vous y attendez et de la manière que vous pouvez imaginer au point que l’on finit par ne plus vraiment être investi. On finit par avancer dans le jeu plus pour ses personnages, son gameplay et son univers plus qu’autre chose. Presque tous les personnages sont des clichés ambulants et les trois quarts ne servent à rien au point que l’on oublie leur nom deux secondes après les avoir vus. Mais il y en a de très cool dans le lot qui vous donneront envie de continuer pour voir ce qu’ils deviennent (même s’il y en a un en particulier qui disparaît aussi vite qu’il est apparu malgré un énorme potentiel).

Ajoutez à ça un univers vraiment cool avec des décors bourrés de détails et une patte graphique stylisée et plutôt unique (et une interface utilisateur monstrueusement cool et stylée, talonnant presque Persona 5) et vous avez un jeu qui se joue clairement avec énormément de plaisir et un immense sourire sur la tronche d’un bout à l’autre.

The Mad and Wonderful Revengeance of Bayonetta

En termes de gameplay, il n’y a pas plus Platinum Games qu’Astral Chain. Pour faire simple, c’est un best-of de tout ce que chaque jeu du studio avait à offrir de mieux couplé à quelques mécaniques uniques.

Les systèmes de tranchage de Metal Gear Rising Revengeance couplé à la récupération de vie si l’on choppe le cœur des ennemis ? Présent ! L’esquive parfaite de Bayonetta qui ralentit un peu le temps pour permettre de coller de bonnes mandales ? Présent ! Le chien qui court et qui permet d’aller plus vite façon Okami ? Hah, c’est pas du Platinum Games, mais par Clover Studios qui s’est ensuite transformé en Platinum Games donc oui, présent ! Une utilisation du stick droit pour contrôler un second personnage à la Wonderful 101 ? Pré-sent ! Et une exploration des terrains de jeux à la recherche de petites quêtes annexes façon NieR Automata ? Yup, présent, même si pas totalement ouvert.

En gros, si vous avez joué à n’importe quel jeu Platinum Games, vous savez plus ou moins dans quoi vous vous embarquez pour les fondamentaux des phases de combat. La principale différence ici réside dans le fait que vous contrôlez deux personnages à la fois avec le Legion et dans le système de chaîne unique à ce jeu (sauf si vous comptez Whiplash sorti sur PS2, mais on va éviter de se perdre en analogies trop datées… Je me sens vieux à sortir cet exemple).

La chaîne est très intéressante dans ce qu’elle offre en termes de gameplay. Elle permet d’intercepter des ennemis pour les envoyer voler, les immobiliser ou bien d’envoyer votre Legion vers une plateforme lointaine pour que ce dernier vous envoie voler là-bas. Couplez ça au fait que vous avez cinq types de Legion, chacun avec leurs attaques spéciales, une matraque magique qui se transforme en flingue ou en machette et que vous pouvez tout changer à la volée et vous avez déjà une idée du type de combos de fou que vous pouvez sortir.

Juste pour vous donner le détail, le Legion épée vous permettra de trancher des liens ou des fils façon Metal Gear Rising, le Legion Arc vous permet de sniper des ennemis à distance ou activer des mécanismes, le Poing vous permet de choper des éléments du décor pour les balancer à l’adversaire, la Bête vous permet de vous déplacer beaucoup plus vite et la Hache possède un bouclier temporaire en plus d’une force de frappe monstrueuse. Chacun est non seulement utile en combat, mais les level-designers se sont aussi amusés à créer quelques mini-énigmes et mini-jeux rigolos centrés sur ces capacités, ce qui est un plus appréciable.

Le truc aussi fou qu’intéressant, c’est que malgré l’apparente complexité de contrôler deux personnages en même temps, tout se fait plutôt naturellement, au point qu’au bout d’une petite demi-heure j’avais déjà plus ou moins compris comment jouer. J’imagine que les tutoriels très naturellement intégrés au jeu et les situations assez simples au début ont pas mal aidé.

