La Nintendo 3DS arrivant en fin de vie, on était en droit de se demander si certains titres seraient localisés ou non. Car même si Yo-kai Watch reste encore pas mal populaire chez les plus jeunes en France et dans certains endroits en Europe, aux États-Unis, cela semble être une autre paire de manches (au point que le cast de la série animée là-bas a été entièrement remplacé pour des raisons budgétaires). Après, vous pourrez arguer qu’il n’est pas rare qu’une des plus grosses régions sur les trois se voit parfois privée d’un titre, mais vu l’investissement requis pour localiser des jeux aussi massifs que Yo-kai Watch, on aurait pu se douter que deux solutions s’offraient à Level-5 : sortir le troisième épisode partout quitte à ce qu’il fonctionne moyennement aux States ou bien le sortir nulle part ailleurs qu’au Japon et se focaliser plutôt sur l’avancement de la traduction du 4, qui paraîtra sur une console en plein boom de popularité. Au final, ils ont opté pour la première option, mais pas sans compromis : au lieu de localiser et traduire les trois versions de cet épisode sorti depuis belle lurette au Japon (Sushi, Tempura et Sukiyaki), quitte à prendre un gros risque, Level-5 a eu la bonne idée de nous sortir directement la version Sukiyaki en le faisant passer pour une version unique en le nommant tout simplement Yo-kai Watch 3.

Mais assez des considérations et des choix de localisation. Que vaut le jeu en lui-même ? Eh bien disons que l’adulte en moi y voit un ensemble d’idées un peu fouillis et presque confus, tandis que l’enfant en moi y voit un bac à sable géant plein de monstres mignons et une compilation de plusieurs jeux en un seul.

Un Seul Ciel, Deux Destinées

D’entrée de jeu, Yo-kai Watch 3 annonce la couleur : vous vivrez non pas une seule aventure, mais deux à la fois radicalement opposées, mais complémentaires. Pour des raisons pratiques et parce que je n’ai pas suivi la série animée pour connaître le nom de la fille que l’on joue, je vais garder le nom de Nathan et nommer la fille Sarah, parce que je l’ai nommée comme ça dans ma partie et ça rendra la suite plus simple à suivre.

D’un côté, nous suivons donc les aventures de Nathan, qui va partir de Granval (la ville 100% française qui ne possède absolument aucune référence au Japon *sarcasme*) pour aller aux États-Unis suite à la mutation de son père. Il va découvrir un tout nouveau pays, de toutes nouvelles coutumes, se faire de nouveaux amis et tomber sur deux agents secrets un peu étranges qui ne sont pas du tout des références à Mulder et Scully de X-Files et qui ne sont pas du tout à la recherche d’aliens.

De l’autre, nous avons Sarah, qui est restée à Granval et qui nous offre une perspective bien différente. Déjà, elle n’est pas fille unique, ce qui impacte un poil le scénario, mais en plus elle est une geek qui s’assume et qui assume d’être « un peu bizarre », ce que je trouve vraiment cool pour les jeunes filles qui joueront à ce jeu, car il y a moyen pour qu’elles s’identifient à ce personnage bourré de personnalité. Sarah, alors qu’elle visite « pas-du-tout-Akihabara-avec-un-béret », tombe sur une Yo-kai Watch et est embarquée avec joie dans le monde des yokais… Même si son partenaire ne sera autre qu’Usapyon, un lapin cosmonaute avec un tempérament assez explosif à la recherche de son ancien propriétaire.

Diviser en deux l’histoire a été une excellente décision. Non seulement elle permet au joueur de visiter des lieux qu’il connaît en plus d’autres totalement inédits, mais ça améliore grandement le rythme des deux aventures, corrigeant ainsi le plus gros défaut des épisodes précédents, qui avaient tendance à nous balancer la véritable histoire que dans les derniers chapitres. Là, même s’il y a encore quelques errements ici et là, ceux-ci sont moins importants et surtout on arrivera bien plus « vite » à la résolution des intrigues de chaque personnage. Après, ne vous attendez pas non plus à quelque chose de révolutionnaire ou profond si vous y jouez alors que vous avez plus de 14 ans, hein. On est toujours sur des jeux destinés à un public relativement jeune, donc même si certaines thématiques restent très cool, ça n’ira jamais plus loin qu’une résolution avec un grand sourire et tout ira bien.