Et, chose cool, si vous jouez en Facile pour vous acclimater ou juste profiter du titre sans vous prendre la tête, il n’est pas forcément utile d’utiliser votre Legion en combat et vous pouvez parfaitement vous débrouiller en solo. Car en Facile, les combats sont plutôt simples, mais pas pour autant trop faciles : vous pouvez quand même vous faire sévèrement punir si vous n’êtes pas assez adroit avec vos esquives et les Legions serviront plus d’aide pour rendre les combats plus rapides si vous maîtrisez le système. C’est d’ailleurs un truc vraiment cool que j’ai aimé avec Astral Chain : le jeu peut convenir à tous les types de public sans être condescendant.

Vous voulez une expérience fun ? Vous pouvez jouer en Facile et vous aurez malgré tout une bonne dose de challenge par endroits avec des timings parfois bien serrés. Vous voulez un peu plus de défi ? Le mode Normal vous forcera à un peu plus réfléchir et comprendre comment fonctionnent les Legion et le système de combos.

Et si vous êtes maso, vous pouvez aussi refaire les chapitres en Extrême une fois ceux-ci terminés une première fois en Facile ou Normal, sachant qu’en Extrême, vous n’avez qu’une seule barre de vie, vous faites pas beaucoup de dégâts et les ennemis frappent comme des Panzers… Oui j’ai essayé par curiosité et en suis vite ressorti quand je me suis pris une mandale qui m’a enlevé les trois quarts de ma barre de vie et suis mort la seconde après.

Cependant, la structure du jeu est… Assez étrange.

Astral Chain est divisé en 11 chapitres, chacun durant presque une heure et demi en moyenne. Déjà, rien que cette durée peut poser problème puisque ça nous empêche de faire des sessions courtes ou bien de s’arrêter facilement et une fois lancé dans l’action, ça ne s’arrête plus tant que l’on n’a pas battu le boss. Là où ça devient un poil moins réjouissant, c’est que le rythme de ces chapitres est assez mal dosé.

Chaque chapitre est divisé en trois phases : une phase de préparation au QG, où l’on fera le tour des différentes boutiques pour devenir plus puissant et accomplir quelques petites quêtes annexes, une phase d’enquête et une phase d’action pour clore le chapitre.

Selon les chapitres, il est possible de zapper plus ou moins les deux premières phases et passer directement à la baston (et, chose bien, il est possible par la suite d’aller directement dans les phases d’action dans l’écran de sélection du chapitre si jamais on veut les faire en difficile).

Mais dans d’autres, il faudra obligatoirement accomplir quelques quêtes annexe pour avancer. Et j’ai pas envie de dire que toutes les quêtes sont nazes ou inintéressantes, mais quand mis côte à côte avec les phases d’action, elles ne font pas du tout le poids, voire même seront vues comme des obstacles à franchir pour ceux qui veulent juste un bon jeu de baston.

Personnellement, je dois avouer que j’étais dans le camp des gens qui ont trouvé ces phases un peu trop redondantes et qui se font au détriment du rythme du jeu, même si certaines sont amusantes et utilisent les mécaniques des Legion de façon intéressante et innovantes.

En revanche, si vous êtes le genre de joueur qui aime bien avoir un gros score en fin de chapitre et qui convoite le rang S+ à chaque fois ou bien qui aime bien finir le jeu à 100%, vous allez probablement détester ce jeu pour deux raisons : vous aurez l’obligation de faire toutes les quêtes annexes en plus de devoir bien jouer en combat pour engranger un max de points et… La corruption est votre pire ennemie.

En gros, la corruption, c’est des cristaux que l’on trouve un peu partout dans l’environnement et qui se ramassent quand le Legion passe dessus. Non seulement vous gagnez des points en les ramassant, mais en plus vous regagnez des points de jauge d’énergie nécessaires au bon fonctionnement de votre Legion.

Si vous jouez au jeu sans trop y réfléchir, ça va, c’est pas un problème et c’est même un bonus appréciable… Sauf qu’il y a un compteur qui apparaîtra régulièrement en haut de l’écran avec le pourcentage de corruption nettoyée dans tout le niveau.

Maintenant imaginez que vous voulez finir le jeu à 100%, sachant que les cristaux de corruption sont incroyablement nombreux et en plus se permettent parfois d’apparaître que lorsque vous les approchez de très près. Voilà, bienvenue en Enfer ! J’espère que vous apprécierez votre séjour !