D’un point de vue gameplay et structure, le fait que l’histoire soit divisée en deux donne lieu à des décisions… Intéressantes. Concrètement, les deux histoires sont liées grâce à une application qui permet à Whisper et Usapyon de communiquer des infos qui permettront à chacun de progresser quand le scénario les bloque, mais en dehors de ça, il s’agit de deux aventures séparées, comme si on jouait à deux épisodes séparés d’une même série de RPG. Chacun possède sa propre équipe de yokais qui progresseront que si vous les faites progresser, les inventaires sont séparés et certains types d’événements seront exclusifs à un personnage. Ainsi, là où Sarah va subir la Terr’heure un peu n’importe quand (un mode bien connu des joueurs de la série où vous devez vous faufiler dans les rues de la ville tout en tentant de ne pas vous faire repérer par un oni qui vous défonce s’il vous trouve), Nathan aura le droit à la Zombie Night et au mode Blasters T. La Zombie Night, c’est plus ou moins la Terr’heure, mais où vous aurez la possibilité de vous défendre, tandis que le mode Blasters T est, comme dans Yo-kai Watch 2, une version allégée de Yo-kai Watch Blasters, mais cette fois-ci avec une thématique Indiana Jones.

D’ailleurs, je balance des noms de modes et de concepts comme ça, mais Yo-kai Watch 3 nous en balance une TONNE constamment. Entre le classique mini-jeu où l’on mange, les fusions, le Bingo-kai et sa nouvelle variante où l’on peut jouer aux fléchettes pour pouvoir utiliser la machine jusqu’à 30 fois en une journée (parfait pour les joueurs qui voudront le finir à 100%, soit dit en passant), un mini-jeu de navigation, le gymnase qui permet d’affronter des vieux boss pour pouvoir renforcer notre équipe, la pêche, la chasse aux insectes, le multijoueurs aussi bien pour s’affronter et échanger des yokais que pour jouer à Blasters T, des événements se déroulant de manière aléatoire et même un mini-jeu de rythme vraiment chouette, Yo-kai Watch 3 semble ne jamais vouloir s’arrêter et surtout semble presque avoir peur de vouloir se reposer uniquement sur sa partie RPG. Comme dit dans l’intro, pour l’adulte que je suis, ça donne au jeu un côté fourre-tout désorganisé, mais je pense que l’enfant que j’ai été aurait trouvé ça génial.

Cependant, s’il y a bien un détail qui m’a un peu irrité, c’est dans son système de quêtes et la téléportation. Quand on lance une quête, on a bien souvent une flèche qui nous indique quoi faire de manière assez claire. Là, ça passe, mais pour d’autres quêtes qui nécessitent d’aller à des lieux précis en vue ensuite de faire autre chose, ladite flèche se collera uniquement sur le PNJ qui nous a filé la quête. Autrement dit, il nous balance dans le vide et nous souhaite bon courage en espérant que l’on connaisse déjà la carte sur le bout des doigts. Je dois avouer que lorsque ces quêtes s’avéraient obligatoires pour avancer dans le scénario, j’avais juste envie de m’arracher les cheveux ou bien regarder une soluce pour m’en débarrasser (sauf que le jeu n’étant pas officiellement sorti, bah je devais me débrouiller, me laissant seul avec mes yeux pour pleurer) ou bien je passais à une autre quête obligatoire en espérant qu’elle soit suffisante pour progresser.

La téléportation, quant à elle, est un sacré retour en arrière par rapport à Yo-kai Watch 2. Car là où dans le second épisode il était possible de créer des points de téléportation en trouvant des miroirs très nombreux (il y en avait parfois trois par zone), là, on se retrouve avec seulement quatre à cinq points de téléportation par personnage, ne couvrant ainsi qu’une infime partie de la carte et nous forçant à nous débrouiller pour rejoindre nos destinations. Je ne m’explique pas ce changement et je dois avouer que ça m’a plus ennuyé qu’autre chose.

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Pour ce qui est des combats, on a droit enfin à de l’inédit et c’est un sacré changement ! Exit les roues de yokais à changer à la volée selon les besoins. Ici, tout le monde est placé sur une grille de neuf cases et il est possible de déplacer nos créatures semi-librement. Ainsi, selon vos besoins, vous pouvez placer un yokai devant un autre pour le protéger ou bien les mettre côte-à-côte pour les permettre de faire un combo, sachant que les déplacer vous empêchera de les bouger à nouveau pendant cinq tours. Les yokais attaquent toujours de manière automatique, donc vous n’avez qu’à gérer le chargement de leur attaques ultimes, le placement sur la grille de combat, les soigner et leur enlever leur altération de statut si jamais cela venait à arriver. Là où ça devient cool, c’est que ce système de déplacement rend les affrontements contre les boss bien plus stratégiques, sachant qu’eux-aussi peuvent utiliser des attaques ultimes et qu’il faudra être rapide pour déplacer vos créatures sur les cases qui seront épargnées par leurs attaques dévastatrices, sans compter que vers les derniers chapitres est introduit un nouvel élément de gameplay qui rend les affrontements et la capture bien plus intéressants, car nous impliquant d’autant plus. J’ai vraiment bien aimé ce nouveau système de combat, mais le détail qui m’a fait un peu tiquer vient de l’inutilité de faire des combats en dehors des donjons tant l’expérience donnée par les adversaires de rang E et D est ridiculement bas. Dans un sens, ça rééquilibre un peu les choses, puisque ça n’incite pas à faire de grinding et les boss deviennent tous bien plus intéressants, car tous se battent sur le fil du rasoir, là où dans le 2 je roulais sur tout le monde jusqu’au boss final.

En termes de présentation, ça reste dans la lignée des précédents. Pour permettre d’offrir un maximum de contenu, la carte du 2 a entièrement été reprise tel quel et s’y greffe donc la nouvelle zone américaine, qui possède un charme rural très marqué. La VF est… Dans la lignée des épisodes précédents, on dira, tandis que les musiques continuent sur la lancée des épisodes précédents, avec un nombre de pistes assez impressionnant et avec un très haut niveau de qualité.

En bref, Yo-kai Watch 3 représente l’aboutissement de ce que voulait être la série depuis ses humbles débuts. Une double aventure plus maîtrisée avec un système de combat bien plus fun et tellement de contenu qu’on ne sait plus forcément où donner de la tête.

Cela étant dit, les petits désagréments occasionnés par le système de quête et la réduction de points de téléportation donnent la sensation d’un léger retour en arrière. Rien de bien méchant, ni de quoi pénaliser l’expérience de jeu dans son ensemble, mais pour quelqu’un de pressé par le temps comme moi ayant joué au 2 deux fois, je dois avouer que ça m’a un peu gonflé. Pour le joueur qui peut prendre son temps, ça n’aura presque aucun impact.

Si vous êtes fan de la série, il n’y a même pas besoin d’hésiter. Si vous cherchez un jeu avec suffisamment de contenu pour vous sentir justifié dans votre achat, là, vous aurez de quoi faire ! En revanche, si les histoires et les univers enfantins ne vous bottent pas trop et que vous étiez là pour le côté japonisant de la série, j’ai comme la sensation que vous y perdrez un peu.

Dans tous les cas, si vous avez encore votre âme d’enfant ou que vous avez un enfant, je ne peux que trop vivement recommander Yo-kai Watch 3 tant il sait à qui il s’adresse et fait tout pour leur offrir ce qu’il y a de meilleur dans le jeu vidéo.

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Benjamin « Red » Beziat