Pour revenir à un truc plus positif, Platinum Games oblige, le jeu est pas mal bourré de contenus. Il y a notamment pas mal d’éléments de costume à débloquer, allant du très cool au ridiculement drôle. J’ai tellement envie de spoiler ce qui est devenu mon chapeau par défaut, mais je me retiendrai pour vous garder la surprise tellement j’ai hurlé de rire en le voyant la première fois.

J’ai dit plus tôt que le jeu ne comportait que 11 Chapitres et même si ça peut sembler assez court sur le papier, j’ai quand même fini ma partie en Facile et en lambinant juste un peu au bout d’une quinzaine d’heures. Compte tenu la moyenne des jeux Platinum Games, c’est plutôt élevé !

Imaginez maintenant y jouer par défaut dans un niveau de difficulté supplémentaire en faisant plus de quêtes annexes que moi et en plus en revisitant les différents chapitres en vous investissant un peu plus dans le post-game et vous comprendrez que Astral Chain est plus qu’honnête en termes de contenu et de durée de vie !

Avant de passer à la conclusion, un petit point sur les voix : le jeu possède les voix japonaises, mais jamais vous ne saurez clairement qu’elles sont présentes, sauf si vous passez dans le menu principal à l’écran-titre !

Il est impossible de les changer une fois votre fichier de sauvegarde chargé et ça commence avec les voix anglaises par défaut, donc si vous voulez les voix japonaises, il faudra d’abord commencer le jeu, puis une fois le premier checkpoint atteint, fermer le jeu, le relancer, puis aller dans les options sur l’écran-titre. Oui, ça fait pas mal d’étapes et je trouve ça un peu débile que ça ne soit pas proposé d’entrée de jeu, mais c’est comme ça.

Et bon, je pense que ça vaut le coup de changer les voix, puisque les voix anglaises proposées par défaut sont… Pas mauvaises, mais pas forcément géniales non plus. Ça et puis en japonais, le père du héros est doublé par Kenta Miyake, que vous reconnaîtrez comme la voix de All-Might de My Hero Academia ou bien Thor dans la version japonaise des films Marvel. Ajoutez à ça le fait qu’un autre des personnages est doublé par Daiki Yamashita, plus connu comme étant la voix d’Izuku Midoriya et vous comprendrez que le fan de My Hero Academia que je suis ne pouvait qu’être amusé !

Au final, je pense que vous aurez compris que j’ai plutôt bien aimé Astral Chain. Son système de combat réunit tout ce que Platinum Games a pu faire de meilleur durant cette dernière décennie et son univers est à la fois intéressant et accrocheur.

Après, son petit problème de rythme couplé à la montagne de clichés et le côté beaucoup trop prévisible de son intrigue font que je mettrais le jeu plus aux côtés de Mad World et The Wonderful 101 plutôt qu’aux côtés de Bayonetta et NieR Automata.

Astral Chain est très bon, mais pas non plus le chef d’œuvre que l’on aurait pu espérer de la part de ce studio en particulier… Même si concrètement ça veut aussi dire que Astral Chain se place malgré tout dans le haut du panier dans le paysage du jeu vidéo au sens large du terme !

Si vous aimez les bons jeux d’action ou bien êtes fan de Platinum Games, je sais d’avance que vous kifferez ce jeu. En plus Astral Chain se veut le plus accessible possible pour un maximum de gens, donc il peut plaire même aux joueurs un peu moins hardcore que ceux qui joueraient d’habitude à ce jeu.

En revanche, et même si je sais que ça en frustrera certains, ne visez juste pas le 100% pour éviter de finir dans un asile.

Et si vous l’envisagez comme votre premier beat-them-all, je vous conseillerais plutôt de vous pencher d’abord sur des jeux comme Devil May Cry ou les Bayonetta avant de passer à celui-ci, car même si Astral Chain est plutôt accessible, il reste malgré tout un poil complexe avec son système de Legions et ça serait une introduction assez violente au genre.

Benjamin « Red » Beziat